Alon Ohel raconte sur N12 sa captivité: agressé sexuellement, enchainé, affamé

Agressé sexuellement, affamé, enchainé: la terrible captivité d'Alon Ohel

© David Cohen/Flash90

Libéré après 738 jours de captivité, Alon Ohel a accordé une interview à la chaine israélienne N12.

Il fait partie des festivaliers qui furent enlevés à Nova.

« Nous avons fui la fête dès le début des bombardements. Nous avons vu les interceptions et nous nous sommes dit : ‘On dégage d’ici’. Nous pensions nous arrêter dans un abri et poursuivre notre route dès que les tirs cesseraient. Nous étions dans l’abri et ça ne s’arrêtait pas. Pire encore – nous avons commencé à entendre des Kalachnikov. Où est l’armée ? Tu attends simplement ta mort », commence-t-il.

Ces instants, il les évoque avec précision:

Aner Shapira lançait les grenades hors de l’abri les unes après les autres. « Il était comme fou. Il nous a tous sauvés. Grenade après grenade jusqu’à ce qu’ils l’abattent lui aussi », poursuit Alon, enchainant: « Après son assassinat, il y a eu une grenade qu’Hersh Goldberg voulait lancer. Il hésitait et je lui ai crié : ‘Lance la grenade’. Il n’a pas eu le temps. La grenade a explosé à quelques centimètres de lui et lui a arraché la main. J’ai tout vu de mes propres yeux, et je pense que c’est cette grenade qui m’a fait perdre mon œil. Ils m’ont jeté comme un sac de pommes de terre dans le pick-up. J’étais en état de choc, je me disais ‘quoi, je suis dans un rêve ?’. J’ai vu quelqu’un sauter du pick-up et à la seconde même, ils l’ont déchiqueté. Je me suis dit : ‘Peu importe, je choisis la vie' »…

Il se souvient qu’en quelques secondes ils étaient à Gaza. Tous sous le choc: « Nous avons franchi un portail et hop – Gaza. Tu te dis putain, où est l’armée de l’air, que se passe-t-il. Ils ont simplement traversé une clôture. Tous mes cheveux étaient pleins de béton de l’abri et je saignais sans arrêt. Des douleurs atroces à la tête, à l’épaule et à l’œil. Je ne voyais plus ».

Il narre l’arrivée à un hôpital, où une foule haineuse était: « Les appeler des innocents ? », interroge-t-il? « Il n’y a pas d’innocents là-bas. Tu pries pour qu’ils réussissent à te faire entrer quelque part. C’est une peur terrible. Je leur crie que je ne vois plus, et ils m’ont déshabillé tout en essayant d’empêcher les gens d’entrer ».

Il raconte qu’ils se retrouvent le soir dans une maison près de l’hôpital: ils reçoivent des sédatifs: « Je ne me suis réveillé que le lendemain. Je n’arrivais pas à respirer tellement j’avais mal. »

Le voilà, comme les autres, recousu sans anesthésie. Avec interdiction de crier ou parler: « Les deux premières semaines, nous n’avons pas parlé. J’étais assis là avec des gens dont je n’avais aucune idée de qui ils étaient. Ils t’arrachent à la vie en un instant. Je suis un gamin de 22 ans, qu’est-ce que je connais de la vie ? Ils m’ont arraché de la réalité et m’ont mis en enfer en une seconde. »

S’écoulent 738 jours pendant lesquels il subit, enchainé et affamé, une agression sexuelle.

Il raconte s’être accroché à son envie de vivre quoi qu’il arrive afin de retrouver les siens, aidé qu’il fut par Eli Sharabi, figure de père, qu’il rencontrera après.

Après 52 jours, ils descendent dans les tunnels. C’est là qu’ils ont rencontré Eli Sharabi, Almog Sarusi, z’l, Uri Danino, z’l et Hersh Goldberg-Polin, z’l.

Quand Almog, Uri et Hirsch sont emmenés, Alon est certain qu’ils vont être libérés, mais ils seront transférés dans un tunnel où ils seront assassinés.

Lui reste avec Elya Cohen et Eli Sharabi: « Dès le premier instant, lui et moi avons créé un lien. Il y avait ce déclic. Une fois, ils nous ont jeté un bol avec un peu de pâtes et c’est tout. J’ai donné un coup de poing dans le mur, je me suis cassé la main et j’ai commencé à pleurer. Et là, il était là pour me serrer dans ses bras. Il était comme un père pour moi là-bas. C’était une étreinte de père. Parce que le manque te tue. C’est tellement dur. Il me soutenait et me remontait le moral là-bas. Il se traînait lui-même tout en me portant sur son dos. Eli m’a parlé de ses filles Noya et Yahel, assassinées le 7 octobre, ».

Eli et Alon se promettent l’un à l’autre de survivre pour leurs familles et de revenir sains d’esprit et en bonne santé.

« Celui qui n’y était pas ne pourra jamais comprendre », finit Alon. « Vous n’avez jamais connu la faim dans votre vie, vous n’avez jamais été enchaînés pendant un an et demi. Menotté comme un singe – et nourri comme un chien. Là-bas, tu n’es pas un être humain, tu es une bête. Nous mangions une pita et quatre cuillères de petits pois par jour. Il y a eu une période où nous ne mangions que des dattes séchées. Et tu sais que les terroristes ont de la nourriture. Tu te dis ‘au final on s’habitue à la faim’, mais non. Ce sont des douleurs dans tout le corps – tout le temps. Tu ressembles à un squelette. Tu te regardes et tu vois un cadavre, et ça leur fait plaisir. »

Alon raconte comment, à la faveur d’une frappe aérienne de Tsahal, il se retrouve enchainé au sens propre à Eli Sharabi: « Nous allions aux toilettes ensemble. Nous faisions tout ensemble. »

Il se retrouve ensuite sans Eli: « Nous avons compris que quelque chose se passait. Le responsable entre et dit : ‘Il y a un accord’. Alon, Eli et Elya sortent. Et moi je reste seul. Ils m’arrachent à Eli. Tout ce que je craignais se réalisait. J’ai dit à Eli ‘Wow, je suis content pour toi’, il me dit que tout ira bien. Que ça continuera pour la deuxième partie et que tant qu’ils ne ramèneront pas tout le monde, ils remueront ciel et terre. Et moi je reste là-bas, dans cet enfer. »

Mais les négociations sur la deuxième partie échouent: « C’était un mardi. Ils sont descendus en courant au milieu de la nuit et parlaient de 500 martyrs. J’ai compris que quelque chose s’était passé. Je ne savais pas quoi faire de moi-même. C’était encore un cauchemar qui se réalisait. Les terroristes jouaient avec les quantités de nourriture et il y avait du harcèlement sexuel. C’était quand j’étais seul. Tu entres pour te doucher et il vient te savonner. Il met du savon sur sa main et commence à te savonner sous la douche. Il te touche. »

Après la libération d’Eli Sharabi et Elya Cohen, Alon commence à recevoir plus de nourriture: le Hamas a compris que les images des otages squelettiques étaient mauvaises pour lui.

Il est transféré vers le nord de la Bande de Gaza, il rencontre Guy Gilboa Dalal.

Un jour, Izz al-Din al-Haddad, chef du Hamas, entre : « Vous sortez. » « À partir de là, tout se passe rapidement. La femme de la Croix-Rouge me prend et dit qu’elle est désolée. Elle était très embarrassée, parce qu’ils n’ont rien fait. Une organisation honteuse. Pas différente de l’ONU, n’est-ce pas ? »

Il évoque ce laps de temps que nous avons tous vu en direct: Ces minutes dans le véhicule de la Croix-Rouge. Cet instant où il voit les forces de Tsahal: « Je commence à regarder dehors et je vois des soldats. Et ce ne sont pas des enfants. Ce sont des hommes adultes, avec des familles et des enfants. Tu vois qui se bat pour toi. Tu vois des gars réservistes et ça te déchire. »

S’il garde la force de ne pas s’effondrer lors des retrouvailles avec sa famille, il « craquera » vite, notamment lorsqu’il apprendraqu’Eli Sharabi a perdu toute sa famille.

« Pendant deux ans, j’ai été un homme mort. J’ai prié pour cette lumière, pour que quelqu’un me sauve. Mais j’ai découvert que je suis fort. Que je peux tout faire. Je ne suis pas une victime, je ne cherche pas l’apitoiement sur moi-même. J’ai traversé ce que j’ai traversé, et je prends ça – pour grandir seulement. Je continue d’apprendre et de me développer. Je vais dévorer ce monde », conclut-il.

Alon a posté le message suivant après la diffusion de l’interview :

Salut les belles personnes.

J’ai choisi de raconter mon histoire pour rappeler à tout le monde, et à moi-même, que l’on peut se lever et partir des endroits les plus bas et les

Tout dans la vie est des choix.

Et j’ai choisi la vie.

J’ai choisi de croire que je ne suis pas seul.

Quand j’étais au plus profond des profondeurs de Gaza, à l’endroit des ténèbres lourdes et où le temps s’arrête, je ne me suis pas senti seul pendant un seul instant.

Bien que je ne l’ai pas vu, je savais que j’avais de la famille et des amis derrière moi.

Ta force m’a accompagné là-bas.

Je me suis battu pour toi.

Grâce à vous je suis debout sur mes jambes, vivant et bien.

Et j’ai choisi d’aimer.

Il y a toujours de la lumière.

Il y a toujours le choix.

Je vous aime tous

Alon

Tribune juive

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3 Comments

  1. Et on nous rebat les oreilles avec les « civils innocents ». Cela ressort clairement de tous les témoignages des otages : aucun civil, ni homme, ni femme ne leur a aidé, même pas par un petit sourire en cachette. Il ne sont vu que la haine. En même temps, les Gazaouis étaient alimentés par la communauté internationale. Même l’IPC reconnaît aujourd’hui qu’il n’y a jamais eu de famine. Sauf, bien sûr, pour les otages.

  2. merci pour votre témoignage tellement émouvant
    merci pour avoir raconté
    je ne peux que vous souhaiter un rétablissement
    rapide
    sans oublier tous nos disparus

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