Peine de mort pour les terroristes : débat éthique et politique

La proposition de loi de Sharon Gal (Israël Beiteinou) instituant la peine de mort pour les terroristes a été rejetée par les députés.
Soutenu par le parti Foyer juif de Naftali Bennett, le projet de loi divisait le Likoud et a même poussé le Premier ministre à créer une commission parlementaire.
« Si une telle peine est mise en œuvre en Israël, je ne resterai pas à mon poste de conseiller juridique un jour de plus. », avait averti Yehuda Weinstein. Soutenue par la ministre de la Justice et l’ensemble des députés du parti sioniste religieux, la peine de mort était selon Weinstein « déraisonnable, inefficace et immorale ». Si la peine de mort existe dans la législation, Israël, dans son histoire, n’y a eu recours qu’à deux reprises. L’exécution qui a marqué les esprits est celle d’Adolf Eichmann. Jugé à Jérusalem pour ses crimes, l’architecte de la solution finale est condamné à la peine de mort et le 31 mai 1962, il est pendu à l’aube. Incinéré dans un four construit à cet effet, ses cendres sont dispersées le jour même dans la mer, hors des eaux territoriales israéliennes.

« Permettre à Israël Beitenou de pouvoir dire

‘le camp nationaliste c’est nous’ »

eichmann
« Dans l’esprit des Israéliens, la peine de mort est intimement liée à l’exception Eichmann », affirme le politologue Denis Charbit pour qui cette loi constituerait « une régression, à l’heure où le mouvement général est à l’abolition ». Pour celui qui personnellement est « fier que la peine capitale, en dépit du conflit très dur qu’a vécu Israël, ne fasse pas partie de son arsenal législatif », ce projet de loi relève de la manœuvre politique. « Il s’agit d’une mesure populiste qui n’a qu’un but, permettre à Israël Beitenou de pouvoir dire ‘le camp nationaliste c’est nous’ », déplore le professeur spécialiste de la société israélienne. Classé à gauche, Denis Charbit prédit un échec pour cette proposition de loi. « Cela apporterait sur Israël une pression internationale dont elle n’a vraiment pas besoin. Israël ne peut pas prétendre faire partie du concert des Nations en établissant la peine de mort ». « Et puis, précise-t-il, le terrorisme actuel est tel que la peine de mort n’a aucun pouvoir dissuasif. La mort, les terroristes se la donnent eux-mêmes, elle fait partie de leur idéologie».

Une question politique liée à celle des échanges de prisonniers

Ce n’est pas la première fois que l’instauration de la peine de mort occupe le débat politique israélien. Pour certains, nombreux à droite, ce débat est intimement lié à la politique israélienne d’échange de prisonniers. En août 2014, le débat refait surface. Baroukh Mizrahi est assassiné sur la route d’Hébron devant sa femme et ses 5 enfants. Son assassin a été libéré dans le cadre des échanges de prisonniers pour récupérer Guilad Shalit. Autre angle d’attaque des partisans de la peine de mort : le laxisme des tribunaux militaires qui ne l’a requiert que très rarement. Même lors du procès des responsables du lynchage de deux soldats israéliens à Ramallah, la peine capitale n’est pas requise contre les accusés. Dernier argument des pro-peine de mort : dans de grandes démocraties comme les Etats-Unis, le Japon et l’Inde, elle est encore en vigueur.

Méir Tobianski, « tué par erreur »

En dehors de l’exécution d’Eichmann, l’Etat juif n’a utilisé qu’une seule fois la peine de mort. Nous sommes le 30 juin 1948, Meir Tobianski, officier de Tsahal est exécuté après être passé devant une cour martiale pour trahison. L’homme né en 1904, ancien major de l’armée britannique, est soupçonné d’avoir transmis des informations sur les positions israéliennes à l’ennemi jordanien. Un an après son exécution, les preuves contre lui s’effondrent comme un château de cartes. Une note est transmise à sa veuve, l’informant de l’acquittement à titre posthume de son époux et le rétablissement de son rang au sein de Tsahal. Quelques jours plus tard, le 5 juillet, le Premier ministre David Ben Gourion publie un mea culpa. Le 7 juillet, le corps de Tobianski est inhumé au mont Herzl avec tous les honneurs dus à son rang et à l’injustice commise par l’Etat hébreu. Sur sa tombe on peut lire « Tué par erreur ».
V.G-B pour Israpresse

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