“Le thriller de l’été”: “Liquidation à Pôle Emploi”, de Judith Bat-Or. -3-

***

Hugo piétine. Non. Pire. À mesure qu’il avance, il s’éloigne de son but. Et de la délivrance. À moins que ce soit le contraire. Pareil à un naufragé perdu au milieu des mers, sans plus aucun repère,qui s’épuise à nager en rond. Il dramatise, d’accord. Mais qui le lui reprocherait ? Sa mère est tellement lourde ! Et encombrante aussi. Comme du bon temps de son vivant. Secoué par un éclat derire, il relâche son étreinte autour de son paquet. Qui glisse entre ses bras. Son effort pour lerattraper, et maintenir son équilibre, mobilise tous ses muscles, lui arrache un cri de douleur. Lui qui méprise souverainement les rois de la gonflette ne cracherait pas à cet instant sur des abdominaux bien alignés au garde-­‐à-­‐vous.  Et  s’il  essayait  de  s’y  mettre ?  D’aller  à  la  salle  de  sport  une  ou deux fois par semaine ? Un peu d’exercice physique ne fait de mal à personne. Et encore moins à un soldat. Sauf que, tout bien considéré, l’armée n’est pas sa tasse de thé. Les plaisirs militaires, ledanger, la sueur, la crasse, le stress, l’épuisement, ne l’excitent pas vraiment. Et puis, il n’a pas l’intention de passer ses week-­‐ends à creuser des tombes et transporter des cadavres.

Plus que trois, quatre mètres. Il est vrai que sa pauvre mère… Arrête de déconner,  se  supplie-­‐t-­‐il,  pris  de  spasmes.  Non  mais,  c’est  juste  que…  C’est nerveux ! Bref ! reprend-­‐ilsérieusement. Sa vieille n’était plus une sylphide. Elle s’en plaignait assez. Lui en rebattait lesoreilles. J’ai encore pris du poids. Blabla.

Je ne me reconnais plus. Gnagnana. Pourtant, je ne mange rien. Mon œil. Plus aucun homme ne me regarde. Tu m’étonnes. Vieillir est une souffrance… Bonne nouvelle, en tout cas, tu ne vieilliras plus. Et ne grossiras plus non plus. Ce serait même le contraire. « Aaaah !!! » Ce rire lui a échappé. Plutôtun hurlement. Merde,  les  voisins,  fais  gaffe !  se  gronde-­‐t-­‐il,  inquiet.  Allez,  un  dernier  effort. Encore quelques pas. Un. Deux. Trois. Enfin, il balance le corps. Ouf !, une bonne chose de faite.

Il n’a plus maintenant qu’à refermer le trou. Il tend le bras vers la pelle. Suspend son geste. Pas encore. Il a besoin d’un instant. D’abord pour se reposer. Et il pourrait en profiter pour faire ses adieux à sa mère. Se recueillir un peu. Honorer sa mémoire. Ce serait la moindre des choses. Au fond, il ne lui en veut pas.  Est-­‐ce  qu’on en  veut à une voiture  de devoir  s’en  débarrasser ? Sûrement pas. Et pourquoi ? Parce que c’est dans l’ordre des choses. Il y a un temps pour tout. Le rodage, l’autoroute,la casse. D’ailleurs ne recommande-­‐t-­‐on pas de s’en débarrasser avant qu’elles ne se déglinguent ?Plutôt que de subir par sentimentalisme des pannes à répétition. C’est pareil dans tous les domaines.Mieux vaut prévenir que guérir. Exactement, avec sa mère, il a fait œuvre de prévention.  Abrégeant ainsi  leurs  souffrances  à  tous  les  deux.  Un  win-­‐win.  Il applaudit en passant sa pensée et son éloquence. Tant qu’il y est, il pourrait se fendre d’un discours, une sorte d’oraison funèbre. Mais sans grande pompe, évidemment. Il s’encourage. Allez ! Il a toujours été doué pour l’improvisation.D’accord. Mais je ne promets rien. Hugo adore se faire prier. Bon, ça suffit ! Et il se lance.

« Chère  maman,  voilà,  c’est  fini.  Cinquante-­‐six  ans,  c’est  pas  si  mal.  Et franchement, ilétait temps. Mieux vaut quitter la scène quand on est au sommet. Et tu as eu un peu de rab. Parce que, soyons honnête, ta descente tu l’avais largement entamée. Ta beauté, ta vivacité n’étaient plusque des souvenirs. De lointains souvenirs. Tu peux dire merci au destin de t’avoir épargné ladéchéance, les rhumatismes, le gâtisme, l’incontinence, j’en passe et des bien

pires. Le monde gardera de toi l’image d’une femme… présentable. Tu peux me dire merci à moi. Det’avoir sauvé de toi-­‐même. D’une horrible vieillesse. Cet âge sans avenir. Surtout pour les femmes, d’ailleurs. Je t’ai libérée, maman. Alors qu’avec ta santé tu aurais pu durer cent ans. Mais à quoi bon s’accrocher ? Et telle que je te connais tu te serais accrochée. La preuve, tu t’accrochais déjà.Pourtant  tu  le  disais  toi-­‐même :  “Mieux  vaut  mourir  qu’être  réduit  au  rang  de spectateur, comme un footballeur condamné à rester sur le banc de touche.” Tu avais l’âme d’un poète. Et souvent tu me demandais : “À quoi sert de vivre pour vivre ?” Bonne question que tu posais, là. Et j’y ai répondu en exauçant ton vœu de terminer en beauté. »

Il réfléchit. Attend. La source s’est tarie. Il sent un vide dans son cœur. Une émotion, peut-­‐être.

« Au revoir, maman. Adieu, conclut-­‐il la gorge nouée. J’espère que tu n’as pas trop froid. »

À ces mots, il frissonne. La saucisse gît au fond du trou. Dans la terre fraîche et humide. Sa mère était si frileuse. Ça suffit, maintenant. Son sentimentalisme risque de lui jouer des tours.

« Allez, on rebouche ce trou ! » s’ordonne-­‐t-­‐il militaire.

Il s’obéit, docile. L’armée, finalement ? Pas question, non. Pourtant, ça marche. Le travail le ragaillardit, lui donne des ailes, le libère. Avant même de finir,  il  a  oublié  son  chagrin.  Était-­‐ce  vraiment  du  chagrin ?  Ou  une  vague  de tristesse ? Une vaguelette, alors. Pas mal le coup de lavaguelette. Welcome back, soldat Leroy. Il est à nouveau au taquet, prêt à se raconter des bêtises eten rire.

« Une dernière pelletée pour papa. Une dernière pour maman. »

Il tasse la terre du dos de la pelle. La piétine dans un sens, dans l’autre. Regarde le résultat. Nivu ni connu ! estime-­‐t-­‐il, pas mécontent de lui. Il pose la pelle sur son épaule, demi-­‐tour, droite !, s’exécute, et s’éloigne d’un pas léger.

« Hey ho, hey ho, je rentre du boulot… chante-­‐t-­‐il en rentrant chez lui.

  • Isabelle,  Isabelle,  t’es  là,  crie  Émile,  le  voisin,  par-­‐dessus  le  mur  mitoyen.

Alors, ces patates, ça donne quoi ? »

Hugo ne l’a pas entendu. Le silence répond à Émile.

« Ben alors, j’ai rêvé. Ça s’arrange pas avec l’âge », constate-­‐t-­‐il du haut de ses quatre-­‐vingtsans.

Soft Machine

Laurence peut paraître ingérable, excentrique et irrationnelle. Elle l’est. Autant qu’honnête,intelligente, fidèle, intuitive, fantasque… Et horriblement têtue. Ou formidablement, selon. Bref, elle estrenversante. Laurence adore semer le trouble et provoquer l’indignation – surtout chez les coincés du cul ! –, par exemple avec des gros mots. Elle aime dépasser les bornes. Repousser les frontières,  corrige-­‐t-­‐elle,  pointilleuse.  Et,  par-­‐dessus  tout,  faire  la  fête.  Sans raison. Sans prétexte. La fête pour la fête. Comme l’art pour l’art. D’ailleurs, la fête est un art. Aussi, en matière de java, de bombe, de bringue, de bamboula, Laurence n’a pas d’égale. Considérant que le larron doit créerl’occasion au lieu de l’attendre comme un con, elle a tourné sa vie en perpétuelle célébration de la viejustement. Sauf là. Maintenant. À cet instant.

Dix minutes qu’elle sonne dans le vide. Elle s’éloigne lentement. Arrivée au bout de la rue. Elle revient sur ses pas. Se plante devant la porte. Et tape du pied, énervée. T’as pas l’air d’une vieillegourde, Madame la reine de la fête ! s’assène-­‐ t-­‐elle pour se défouler. Avec ta bouteille dechampagne et tes cotillons dans les cheveux…

Elle tente un dernier coup de sonnette. Long, insistant, suppliant. Attend un peu. Et baisse lesbras. Le pire, c’est de ne pas comprendre.

Elle est venue à pied en fredonnant les tubes de son adolescence. En hommage à Zaza,retrouvée hier après des siècles. Michel Fugain, Moustaki, Maxime Le Forestier. Chante la vie, chante, bien sûr, Ma Liberté, évidemment, Comme un arbre dans la ville, qui s’imposait dans le quartier, très vert pour une banlieue rouge, et Le Frère qu’elle n’a jamais eu, mais elle s’en fichait pas malpuisqu’elle avait Zaza.

Comme le vent a tourné, se disait-­‐elle en marchant. Depuis qu’elle a quitté son mari en pleine nuit après trente années de mauvais et déloyaux services, sa vie a repris son cours joyeux etturbulent. Et les bonnes choses n’ont cessé de lui

arriver en cascade. D’abord, sa nouvelle entente avec sa fille, Luciole. Qui l’héberge de son plein gré. Après un temps d’ajustement. Il a fallu légèrement lui forcer la main au début.

Quand Laurence avait débarqué avec sa valise à roulettes à trois heures du matin lui demandant l’asile, Luciole l’avait accueillie d’un « même pas en rêve » clair, net et retentissant. Au bout de dix minutes de négociations pied à pied, le voisin de palier était intervenu, la mine en diagonale.

« Et maintenant, la punaise, tu laisses entrer ta mère ou j’appelle la police », avait-­‐il menacé, dansson pyjama léopard.

  • Roarrrr », avait rugi Laurence.

Luciole avait éclaté de rire, jouant ainsi la première note de leur complicité depuis sa dernière tétée – à l’âge de quatre jours.

« Demain, tu te cherches un appart, s’était-­‐elle aussitôt reprise. Inutile de te mettre à l’aise. »

Pas question de laisser sa mère envahir son espace privé. Encore moins s’incruster. C’était il y a six mois. Depuis, Laurence s’est installée. Les deux ont peu à peu appris à se connaître. Et à s’apprécier. Après des années de distance et d’incompréhension, mère et fille se sont adoptées. Elles ont même réussi à se trouver des points communs : leur passion inavouable pour les comédiesromantiques, les potins mondains et le karaoké.

Au rayon des bonnes choses qui lui sont arrivées, Laurence range aussi Dominique, rencontré pendant les obsèques d’un ami de son ex. Les épreuves rapprochent, comme on dit. Ça n’avait pas été leur cas. En tant que reine de la fête, Laurence s’était occupée de la cérémonie. Pour décharger la veuve. Mais elle détestait le défunt. Quant à Do, comme elle le surnomme, il travaillait pour l’entreprise de pompes funèbres. Ils avaient donc sympathisé. Depuis, ils sortent ensemble de temps en tempspour boire un verre. Et discuter jusqu’à plus soif.

Elle préfère ne pas trop s’étendre sur ce sujet. Parce que les hommes, elle se méfie. Même les cinquantenaires et plus, dont les taux d’hormones ont chuté. Et elle se méfie aussi, surtout, de soncœur d’artichaut et de sa libido.

Enfin, il y a eu hier ses retrouvailles avec Zaza. Sa petite Zaza chérie. Sa plus vieille et plus chère amie. Perdue de vue après la fac. Qui est entrée dans son agence. Sa toute première cliente ! Deux jours après l’ouverture. Elle y avait lu un message, à peine codé, de l’univers. Un message de soutien. Il lui envoyait de bonnes vibes. Parce qu’elle avait fait les bons choix. Le livre du reste de sa viepromettait d’être palpitant, plein de surprises, d’aventures et de rebondissements.

Et Zaza tout d’un coup qui lui pose un lapin !

Quelque chose cloche dans l’univers, conclut Laurence, dépitée.

***

De retour à son QG, Laurence s’assoit lourdement dans le fauteuil en rotin au dossier queue depaon.

« T’as de la chance d’être beau, lui dit-­‐elle avec lassitude. Parce que question confort,franchement, t’es zéro. »

Elle note dans un coin de son esprit d’acheter des coussins. Un client mal assis est un client vite parti. Belle formule. À noter aussi. Et acheter un carnet de notes. Assez ! On n’en finira pas. Quand elle pense que Zaza a passé dans ce fauteuil  même  l’après-­‐midi  d’hier  sans  se  plaindre  ni  changer  de  fesse !  Ah, Zaza !…

Pendant presque deux jours entiers, Laurence avait espéré qu’une pauvre âme méchammentlarguée, salement empêtrée, foutrement… Abrège, on a compris… se décide à pousser la porte deson agence. « Asseyez-­‐vous, détendez-­‐

vous, Mamie Galère est là pour vous. » Pour tromper son ennui en variant les plaisirs, elle avait guetté les clients, planquée sur le trottoir, derrière un arbre ou une poubelle, chez son voisin Ferid, le pâtissier marocain, ou dans la pliure du rideau. Mais pas un chat n’était entré. À croire que le monde allait bien. Un monde sans crises conjugales, conflits de générations ni autres emmerdements majeurs. Uncomble ! Elle s’était attendue à des réactions de surprise, des sourires amusés, au moins à des regards curieux. Elle avait soigné chaque détail, le nom de l’agence, son enseigne et la décoration vintage. Elle n’était pas peu fière non plus de son texte d’accroche imprimé sur la devanture en lettres vichy rouge et blanc comme les bonnes confitures :

Mamie Galère

La lumière au bout du tunnel Conseils maison

Sur place ou à emporter

Mamie Galère, son bébé, propose une formule light de sagesse maternelle. Une solution confort moderne à un problème vieux comme le monde. « Des conseils de maman sans les désagréments. Combien de fois les gens renoncent à appeler leur mère à l’aide par crainte de ne plus pouvoir se débarrasser d’elle après ?  Tu  en  sais  quelque  chose,  avait-­‐elle  titillé  Luciole,  qui  osait  douter  de l’idée. J’ai trouvé ma niche aux œufs d’or ! En cas de pépin : Mamie Galère… Et plus rien n’ira detravers. »

Pourtant, ça ne se passait pas comme elle l’avait imaginé. Et si son projet capotait ?! Silence !s’était-­‐elle ordonné. Elle avait juste un coup de barre. Pour remonter la pente, elle ne connaissait rien de mieux que les bombes caloriques de Ferid. Aux grands maux, les grands remèdes. Elle prendrait quoi, cette fois ? Baklava ou makroud ? Ou cornes de gazelle ? Et pourquoi pas les trois ? Avec un thé à la menthe ! Elle en avait l’eau à la bouche. Elle s’apprêtait à sortir chercher son remède miracle quand elle avait aperçu cette femme qui descendait la rue, d’une démarche flottante, l’œil videet la mine plombée. Besoin de conseils, on dirait ! Laurence s’était concentrée – elle croit en le pouvoir des ondes et la télépathie. Pourtant, sa future cliente semblait passer sans rien voir. Et miracle ! Elle s’était arrêtée. Laurence avait admiré labeauté de cette femme qui, découvrant le slogan écrit sur la vitrine, souriait, l’air ravi. Et elle avait bondi – ce sourire, elle le connaissait ! –, ouvert la porte à la volée et déboulé dehors.

« Zaza ! s’était-­‐elle écriée.

  • Laulau ! »

Elles s’étaient installées pour se raconter leur vie. Trente ans à rattraper ! Elles avaient oublié letemps. Zaza avait fait à Laurence le récit de sa chute dans le piège le plus doux : celui de la facilité. Elle s’y était enlisée. Elle avait par naïveté, mais aussi par paresse, confié à son mari les rênes de leur vie. Il prenait toutes les décisions. Elle ne posait pas de questions. Elle le suivait les yeux fermés. Bercée par son amour, elle s’était endormie. Elle adorait qu’il l’adore, qu’il la choie, la protège. Dumonde. D’elle-­‐même aussi. À l’abri de son ambition. Elle n’avait plus peur de l’échec. Peur de l’échec ? Zaza ?! Laurence se souvenait avec une pointe d’envie des multiples talents de sa meilleure amie. Elle n’aurait jamais échoué. Le mari protecteur était mort brusquement. Et, tout aussi brusquement,Zaza avait réalisé que sans lui, elle n’existait plus. Elle n’avait toutes ces années vécu que par sonregard. Elle était devenue inapte.

« C’est pour des gens comme toi que j’ai créé Mamie Galère ! » s’était exclamée Laurence.

Et elle en avait expliqué le concept à Zaza.

« Quant à ma légitimité. C’est vrai, on peut se demander. Je ne suis ni psychologue ni assistantesociale. Mais j’ai plus d’expériences que tous ces spécialistes. Et plus de fantaisie aussi. C’est capital, la fantaisie. Parce que la vraie solution pour sortir des tunnels, c’est pas d’avancer dans le noirpendant des

kilomètres  dans  l’espoir  d’arriver  au  bout,  mais  de  creuser  soi-­‐même  l’issue. Voilà, ma Zaza, tu sais tout, avait-­‐elle terminé. Alors, qu’est-­‐ce que t’en penses ?

  • Je pense que c’est génial, Laulau ! Et même que c’est nécessaire.
  • C’est vrai, Zaza ? Tu penses vraiment ?
  • J’avais imaginé moi aussi un truc dans ce genre. Mais je n’ai pas ton courage. Ni ta ténacité.
  • N’importe quoi ! Et d’ailleurs, on pourrait travailler ensemble. Oh oui, ce serait génial ! Après toutes ces années.
  • Je ne sais pas. On verra. Je crois que j’ai d’autres problèmes à régler avant ça.  Alors,  vas-­‐y,  Mamie  Galère.  Quel  est  ton  conseil  pour  moi ?  Je  suis  prête  à payer. Ton prix sera le mien. »

Elles avaient ri, complices. Entre elles, pas de questions d’argent.

« Mon conseil, ma Zaza… avait commencé Laurence. Eh bien, dans ton cas, je dirais… »

Intimidée, elle jouait la montre. C’était son premier dossier. D’autant plus délicat qu’il s’agissait de Zaza. Sa meilleure amie revenue du passé dans sa vie. Elle n’avait pas droit à l’erreur. Allez, y a pas àtortiller !

« Dans ton cas, mon conseil, c’est de sortir au plus vite de ta zone de confort. Alors, tu réfléchis. C’est quoi, ta zone de confort ? C’est ta maison et ton fils. Tu fais quoi, dans ce cas ? D’abord, tu coupes le cordon. Tu renvoies ton fils à sa vie. Il t’en remerciera, le pauvre. Vivre avec maman à son âge, quelle angoisse ! T’as qu’à demander à ma fille. Et tu vends ta maison. Après ça, tu verras, tout se déroulera. C’est comme une pelote de laine, il suffit de trouver le bout.

Zaza avait tranché d’un « Adjugé ! » en un clin d’œil. En voyant son amie ainsi   métamorphosée   en   même   pas   un   après-­‐midi,   Laurence   avait   repris confiance. Elle et Mamie Galère avaient de l’avenir.

« Tu m’aideras à vendre ? lui avait demandé Zaza.

  • C’est compris dans le prix… »

Mais alors qu’est-­‐il arrivé ? Pourquoi Zaza fait-­‐elle la morte ? Laurence saute sur ses pieds – ce fauteuil est une torture – et passe sur la chaise à bascule. Il paraît que le mouvement favorise la réflexion. Elle commence à se balancer. De plus en plus vigoureusement. Elle se balance à toute volée. Ça y est ! Ça marche vraiment ! Son esprit se dérouille. Sa pensée s’éclaircit. Peut-­‐être queZaza n’est pas  prête  pour  une  solution  radicale.  Peut-­‐être  a-­‐t-­‐elle  regretté  d’avoir  donné son  accord.  Peut-­‐être  n’ose-­‐t-­‐elle  pas  l’affronter.  Et  risquer  de  la  décevoir. Maintenant, Laurencese reproche sa brusquerie légendaire, son impatience pathologique. Elle sait ce qui lui reste à faire. Alors que d’habitude, elle prônerait l’avance frontale, ne pas lâcher un pouce, obliger l’autre à s’exprimer, elle choisit l’approche en douceur. D’abord avec un SMS.

En douceur, en douceur…

À suivre…

© Judith Bat-Or

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