André Markowicz. “Et si l’Ukraine libérait la Russie ?”

Le traducteur André Markowicz, aujourd’hui familier des lecteurs de TJ pour ses Chroniques de guerre, est invité au micro d’Olivia Gesbert pour La grande table des idées pour son essai “Et si l’Ukraine libérait la Russie ?” paru le 3 juin.

Dans cet essai paru le 3 juin, André Markowicz analyse la culture russe pour y trouver une explication à la guerre en Ukraine. “J’en appelle à la défaite militaire de la Russie parce que la seule façon de se débarrasser du pouvoir totalement mortifère de Poutine, c’est de lui faire honte” explique le traducteur et le poète, spécialiste de la Russie. le reçoit dans La Grande table.


« Et si l’Ukraine libérait la Russie ?André Markowicz

Cette phrase semble indécente alors que la guerre fait rage, que l’Ukraine est ravagée, que la Russie s’efforce de détruire toutes ses infrastructures civiles ; alors que l’on assiste, avec plus d’un quart de la population ukrainienne déplacée ou réfugiée dans d’autres pays, à un nettoyage ethnique sans précédent et que l’on découvre de jour en jour des dizaines et des dizaines de crimes de guerre perpétrés par l’armée russe ; alors que c’est l’existence même de l’Ukraine qui est mise en cause par Vladimir Poutine. Et pourtant, je la répète, cette phrase : et si l’Ukraine libérait la Russie ? Si l’électrochoc provoqué par le désastre ukrainien arrivait, en Russie, à réveiller les consciences et à changer l’histoire russe ?La guerre dans La CerisaieLe 24 février dernier, ce qui m’a brutalement frappé, c’est que les premières batailles, près de Kharkov, se déroulaient sur le territoire même de La Cerisaie de Tchekhov, le « plus beau domaine du monde ». Bien sûr, on ne sait pas où elle est, cette Cerisaie, mais c’est à Kharkov que tout le monde s’en va à la fin. Ces pays, aujourd’hui de frontières, entre l’Ukraine et la Russie, ce sont[…] »Extrait de: André Markowicz. « Et Si L’Ukraine Libérait La Russie ?. » iBooks.

« … Enfin, il y autre chose, dans la honte que nous a imposée notre président en parlant de ne pas humilier la Russie. — La réaction, en Ukraine, à cette humiliation, a encore renforcé les conséquences de l’agression de Poutine. Car enfin… pourquoi Poutine n’a-t-il pas lancé sa guerre contre Porochenko, nationaliste ukrainien proclamé (je ne parle pas du fait qu’il était aussi un affairiste) ? C’est que Porochenko l’arrangeait parfaitement. Encore une fois, c’était la tentative démocratique de Zélensky (ou qui a amené Zélensky au pouvoir) qui lui était insupportable.Là où, par le jeu de la démocratie, l’électorat ukrainien avait réussi à mettre sur la touche les éléments les plus fanatiquement nationalistes, les plus bellicistes, de son corps politique, la guerre de Poutine les a remis en selle, leur donnant une aura de prophètes et de héros (et, de fait, la défense de Marioupol par le régiment Azov — qui n’était pas le seul à défendre la ville — a été héroïque). L’aide politique à l’Ukraine la plus active vient du régime ultra-conservateur de la Pologne. L’aide militaire la plus vitale vient de la Grande-Bretagne et des USA. — Macron et Scholz, en s’aliénant toute l’Ukraine, obtiennent le contraire de ce qu’on pense être leur but : l’Ukraine va de nouveau virer vers la droite, et peut-être même à l’extrême-droite (puisque les régimes dits-libéraux de l’Europe sont si « modérés », si lâches, pourrait-on dire, à les aider), et notre politique, déjà si faible, si hésitante, de création d’une puissance européenne autonome sera réduite à rien. »

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