La Chronique de Nidra Poller. Parlons de l’assimilation, parlons-en

Parlons de l’assimilation, parlons-en

Voyons, quand on parle d’immigrés, ce n’est pas toi. Et pourquoi pas ?  Pour commencer, ce qui me sépare des enfants juifs raflés à Paris, c’est une petite génération– mes grands-parents ont quitté, respectivement, la Pologne et la Hongrie au début du XXe siècle—et leur destination : les  Etats-Unis.

Pour que je sois cette immigrée dont on ne parle pas, il a fallu passer par la traversée de l’Atlantique dans la cale et l’arrivée à Ellis Island de mes  greenhorns, pauvres et démunis, tout juste acceptés et relégués aux strapontins d’une Amérique que vous ne vous imaginez pas, méconnaissable pour les yeux d’aujourd’hui.

Il n’était pas question d’ assimilation dans cette Amérique white bread, au pain de mie industriel sous cellophane. Les portes de leur Amérique, fermées sur nous et  notre culture juive européenne, trop riche pour qu’on l’abandonne. S’assimiler, dans cette Amérique-là, voulait dire ne plus être juif.  Pour moi, un Juif assimilé était encore plus  bizarre qu’un vrai Américain chez lui dans son pays.  C’était l’âge d’or des artistes et intellectuels juifs aux Etats-Unis.

Immigrée à mon tour, provisoirement posée à Paris depuis bientôt un demi-siècle, je reste et resterai étrangère ici chez moi en France, avec le passeport du pays natal où je ne pourrais pas bien vivre, américaine de naissance mais pas d’origine, américaine par reconnaissance vis-à-vis du pays refuge de mon peuple génocidé en Europe, je ne suis pas française, je suis étrangère et ça m’arrange. Venue à Paris sans être animée d’une mystique française, je n’ai pas suivi un enseignement français, je ne vibre ni aux époques ni aux héros, je connais mal les rois… Assimilée ? Pour quoi faire ? Et, savez-vous ? On ne me l’a pas demandé.

Quand on parle de l’immigration, tu n’es pas visée. Et pourtant, ça pique

Quand on parle de l’immigration, tu n’es pas visée. Et pourtant, ça pique. La première campagne « immigration zéro » que j’ai vécue (aux années Mitterrand ?) m’avait provoqué un élan de solidarité avec eux, les immigrés de trop dont on voulait parler sans le dire honnêtement.  Depuis lors, les zéros s’accumulent jusqu’à en faire des millions. On ne sait quoi en dire, comment les faire disparaitre sans violence.

Le rôle de l’intellectuel n’est-il pas de clarifier les termes du débat ? Ce n’est pas de cacher la réalité derrière des mots codés. C’est quoi, comme valeur, l’assimilation ? Quoi comme solution ? Pas pour nosotros, artistes bohèmes, un peu saltimbanques sur les bords. L’exotique, c’est ma joie de vivre. Langues, coutumes, costumes, démarche, danse, cuisine, couleur, j’aurais voulu avoir une centaine de vies à vivre ailleurs, différemment, à habiller mon âme  d’une gamme de styles ethniques, traditionnels, anciens et modernes. En pagne, en yukata, en chic parisien ça passe. Assimilée, j’aurais l’air emprunté.

Les Français, dit-on, ne s’aiment pas, c’est pour cela qu’ils n’arrivent pas à intégrer, voire assimiler cette immigration qui nous apporte des cauchemars médiévaux. Moi, je trouve que les Français s’aiment et ne s’aiment pas selon les jours, parfois trop et qu’ils sont plus ouverts aujourd’hui que pendant les années 1970 où il n’y avait pas de hamburgers, juste des baguettes jambon- beurre et à cause de la préférence nationale des Français enseignaient l’anglais aux Français. You know how that worked.

Voyons, quand on dit assimilation on ne veut pas dire tout le monde pareil. On n’imposera pas le steak-frites à Chinatown. D’ailleurs, qui se demande si les Asiatiques vivent en ghetto, mangent oriental, se marient entre eux, parlent leur langue étrangère et appellent leurs enfants Liu Xiong ou Peng Shuai. C’est kif kif pour les Asiatiques (qu’on prend tous pour des Chinois) en dehors d’une brève campagne contre les enseignes en sinogrammes. C’était l’un de ces sursauts linguistiques qui de temps à autre attaquent notre langue. Celle-là, heureusement, n’a pas laissé de traces. Ah ! Soudain je revois les maoïstes de Saint-Germain des prés en pyjama et chaussons chinois. Au bon vieux temps de l’innocence insolente.

Le strict minimum qu’on doit attendre d’un invité

Si assimilation veut dire respecter les valeurs, les mœurs et la loi de la République, ce n’est pas l’assimilation, même pas l’intégration, c’est le strict minimum qu’on doit attendre d’un invité, à savoir, se comporter en honnête citoyen. Le problème est que le problème n’est pas là. Des immigrés bien comme il faut, respectueux, munis d’un titre de séjour ou dûment naturalisés, ne provoquent pas d’angoisse et sont, tout compte fait, bien reçus. Alors que ceux qui posent problème ne vont pas s’assimiler, pas s’intégrer, tout français qu’ils soient par un droit de sol que certains voudraient supprimer.

Pour en parler, on invente des caches. Il y avait les « incivilités » et les « jeunes »,  il y a les « issus de l’immigration ». Comme la quatrième génération de ma famille américaine ? Dont la plupart ne connaît quasiment rien de ses origines européennes. Il ne viendrait pas à l’esprit de quiconque de les désigner par « issus de l’immigration ».  Pas plus que les Italiens, Portugais, Polonais, Espagnols, Irlandais, Arméniens, Maltais qu’on trouve chez nous dans tous les métiers  et souvent dans les médias, à réfléchir ensemble sur l’avenir de la France. Bon, passons.

Parlons plutôt de l’islam et l’islamisme. Au moins c’est clair ?

Parlons plutôt de l’islam et l’islamisme. Au moins c’est clair ? Clair comme une tempête de sable. Imam en costume cravate, intellectuel pluri-diplômé, homme de la rue en jean ou en djellaba, commentateur musulman, juif, catholique ou athée, chacun à sa façon expliquera que ce sont deux choses différentes. L’islam et l’islamisme. Ceux qui égorgent au nom d’Allah sont des ignares qui ne savent pas lire le Coran. A savoir qu’en plus d’être égorgé il nous faudrait trancher un débat théologique au sein d’une religion / idéologie qui ne reconnaît pas le point d’interrogation.  A parcourir le vaste monde musulman peuplé de milliards d’âmes écrasées on peine à comprendre si ce qu’on voit est bien l’islamisme ou tout simplement l’islam. Poussant un peu plus loin en aller-retour, on est en droit de demander si, comme certains le disent, les méfaits des allahou-ahkbars sont attribuables au refus obstiné des Français de les accueillir dignement, comment expliquer les mêmes inconvénients dans ces pays 100% à eux, où l’assimilation est garantie par la Sharia ? 

D’ailleurs, chez nous, dit-on, il n’y a qu’une petite minorité de réfractaires qui ne  respectent pas la République. Toutes les enquêtes sérieuses disent le contraire. Avec les pires pourcentages chez les jeunes, cette quatrième génération qu’on n’a pas pu avaler. Une petite minorité de plusieurs millions suffit pour empoisonner la vie de tous. Quelle importance, qu’elle soit petite ou grande, quand 90% de la population du Pakistan, pour n’en citer qu’une, voudraient nous faire disparaître ? Car il s’agit d’un défi à dimension planétaire. Ce qui nous ramène à l’immigration. C’est à dire, à la stratégie du jihad au 21e siècle. Dans toute son ampleur.

On aurait préféré ne pas connaître ce dilemme : Israël entouré de pays à haut teneur jihadiste, nos démocraties incapables de digérer des nouveaux-venus drôlement sensibles au jihadisme, une pression jihadique qui utilise ces vastes populations comme des armes par destination, des maîtres penseurs ès jihad qui corrompent la pensée rationnelle, socle de notre liberté. Aux quatre coins du monde, à l’intérieur et  à l’extérieur de nos nations et de nos esprits, l’oumma nous pompe l’air.

Créer en dehors du monde islamisé, en dehors de tout ce qui est religion, la matrice d’une libération impossible ailleurs que dans nos démocraties

Que faire ? Ne pas se laisser conquérir comme Byzantiium. Ne pas coloniser … ça mène droit à la décolonisation, retour à la case départ.  Ne pas assimiler bêtement.  Et surtout pas de soumission ! Il va falloir accoucher l’esprit libre niché au sein des peuples conquis par le jihad. Ici, chez nous. Ce serait une sorte de GPA civilisationnelle.

En fait, c’est déjà à l’œuvre. A la différence de certains, je ne prétends pas être la seule qui le pense, qui ose le dire. Cette idée de GPA, de créer en dehors du monde islamisé, en dehors de tout ce qui est religion, la matrice d’une libération impossible ailleurs que dans nos démocraties, m’inspire parce qu’elle ne ravive pas de tristes passions.

Ce n’est pas une idée de lider maximo qui soulève la foule.

Justement.

© Nidra Poller


Nidra Poller, née aux Etats-Unis dans une famille d’origine mitteleuropéenne et posée à Paris depuis 1972,  est une romancière devenue journaliste, le 30 septembre 2000, par la force des choses, dit-elle, par  l’irruption brutale, dans mon pays d’adoption, d’un antisémitisme génocidaire, Nidra Poller est connue depuis comme journaliste, publiée entre autres dans  Commentary, National Review Online, NY Sun, Controverses, Times of Israel, Wall Street Journal Europe, Jerusalem Post, Makor Rishon , CauseurTribune Juive, Pardès

Elle rédige le vendredi une Revue de la Presse anglophone pour le newsletter d’ELNET

Elle est l’auteur d’une œuvre élaborée en anglais, en français, en fiction et en géopolitique, dont L’Aube obscure du 21e siècle (chronique), madonna madonna (roman), So Courage & Gypsy Motion (novel)

J’assume la contradiction, ajoute Nidra, me disant romancière mais pas auteure.

Observatrice des faits de société et des événements politiques, elle s’intéresse particulièrement aux conséquences du conflit israélo-palestinien et aux nouvelles menaces d’antisémitisme en France. Elle fait partie des détracteurs de Charles Enderlin et France 2 dans la controverse sur l’Affaire Mohammed al-Durah  et soutient la théorie d’Eurabia (en particulier avec Richard Landes).

Elle a fondé les Éditions Ouskokata.

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3 Comments

  1. L’islam est une religion qui veut en finir avec tout et tout le monde. Un islam planétaire serait une nuit planétaire pour l’humanité. “L’Islam des Lumières” est une arnaque sémantique, un mythe, ça n’a pas plus existé que “le Christianisme des Lumières” ou que “la bonne entente judéo-musulmane”…

  2. Je suggère à l’auteur de parfaire sa connaissance de l’islam avec l’ouvrage très récemment publié de Marie-Thérèse Urvoy “Islam et islamisme”. Cela lui permettrait peut-être de tempérer l’adroite confusion de son propos consistant à ne pas dire ce qu’on dit tout en suggérant le contraire de ce que l’on s’attelle à démontrer.

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