Le cri des mineurs turcs fait écho…au cri des arméniens.

Au moment où la Turquie déplore plus de 300  morts dans l’explosion de la mine de Soma, comment ne pas s’interroger sur la faculté des autorités de ce pays à cultiver le négationnisme.
Le mardi 13 mai dernier à 15h10, la pire catastrophe minière de l’histoire de la Turquie s’est produite.
Un incendie au fond de la mine de Soma s’est déclenché, privant les travailleurs d’oxygène et sur les 787 mineurs, moins de 500 réussiront à s’en sortir.
Les autres meurent étouffés, les poumons brûlés par le monoxyde de carbone.
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Il y a deux ans, le président directeur général de l’exploitation se vantait d’avoir divisé les coûts de production par cinq.
Maintenant qu’il est en prison, pour combien de temps ? Et que les langues se délient, il ne s’agit plus d’un accident, mais d’un crime, et on dit que la sécurité a été sacrifiée au nom de la rentabilité.
Mais justice sera-t-elle rendue ?

Les forçats du charbon.

Une femme témoigne que son beau-frère et son frère, des forçats du charbon, ont été tués dans l’explosion.
La mine emploie la plupart des hommes de la région, et s’ils n’y travaillent pas, ils ne peuvent pas subvenir aux besoins de leurs familles.
Alors ils y travaillent, et y risquent leur vie.
Les mines turques sont les plus meurtrières d’Europe, et tuent 80 personnes par an.

« La sécurité du travail avant tout »

Il n’y a plus aucune activité dans la mine depuis l’accident, l’entrée y est murée, mais on peut encore y lire cette inscription : « la sécurité du travail avant tout »
Cela ne vous rappelle rien ?
Arbeit macht frei.
Le travail rend libre.
Inscrit au fronton du camp d’extermination d’Auschwitz.
J’exagère, me direz-vous. Pas si sûr.
La mort, c’est toujours la mort.
Qu’elles que soient les circonstances d’esclavagisme.
La route d’accès aux mines est défoncée et est interdite aux journalistes depuis l’explosion.
A Soma toute la ville est en deuil.
Serkan Ermis, qui travaille depuis cinq ans dans la mine qui a explosé, a survécu en enjambant les corps carbonisés de ses collègues.
Il raconte que dans leurs narines et dans leurs oreilles,  il y avait du sang, et qu’ils avaient la poitrine brûlée.

Nombreux sont les mineurs qui ont perdu des amis dans le drame. /AFP
Nombreux sont les mineurs qui ont perdu des amis dans le drame. /AFP

Il explique que dans la mine là où il y a des rats, il y a de l’air frais, et que les hommes les suivent pour aller manger.
Il fait noir comme dans un cimetière.
Tous vos liens avec la surface sont rompus.
Les gants et les masques, ils les ont achetés dans les supermarchés, et l’uniforme est en toile légère.
Rien ne les protège.
Mais, même si les mineurs dénoncent le manque de chambres de refuge et le nombre insuffisant de détecteurs de gaz,  c’est le seul travail disponible dans la région et le salaire est de 600 € par mois, deux fois supérieur au minimum légal.
Un homme se bat pour que soit reconnue la responsabilité de l’Etat dans ce drame.
C’est Engin Gökoglu, membre d’un collectif d’avocats qui recueille les témoignages des mineurs et celui des proches des victimes.
Pour faire condamner l’Etat il a besoin de preuves.
Sur les trois fils d’une famille qui travaillaient dans la mine, deux sont décédés.
Le troisième déclare qu’il n’y a eu aucun contrôle.
Les inspecteurs fonctionnaires de l’Etat chargés de surveiller ces mines n’ont rien contrôlé du tout depuis la privatisation du secteur en 2004.
« On entend juste leurs noms, ils restent à la surface, ils boivent un verre, mangent un morceau, signent et repartent. »
Le ministre du travail turc répète que la mine avait été inspectée le 17 mars dernier, mais il ne précise pas de quelle façon.
Les avocats n’ont que peu de temps pour monter leur dossier contre l’Etat, et ils savent que sans salaire, au chômage technique, les mineurs de Soma ne vont plus penser qu’à une chose, retourner dans les sous sols de la terre pour gagner leur vie.

La Turquie présente ses condoléances aux arméniens.

Pendant que le gouvernement turc peine à trouver des explications sur le laxisme criminel qui provoque régulièrement des catastrophes dans les mines du pays, les arméniens se trouvent soudainement gratifiés d’un geste symbolique.
Ne nous emballons pas. Il ne s’agit pas de reconnaître le génocide d’un million d’arméniens.
Juste d’admettre que, peut-être, l’armée turque se serait peut-être un peu laisser aller dans son enthousiasme à les exterminer, mais tout cela est dit en termes diplomatiques et mesurés.
Et puis, dans un an aura lieu le centenaire du génocide, oh pardon ! Le centenaire d’évènements tragiques, dixit le ministre des Affaires étrangères turc, Ahmed Davutoglu.
Et le gouvernement d’Erdogan se passerait bien d’un rappel historique.

Nos amis arméniens.

Lorsque je résidais à Marseille, le vendredi soir, la radio juive laissait la place à nos frères arméniens pendant le shabbat.
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Un soir, le présentateur s’est plaint de se sentir seul et de n’avoir aucun appel.
Alors, je l’ai appelé, nous avons discuté et je l’ai réconforté au nom de la communauté juive.
Je lui ai demandé de diffuser la chanson de Charles Aznavour « Les deux guitares ».
httpv://youtu.be/0mO-6JQulfY
Curieusement, il était persuadé que c’était du yiddish, non c’était de l’arménien.
Peut-être un peu des deux, et c’est tant mieux.
Fabuleux souvenir.
Pascale Davidovicz
 
 
 
 

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