Daniel Sarfati a lu « Le Procès », Edition commentée par Reiner Stach

Ça se bousculait à la librairie « Les Cahiers de Colette », rue Rambuteau. 

Derniers cadeaux pour Noël. 

En tête de gondole le Goncourt 2025, « La Maison vide » de Laurent Mauvignier, saga familiale de 750 pages sur les secrets et les souffrances de plusieurs générations d’une famille, et « Passion antisémite », la plaidoirie de Richard Malka qui démontre « l’antisémitisme à l’état quasi chimiquement pur » du parti de Melenchon. 

J’étais tenté. 

Mais pour un soir de solstice d’hiver, j’aurais préféré quelque chose de plus gai à emporter dans mes pénates. 

Dans un coin, sur une étagère ( j’aime bien fouiner ), j’ai déniché une pépite. Un livre à un seul exemplaire, un livre délaissé. 

« Le Procès » de Kafka. 

Vous allez dire : Ouais, bof… connu, archi-connu, tout le monde l’a lu… Et puis cette histoire, elle ne remonte pas franchement le moral, un soir de solstice d’hiver. 

Alors je précise. 

Il s’agit d’une nouvelle traduction mais surtout d’une édition commentée par Reiner Stach, grand spécialiste de Kafka et auteur d’une formidable biographie en trois tomes de l’écrivain. 

« Quelqu’un devait avoir calomnié Josef K… »

Le plus fameux incipit de la littérature mondiale annonce d’emblée qu’il s’agit d’une erreur judiciaire. K. n’a pas été dénoncé, il a été calomnié. 

Comme dans un roman policier, le héros et le lecteur vont devoir découvrir quel est l’objet et qui est l’auteur de cette calomnie. 

Le nom du personnage : Josef K. 

K pour Kafka, mais selon Reiner Stach ça aurait pu être X. Kafka a choisi K. Car il s’est toujours considéré comme un anonyme. 

Pour Josef, il s’agit d’une référence à l’empereur autrichien Franz-Josef, dont Kafka partage le premier prénom. Kafka ironise sur ce petit prestige. 

«… sans avoir rien fait de mal, il fut arrêté un matin. »

Dans le manuscrit original ( celui sauvé par Max Brod et emporté à Tel Aviv ), Kafka écrit tout d’abord « fut capturé », puis au bout de quelques pages du développement de l’intrigue, il se ravise, biffe « capturé » et écrit « arrêté ». Une capture aurait conféré un caractère fantastique à l’histoire. 

« Je vous fais un paquet cadeau ? C’est pour offrir ? », m’a demandé le vendeur. 

Non merci. C’est pour moi. Juste un sac, il pleut. 

Je suis rentré à pied. Pas de bus. Une manif à République. 

Au passage, j’ai pris à la poissonnerie près de la librairie une dizaine d’oursins. 

Une chouette soirée de solstice d’hiver avec 7 bougies allumées, des oursins et Kafka.‌‌

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4 Comments

  1. Merci pour cet article. Oui, Franz Kafka se prénommait Franz en hommage à l’empereur d’Autriche, discret hommage. Et Kafka (Kavka) signifie « choucas » en tchèque, un oiseau qui figure sur l’en-tête des papiers du magasin du père (bonneterie en gros), Hermann. Étrange, Franz Kafka avait une tête d’oiseau, de choucas, ce que montre fort bien le dessin à la plume du caricaturiste David Levine. A ce propos, consulter l’extraordinaire somme iconographique de Klaus Wagenbach.

    • C’est aussi ce que j’ai pensé, j’ai été très étonnée de lire qu’il mangeait des oursins mais je n’ai pas osé l’écrire la première de peur d’avoir l’air de faire constamment des reproches à M. Sarfati. Je l’ai déjà critiqué pour ce qu’il a dit de Benjamin Netanyahu, il finirait par penser que je lui en veux ! 😉
      Ce n’est pas le cas. J’aime bien son style léger et plein d’humour.

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