
Monsieur Kassovitz,
Votre récente sortie sur les « Français de souche », que vous présentez comme une « race en voie de disparition » vouée à être remplacée par le métissage, a suscité l’indignation chez certains, l’adhésion chez d’autres, et un silence accablé chez beaucoup. Vous vous êtes fait le porte-voix d’un discours qui circule depuis longtemps dans certains milieux culturels : celui d’un fatalisme joyeux, qui transforme le remplacement d’un peuple par un autre en événement désirable, presque rédempteur.
Vos propos, à la fois cyniques et messianiques, sont un concentré de tout ce que notre époque produit de plus inquiétant : la haine intériorisée de soi, la certitude morale du progressisme, et une étrange fascination pour l’extinction programmée d’un peuple historique — en l’occurrence, le nôtre.
Car vous ne parlez pas simplement de « métissage » comme d’un phénomène naturel — ce qu’il peut être, parfois, à petite échelle et dans un contexte d’adhésion réciproque. Vous en parlez comme d’un projet, d’un processus historique inéluctable, et même d’un châtiment mérité. Vous vous réjouissez, ouvertement, que les « petits blancs » s’effacent. Vous parlez de leur avenir comme on parle d’une espèce condamnée, et vous riez.
Un peuple disparaît quand il cesse de croire à sa propre valeur, quand il accepte de n’être qu’un transit génétique entre deux flux migratoires. Vous appelez cela le progrès. Nous y voyons une servitude volontaire.
Nous ne défendons pas une pureté raciale — notion que vous semblez projeter, à tort, sur ceux que vous critiquez. Nous défendons un héritage civilisationnel : une langue, une mémoire, des paysages, un art de vivre, des lois façonnées par l’histoire. Vouloir les prolonger n’est ni du racisme, ni de la nostalgie : c’est du courage, face au vide de votre idéal post-national.
Car ce que vous célébrez comme un « métissage », d’autres le vivent comme un effacement progressif de ce qu’ils sont — ou tentaient d’être. Non par haine de l’autre, mais par amour du sien. Et cet amour-là, contrairement à ce que vous semblez croire, n’est pas un crime.
La France n’est pas une fiction coloniale condamnée à se dissoudre dans le magma mondialisé. Elle est une réalité plurielle mais enracinée, capable d’accueillir, oui, mais aussi de transmettre. Et quand cette transmission échoue, c’est tout le pacte républicain qui se fissure. On n’unit pas un peuple par le mépris de ses fondations.
Mais de quel droit ?
L’effacement programmé d’un peuple : une forme contemporaine de racisme
Imagine-t-on un acteur africain ou asiatique déclarer, avec le même ton satisfait, que les peuples pygmées, japonais ou berbères sont une race en voie d’extinction, et que leur disparition serait une bonne chose, une évolution positive ? Il serait cloué au pilori, et avec raison. Pourtant, lorsqu’il s’agit des Français dits « de souche », tout est permis : caricature, mépris, médisance, moquerie, et aujourd’hui extinction joyeuse.
Ce deux poids, deux mesures ne relève pas du débat d’idées. Il relève d’une haine structurelle, d’une vengeance culturelle déguisée en progrès. L’ennemi n’est plus le raciste, mais le simple enraciné. Celui qui aime la continuité historique, celui qui veut transmettre sa langue, sa culture, sa manière d’habiter le monde, devient suspect.
Mais alors que vous parlez de disparition biologique, nous, nous parlons de continuité civilisationnelle. Car un peuple n’est pas une race. Il n’est pas un taux de mélanine ni un pourcentage d’ADN. Il est une mémoire partagée, une langue, une manière d’aimer, de mourir, de penser, une façon d’habiter la terre, un rythme intérieur, un ordre symbolique. Il est un récit, une fidélité, une forme.
Et cela, nous avons le droit, oui, le droit, de vouloir le défendre.
La France n’est pas un laboratoire, c’est une maison
Il est frappant de constater à quel point la France est aujourd’hui traitée comme un simple laboratoire expérimental, dont le but serait d’accueillir, d’absorber, de se transformer — sans jamais opposer de résistance. On parle d’elle comme d’un simple point de passage, un territoire neutre sur lequel on testerait la dernière utopie en date : celle du mélange généralisé.
Mais un peuple n’est pas un tube à essai. La France n’est pas un « projet » post-national. C’est une maison ancienne, avec ses poutres, ses fondations, son mobilier, ses portraits d’ancêtres au mur. Elle peut accueillir, elle peut intégrer, elle peut aimer. Mais elle ne peut pas se renier sans se détruire.
Ce que vous appelez « métissage » n’est pas en soi un mal — s’il se fait par le haut, dans un processus d’assimilation volontaire, au sein d’un cadre partagé. Mais ce que nous vivons depuis plusieurs décennies, ce n’est pas un enrichissement mutuel. C’est une désagrégation silencieuse. C’est une remise en cause permanente du cadre, une inversion des rôles : les hôtes doivent se faire invisibles, et les nouveaux venus imposent leur loi.
Et vous l’applaudissez.
L’universalisme ne consiste pas à disparaître
Ce qui frappe dans votre discours, comme dans celui de tant d’autres « artistes engagés », c’est la façon dont vous tordez l’universalisme républicain pour le transformer en nihilisme culturel. Le vrai universalisme ne consiste pas à nier son identité, mais à offrir au monde le meilleur de soi. Or, pour offrir quelque chose, encore faut-il en avoir. Ce que vous semblez souhaiter, c’est une France sans visage, sans voix, sans mémoire. Une France dont la seule grandeur serait de se fondre dans la masse mondiale.
Mais cette dévotion à l’effacement n’est pas du progrès. C’est de l’abdication.
Il ne s’agit pas ici de refuser l’altérité. Il s’agit de refuser le suicide culturel au nom d’une fausse générosité. Il s’agit de rappeler que ce pays a été bâti par des siècles d’efforts, de luttes, de raffinements, d’inventions — et qu’il ne mérite pas de finir comme une coquille vide au nom du dernier mot d’ordre multiculturel.
À ceux qui veulent encore croire
Nous savons que votre vision n’est pas isolée. Elle prospère dans les écoles, dans les médias, dans certains ministères. Elle est relayée par ceux qui veulent faire de la France un « espace » et non plus un peuple. Mais nous savons aussi qu’un autre discours existe. Plus discret. Plus douloureux. Mais plus profond.
Des Français, jeunes ou vieux, de toutes origines, sentent confusément qu’on les a trahis. Qu’on leur a appris à haïr leur propre culture. Qu’on a fait de leur identité une faute. Qu’on les culpabilise d’exister, et qu’on célèbre leur disparition.
À ceux-là, nous disons ceci : vous n’êtes pas seuls. Vous avez le droit de dire non. Vous avez le droit d’aimer vos racines sans mépriser celles des autres. Vous avez le droit d’exiger que l’on transmette et non que l’on dissolve.
La France n’est pas morte. Elle se tait, parfois. Elle s’endort. Mais elle revient toujours. Et elle reviendra. Parce que la beauté revient toujours. Parce que l’honneur ne meurt pas. Parce qu’aucun peuple au monde n’a jamais disparu en restant debout.
Monsieur Kassovitz, vous êtes libre de penser ce que vous voulez. Mais ne comptez pas sur nous pour creuser notre propre tombe. Vous parlez de disparition. Nous parlons de renaissance.
© David Duquesne
Infirmier, David Duquesne est l’auteur de « Ne fais pas ton Français! Itinéraire d’un bâtard de la République », paru chez Grasset en 2024, récit de sa douloureuse assimilation en tant que fils d’une musulmane d’origine algérienne et d’un français.

« Je suis né dans le Nord, à Lens, au coeur d’un quartier populaire. Ma mère Houria, d’origine kabyle, dut se battre pour s’arracher au traditionalisme familial. Elle rencontra mon père à l’usine, à la fin des années 1960. Je suis le fils d’une musulmane d’origine algérienne et d’un Français.
J’ai grandi avec ce double héritage, voyant mon quartier changer, les positions identitaires se crisper, le désir d’intégration se désintégrer, le communautarisme s’emparer des familles, la défiance et la violence s’installer, l’islamisme gagner du terrain…
Éduqué par la République, je partageais et défendais farouchement ses valeurs universalistes. Aux yeux de la communauté d’origine de ma mère, j’étais un traître ; aux yeux de certains Français, soit un métèque à jamais incarcéré dans ses origines, soit un provocateur « islamophobe ».
Pour sortir de cet étau, j’ai décidé de raconter l’histoire de ma douloureuse assimilation, qui témoigne du déchirement vécu par tant de « transfuges identitaires » dans une France en mutation ».
David Duquesne
On ne compte plus les stars du showbiz qui tiennent des propos racistes prenant pour cibles Juifs ou/et Blancs, des deux côtés de l’atlantique. C’est la preuve que ces deux racismes forment un double racisme d’Etat. Le synonyme moderne de racisme est « antiracisme ». Mais contrairement à l’auteur de l’article, je ne considère plus la France comme une maison. Ou alors une maison d’aliénés (dangereux). Un musée des horreurs.
C’est à se demander ce que Mathieu Kassovitz a dans la tête en s’exprimant ainsi, la haine de soi, l’embrigadement LFI, pire encore que Mélenchon. A-t-il rejoint ce parti…