On aimerait tellement y croire. Moi non plus. Par Yves Charnet

Toulouse, 9 mai

La monture des lunettes cache mal cette boule d’émotions dans sa gorge. Ces larmes au bord de ses yeux clairs. Ce nouveau visage regarde longuement la foule. Avant de prendre la parole. On entend monter, comme une houle sonore, l’incroyable ferveur de tous ces fidèles massés depuis des heures sur la place. Crucifix, micro, rideau rouge.

La bienveillante simplicité de cet Américain, pas encore revenu du Pérou, nous change du barnum baroque de Trump. Premières paroles depuis le balcon du Vatican. Le mal ne gagnera pas. Toutes les couleurs de l’homme dans cette foule innombrable sur la place Saint-Pierre, tous les âges, toutes les façons d’être chrétien dans ce monde bigarré. Le mal ne gagnera pas. Parole d’un fils d’Augustin, mille-six-cent-trente-neuf ans après la conversion du fils de Monique.

C’est rare le temps long. À la télévision. Le petit écran de mon ordinateur est au bord des larmes. Cette absurde buée sur mes pupilles. Des drapeaux péruviens fleurissent cette marée humaine où des mains noires se tendent vers des mains jaunes ou blanches. Priant pour Léon XIV, né à Chicago, le 14 septembre 1955, de mère espagnole & de père d’origine française & italienne. Rien de métissé comme notre humanité. On aimerait tellement y croire. Moi non plus. Je repense soudain à telle page endeuillée de Michel Deguy. Splendor veritatis dans ce monde chaque jour plus immonde. Je ne suis qu’un garçon hébété qui tente, en écrivant ces carnets de déroute, de tenir le coup dans l’époque. Un gars bien ordinaire, un homme de peu de foi.

© Yves Charnet

« Ce texte fait partie d’une série en cours intitulée « Mots des autres ». Nouveau chapitre de « l’autofiction sans fin » entreprise depuis « Proses du fils » (La Table Ronde, 1993). Tentant de renouveler la poésie par l’autobiographie et l’autobiographie par la poésie, Yves Charnet travaille depuis trente ans à un véritable « self-portrait in progress », dont l’impossible somme pourrait s’intituler « Récis d’Yves » ou « Tentatyves ».
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1 Comment

  1. « Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a souhaité jeudi au « premier pape des Etats-Unis », Léon XIV, du succès pour réconcilier toutes les religions.

    « Je souhaite au premier pape des Etats-Unis de réussir à promouvoir l’espoir et la réconciliation entre toutes les croyances », a déclaré M. Netanyahu sur son compte officiel X. »

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