Pourquoi le post “Je suis juif” de Philippe Torreton était si important ?

Le comédien, artiste et écrivain Philippe Torreton a donc pris le temps de rédiger un long post intitulé “Je suis juif”, lui qui ne l’est pas, pour manifester dans le désert des gens de culture, historiquement et majoritairement de gauche, son soutien aux Juifs agressés là-bas, agressés et injuriés ici. S’étonner aussi du silence et de l’absence de réaction d’ampleur en France (hormis dans l’autre sens), alors même que plus de trente français ont péri le 7 octobre et que plusieurs autres ont été kidnappés à Gaza dans des conditions sans doute terribles.

Quand on est un homme de gauche, comme l’a toujours été Torreton – qui l’est resté, on n’a rien à gagner “à sortir du bois”. Hormis recevoir les remerciements de Juifs eux-mêmes et de quelques démocrates jusqu’ici plus ou moins muets car ils n’ont pas eu son courage. Hormis recevoir surtout un torrent d’injures et de boue, et quelques dizaines de menaces de morts que la plateforme Pharos n’a pas fini de comptabiliser…  

A contrario, d’autres artistes “de gauche” n’ont pas manqué d’apporter, sans discrimination et sans recul, et surtout sans un mot de compassion pour les victimes par centaines du massacre du 7 octobre, leur soutien aux Palestiniens (vu comme un bloc unique, forcément d’accord avec les agissements du Hamas). 

Il y a bien sûr la pétition publiée dans “L’Humanité” qui joue depuis 50 ans la même partition manichéenne et cynique, avec dans la liste des signataires son lot d’authentiques antisémites (mais de gauche… alors ça va, ça passe !). Il y a les messages répétés de soutiens d’un footballeur (qui a signé la pétition) et ceux d’un autre, presque retraité qui se la coule douce en Arabie Saoudite tout en distillant ce qu’il estime être des paroles de paix. Il y a aussi un athlète multimédaillé qui pète les plombs en faisant de Netanyahou un élève d’Hitler qui aurait surpassé son maître et d’Israël un état génocidaire… Il y a aussi le dégueulis sur Twitter (devenu X, donc pornographique) d’un acteur de sitcom à deux sous – qu’on ne citera pas – et soi-disant musicien gipsy, qui abreuve son fil de retweets anti-israéliens et pro-palestiniens, parfois même des fakes grossiers et des propos purement antijuifs. Ses potes humoristes “de gauche”, tendance Meurice, ne sont pas en reste…   

Une goutte d’eau salvatrice

On pourrait penser que le contrepoids du post de Torreton est bien faible face à cette escouade d’antisionistes, masquant en réalité leur inépuisable et inextinguible haine des Juifs. Mais pour nous qui souffrons de notre sort, et surtout du sort de nos proches en Israël, toujours sous le feu des fusées du Hamas et menacé à court terme par la puissante armée iranienne du Hezbollah, cette publication vaut de l’or, adoucit nos plaies béantes, calme un peu nos craintes… 

Le courage de Torreton est, tout compte fait, du même tonneau que celui de Sophia Aram, d’Abnousse Shalmani, de Philippe Val et de quelques autres. Tous ne sont pas juifs mais comprennent que l’enjeu dépasse de beaucoup la mort et la souffrance des Juifs. Ils n’oublient pas pour autant celle, bien réelle, des Palestiniens, objets d’intérêts qui les dépassent depuis tant d’années et, depuis le début du 21^ème siècle principalement, de mouvements islamistes et assassins prétendant les représenter et les défendre en les enfonçant et les opprimant au contraire sans cesse.

Alors oui, le message de Torreton peut sembler une goutte d’eau dans l’océan de haine qui nous entoure. Oui, il ne gomme pas les étoiles pochées sur les murs de bâtiments comme dans l’Allemagne nazie des années 30. Oui, l’intelligence de son propos n’efface pas la bêtise carabinée des jeunes excités du métro, promettant de nous “niquer” et de “niquer” les grands-mères (pourquoi les grands-mères ?) et se revendiquant fièrement nazis. Oui, il n’altère pas le profond malaise ressenti à l’écoute des “Allah Ouakbar”, des “Les Juifs à la mer” entendus Place de la République. Eh oui il ne permet pas d’oublier les ignominies proférées par Obono, Porte, Soudais et consorts. Et bien sûr celles du gourou Mélenchon. 

Mais qu’il fait du bien ! 

Que les grandes gueules de la scène médiatique française – y compris des Juifs -, qu’on entend habituellement à toute heure et en tout lieu gloser sur tout et rien en s’imaginant que leur parole a du poids, en prennent de la graine ! Trois semaines après le massacre, on n’oubliera aussi peu leur silence, voire leur hostilité, que le message de Philippe Torreton.       

© Geka