Gaza : Le plateau de Pratzen à Austerlitz

Pour moi, l’opération de Tsahal de la nuit dernière est du niveau de la stratégie de Napoléon à Austerlitz. C’est le coup du plateau de Pratzen appliqué à Gaza en 2021 et avec des avions de combat :

Laisser croire au Hamas qu’il a l’initiative, qu’il est maître de l’emploi du temps et qu’il va pouvoir déployer sa stratégie habituelle, à savoir provoquer Israël par des tirs de roquettes massifs, entraînant des frappes aériennes ciblées et une offensive terrestres conventionnelle en zone urbaine, entravée par de multiples pressions politiques et diplomatiques, résultant sur de nombreux morts dans les rangs de Tsahal, beaucoup de frappes pouvant être présentées comme des crimes de guerre, des dizaines d’images de soldats israéliens à Gaza justifiant les accusations d’occupation, et un retrait infamant des forces israéliennes avant qu’elles n’aient pu atteindre leurs pleins objectifs.

Mais cette fois, la réaction israélienne au premiers tirs a été molle. Même les israéliens râlaient contre les politiques parce qu’ils tardaient à prendre des décisions, accusant le climat politique actuel d’un gouvernement de transition entre des élections à répétition. Israël paraissait indécis et paraissait avoir du retard à réagir, d’autant que la situation intérieure était inquiétante. Israël paraissait faible, comme Napoléon paraissait faible avant Austerlitz.

Lorsque les frappes israéliennes commencent, elles sont limitées et précises, comme d’habitude. La stratégie du Hamas semble fonctionner à merveille. Des erreurs de tirs de roquettes tuent des enfants gazaouis, ce qu’ils imputent à Israël comme, à chaque fois et la presse internationale relaie, comme à chaque fois. Tout marche comme prévu.

Puis, les roquettes s’intensifiant, Israël annonce la mobilisation de ses réservistes, annule son grand exercice et masse ses troupes à la frontière. Les soldats appellent leurs mères et leur disent de ne pas s’inquiéter, ce qui a logiquement l’effet diamétralement opposé et les mères juives se répandent en inquiétude sur les réseaux sociaux, évidemment suivis par les renseignements du Hamas. Tout semble indiquer que Tsahal se prépare à une offensive massive à Gaza, comme en 2014. L’Etat-Major du Hamas se frotte les mains.

Des titres de presse commencent à annoncer que des unités terrestres font des incursions furtives à Gaza pour des missions de démolition. Le concept est un peu étrange mais vu que la presse le dit, on y croit. Des images de réseaux sociaux montrent les soldats de Tsahal échanger des coups de feu à la frontière de Gaza et un Sergent perd la vie par une roquette anti-char du Hamas. Les occidentaux appellent à la retenue, comme d’habitude. Pour le Hamas, tout roule. C’est reparti comme en 14 ! Ils sont confiants. Israël est dans la même position de faiblesse entravée qu’en 2014 et ils le montrent à chaque étape. Comme Napoléon qui fait évacuer le plateau de Pratzen, l’endroit le plus stratégique d’Austerlitz pour le laisser aux Russes, donnant ainsi une impression de faiblesse et d’incapacité à manœuvrer.

Hier soir, les services de communication de Tsahal annoncent le début d’une offensive terrestre à Gaza, ce qui ne surprend personne vu que les Israéliens préviennent toujours la population. Les forces du Hamas rejoignent alors leurs postes de combat, leurs tunnels, leurs postes de commandement, persuadés d’être en position de force parce qu’en défensive en zone urbaine et prêts à mener des embuscades furtives sur les troupes terrestres israéliennes qui pénètrent dans leur dispositif. Comme les Russes sur le plateau de Pratzen qui voient les troupes de Soult et de Davout à Sokolnitz et Telnitz dont le manque d’efficacité confirme la faiblesse française et qui appliquent leur stratégie.

Et les troupes du Hamas sont exactement où Tsahal souhaitaient qu’elles soient, comme les troupes Russes se mirent exactement dans la position où Napoléon voulait les attaquer.

La Heyl’ A Avir, telle les divisions des Généraux de Saint Hilaire et Vandamme, forte de 160 avions de combat, soit 45 % de ses forces, attaque violemment les tunnels, postes de commandement, caches d’armes et postes de combat où le Hamas attendait patiemment les forces terrestres israéliennes. Plusieurs centaines de bombes, de missiles et de roquettes israéliens s’abattent sur les troupes du Hamas incapables de se défendre contre une attaque aérienne qu’ils n’avaient pas prévu.

D’après plusieurs sources, ce sont plusieurs centaines de combattants du Hamas qui ont perdu la vie ou sont enterrés vivants dans leurs postes de combat, qu’Israël avait parfaitement identifiés et en a observé la préparation après l’annonce de l’attaque terrestre.

L’attaque terrestre n’a pas eu lieu. Son annonce avait pour but de réunir les combattants du Hamas dans les postes de combat et de les écraser sous les bombes de l’aviation israélienne.

Et Israël a même poussé le bouchon jusqu’à annoncer, ce matin, que l’annonce de l’attaque terrestre était une erreur de communication interne. ” J’ai glissé, Chef ! ”

Il faut attendre les résultats du renseignement et s’attendre à des guerres de propagande où le Hamas n’avouera jamais le désastre mais il y a fort à parier que le Hamas vient de vivre sa plus terrible défaite. Et il n’y ont vu que du feu.

Pourtant, des signes avant-coureurs auraient pu les alerter. L’Allemagne affichait les couleurs israéliennes sur ses bâtiments publics. L’Autriche faisait de même. Les Américains était étrangement silencieux, à l’image de Biden qui bafouillait en “espérant que cela s’arrête plus tôt que tard” mais semblant ne pas être très impliqué. Même Macron s’est senti obligé de condamner fermement le Hamas. Mais le Hamas s’est embourgeoisé, après 16 ans au pouvoir et une forme de routine dans ses affrontements avec Israël.

Du côté israélien, un homme, un parachutiste, le Général Avi Kokhavi, entouré des lieutenants et capitaines de 2014 devenus colonels et généraux, a visiblement bien appris des errements stratégiques israéliens de la dernière décennie. Et il a quelque chose de Napoléonien, il vient de le démontrer.

Source : PUG