Yves Lusson. Ces Français qui tombent le masque

Ils n’étaient qu’une poignée de personnes à se réunir samedi 29 août, à Paris, Place de la Nation, pour se dresser contre l’obligation généralisée du port du masque et la gestion de la crise par le gouvernement.  

Reportage d’Yves Lusson, journaliste et intervenant en Thérapie sociale TST   

Arti

« Ici, il n’y a que des gens à cœur ouvert ». Arti, retraité d’origine arménienne, revient me parler après que nous ayons fait connaissance sur le chemin de la Place de la Nation. Arborant autour du cou le texte de loi interdisant de dissimuler son visage dans l’espace public, sur fond d’une Marianne bleue République, il a le verbe et le regard francs de ceux qui ne s’en laissent pas conter. « Tout à l’heure, au café, le patron s’est moqué de moi quand je lui ai montré la loi. Mais ça a créé du débat, et tous les gens du café ont fini par me soutenir. Le patron a eu honte. »

Arti

Ce samedi 29 août à 13h, animés par un impérieux besoin de sortir de leur isolement, de se rencontrer, de se parler, une poignée de Français (250 selon la police) s’agglutinent contre le Triomphe de la République, le célèbre monument en bronze créé par Jules Dalou, qui met en scène Marianne debout sur un char tiré par deux lions, symbole de la force populaire, conduit par le génie de la Liberté éclairant la route.

La force des symboles, c’est ce qui demeure pour les aider à rester debout face aux vents contraires de la culpabilisation, des injures, de la manipulation médiatique, du contrôle politique de la pensée. Ce ne sont pas des Gilets jaunes, ni des militants politiques, ni des manifestants professionnels qui viennent crier non à « la dictature sanitaire menée depuis le début de la crise et en dépit du bon sens », ce sont des gens venus de tous milieux et de tous âges, pour qui c’est souvent la première manif. Seuls ou accompagnés de proches ou d’amis, de frères d’armes, ils ne sont pas là par hasard. Chacun a son histoire à raconter.

Pascale

Pascale a failli perdre son mari en avril. Entré en urgence à l’hôpital d’Eaubonne, l’état de l’homme de 48 ans ne cesse de s’aggraver, quand une soignante appelle Pascale pour lui faire un demande sidérante : « Elle me dit de revenir le chercher, se remémore-t-elle. J’étais dans une angoisse terrible. A l’époque, on avait interdit aux médecins de prescrire l’Azithromycine, l’antibiotique qui pourtant est utilisé depuis quarante ans pour les maladies respiratoires. Heureusement, j’avais entendu parler du professeur Raoult et de ses choix thérapeutiques. J’ai commencé à faire le tour des pharmacies, et une pharmacienne, touchée par mes pleurs, a compati et après plusieurs coups de fil à des confrères, a fini par me trouver la précieuse boîte d’antibiotiques. Deux jours plus tard mon mari était sauvé. Si je n’avais pas écouté Raoult, il serait mort ».

Pascale

Angélique

Angélique n’a pas eu cette chance. Seule, capuchon de ciré bleu ciel enfoncé sur la tête, elle va droit à l’essentiel : « Mon père de 72 ans travaillait pour une petite commune du département de la Somme. Il est mort 15 jours après le premier tour des élections municipales. Comme pour beaucoup de gens, les urgences l’avaient renvoyé chez lui, et le médecin de ville avait respecté les consignes gouvernementales : consultation par téléphone et Doliprane. Il s’est éteint dans son sommeil, devant ma mère impuissante, par insuffisance respiratoire. Si je suis ici, c’est pour défendre nos libertés, à tous, dont celle des médecins de pouvoir faire leur métier et de prescrire en leur âme et conscience. Je pense que le professeur Perronne a raison* : on aurait pu éviter beaucoup beaucoup de morts, peut-être aussi celle de mon père… Et le pire c’est qu’aujourd’hui rien ne change : on nous inflige désormais un masque qui sanitairement ne sert plus à rien maintenant que l’épidémie est terminée. »

Angélique

Fonctionnaire territoriale pour une collectivité de la région parisienne, Angélique ne veut pas donner son vrai prénom, pour ne pas être reconnue. Au moment où le cordon de policiers se resserre juste derrière elle, elle craque, et nous pleurons ensemble : « Je me doutais qu’il y aurait si peu de monde aujourd’hui… Je suis tellement déçue par mon pays… tellement déçue… » Les policiers tendent l’oreille. Je crois apercevoir des yeux rougis sous les casquettes, au-dessus des masques. Je dois rêver. Des femmes prennent Angélique dans leurs bras. Pascale brandit le mot liberté. Elle se servira du même carton bleu pour se protéger quelques instants plus tard de l’averse de pluie.

Annick

Dans ce petit périmètre encerclé par les policiers, des grappes se forment. Besoin de parler, de raconter, de partager, de chercher ensemble à comprendre. Annick, 57 ans, est venue avec sa fille. « Je suis perdue. Je sens une violence qui monte, ça me fait peur. Je veux comprendre ce qui se passe, garder mon libre-arbitre, mais c’est difficile de se faire une idée sur les réseaux sociaux, tellement les informations sont contradictoires. J’ai le sentiment de ne plus être en contact avec la réalité. Où est-ce qu’on nous emmène ? Je pense surtout à la nouvelle génération : qu’est-ce qu’ils vont devenir si on n’arrête pas de les barricader ? ».

« On nous entrave de tous côtés avec la volonté de tout nous faire accepter, reprend une autre femme. Je crains qu’on ne connaisse plus la vie d’avant, et que le masque, rendu obligatoire alors qu’il n’y a pratiquement plus de morts ni de malades graves depuis des mois, on nous oblige à le porter pendant des années. »

3 copines au masque blanc Occupy Wall Street

Trois copines sont venues de Brie-Comte-Robert, en Seine-et-Marne, avec le masque blanc rendu célèbre par les militants d’Occupy Wall Street il y a dix ans. Elles avancent une explication, non sans ironie : « Nous avons pu observer nos poules dans notre jardin. Toutes celles qui se sont faites agresser une première fois n’osent plus se défendre ensuite face aux attaques de la poule dominante. Elles se soumettent à sa violence. On a l’impression que pour nous c’est pareil ! On est en plein film de science-fiction ! »

Occupy Wall Street…

D’aucuns parlent de l’obligation généralisée de porter le masque comme d’un moyen de contrôler les gens, de les soumettre pour mieux leur faire avaler ultérieurement la pilule du vaccin obligatoire. « Les interdictions vont crescendo, jusqu’où vont-ils aller ? », s’alarme Jérôme, pour qui le terme complotisme a été inventé pour discréditer ceux qui s’écartent de la pensée officielle. « Mais la théorie du complot est la seule qui semble répondre à une logique, en l’occurence celle de nous imposer les lois liberticides au profit du monde pharmaceutique, ajoute un juriste d’entreprise. Pas besoin d’être juriste pour comprendre ça ! » Face à ces hypothèses qui flirtent avec la paranoïa, je ne me sens jamais à l’aise, mais je me dis qu’il y a de quoi se poser des questions. Nicole, la cinquantaine, qui travaille pour l’Etat (je n’en saurai pas plus) partage mon avis. D’abord méfiante en me voyant prendre des notes, elle consent à exprimer sa crainte : « Qu’on me mette un masque jusqu’à la fin de mes jours. Or ce n’est pas une vie en société que de porter continuellement un masque, c’est contre-nature. Je me dresse contre ce qui semble devenir un nouveau modèle de société. Si vous n’êtes pas du même avis que les autres, alors vous êtes un complotiste. Ce n’est pas un hasard s’il y a eu beaucoup plus de monde à la manifestation aujourd’hui à Berlin. Les Allemands ont le souvenir de ce que leur ont dit leurs parents après la période noire du nazisme, qu’il ne fallait pas se taire. Aujourd’hui, il y a encore plein de gens qui se taisent, mais ils sont très troublés. Comment s’exprimer librement quand la démocratie est à terre, quand le parlement est moribond ? »

Et puis … Christelle, et “le hublot en carton”

Et Christelle est arrivée. Avec son masque de Zorro, cette énergique parisienne n’a pas froid aux yeux pour parler devant les caméras de télévision. Entre les trombes de pluie, nous sommes saisis par l’incongruité d’une photo qu’elle nous montre – ainsi qu’aux policiers ! – dans son téléphone. « Voilà comment ma fille ne verra jamais ses camarades de 5ème à la rentrée ! Ça se passe au collège Saint-Germain de Charonne, Paris 20ème. Une séparation en carton, avec un minuscule hublot comme pour en souligner le ridicule. Zéro communication ! » C’est tellement gros, la photo de Christelle, que ça ressemble à une farce. Sourires jaunes.

Le hublot pour les élèves du Collège Saint-Germain de Charonne, Paris 20ème
Christelle-Zorro

Tant qu’il y aura des Christelle qui surgiront dans le paysage, je me dis que la démocratie, la liberté et la fraternité ont encore de beaux jours devant elles. Le village d’Astérix qu’est la France n’a pas dit son dernier mot.

*Chef du Service Infectiologie de l’hôpital Raymond-Poincaré de Garches et auteur de “Y a-t-il eu une erreur qu’ils n’ont pas commise” aux éditions Albin Michel, le Professeur Christian Perronne a déclaré mi-juin 2020 : « On a eu 30 000 morts en France, j’ai honte pour notre pays. Sur les 30 000, on aurait pu en éviter 20 000, voire 25 000. »

© Yves Lusson       

Yves Lusson

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