Les troublantes défaillances de l’Unité 8200 le jour du 7 octobre. Par Frédéric Sroussi

L’unité 8200 est chargée de décoder et analyser les informations obtenues par le service de renseignement. IDF Spokesperson’s Unit

Une révélation qui fait froid dans le dos et dont on a peu parlé : « Un système technologique central de l’unité du renseignement israélien 8200 est tombé en panne la veille du 7 octobre », selon une enquête de la chaîne 12 israélienne diffusée en juin 2024 et relayée par le site « I24News » : « À en croire les experts, il ne fait aucun doute que le fonctionnement optimal de ce système aurait changé la donne concernant la récolte d’informations, et permis de sonner l’alerte plus tôt face au Hamas ».

L’article se poursuit ainsi : « Le 6 octobre à 23h, environ sept heures et demi avant l’attaque, un dysfonctionnement s’est produit dans le système, empêchant la récolte d’informations. Des soldats spécialisés dans la maintenance et la réparation de ce genre de systèmes ont aussitôt été appelés, mais ne sont arrivés sur place que vers trois heures du matin. Le système n’a donc été remis en état de marche que vers cinq heures du matin, et le temps que des informations en temps réel soient à nouveau recueillies, l’attaque du Hamas avait déjà commencé.  

L’ex-chef du renseignement militaire ainsi que le chef du Shin Bet et le chef d’état-major de Tsahal ont été informés de ce dysfonctionnement dans le contexte des enquêtes internes liées au massacre du 7 octobre. D’anciens experts du renseignement ont réagi à cette information en affirmant que si ce système avait fonctionné de manière optimale le 6 octobre, des renseignements cruciaux auraient pu être récoltés quant à l’imminence de l’offensive du Hamas. 

On sait notamment que quelques heures avant l’attaque, les terroristes avaient activé des cartes Sim sur leurs téléphones afin de pouvoir téléphoner en Israël. L’information avait fait grand bruit, les spécialistes s’étonnant qu’une activation simultanée de centaines de cartes Sim n’ait pas été repérée par le renseignement israélien ». (I24News, 15 juin 2024)   

Une panne d’un système de renseignements essentiel à la détection de l’arrivée de terroristes en provenance de Gaza survenant le 6 octobre au soir ! Étrange coïncidence pour le moins ! 

Je rappelle que l’unité d’élite 8200 est l’équivalent de la NSA américaine et qu’elle est internationalement reconnue comme son égale en termes d’efficacité (mais pas de moyens). 

Mais, avant la date fatidique du 7 octobre 2023, cette unité avait déjà fait parler d’elle en prenant des positions politiques en violation totale du devoir de neutralité inhérent à la fonction militaire.

En effet, en février 2023, le média israélien Walla publiait une tribune stupéfiante dans laquelle des réservistes de l’Unité 8200 menaçaient le gouvernement de refuser d’accomplir leur période de réserve obligatoire si ce dernier persévérait dans sa volonté de réformer la Cour suprême du pays. La finalité de cette réforme étant de limiter les pouvoirs exorbitants de cette institution non démocratique. La gauche dans son ensemble, mais aussi le Président des États-Unis de l’époque Joe Biden (!) firent pression sur Benyamin Netanyahou et ses ministres pour que ces derniers annulent cette décision. Les partis de gauche, des associations, des ONG et des grands patrons déclenchèrent pour les uns, et soutinrent pour les autres des manifestations et des troubles dans tout le pays afin de préserver par tous les moyens les privilèges de cette institution, bastion des intérêts idéologiques et économiques de la gauche caviar israélienne. Cette dernière a réussi à faire croire que si la réforme judiciaire passait, il en serait fini de la démocratie. Pourtant le but de cette réforme est justement de remettre le parlement, donc le peuple souverain, au cœur des grandes décisions concernant l’avenir du pays. D’ailleurs, en 2006, le théoricien du droit, Gérard Timsit écrivait au sujet de la Cour suprême d’Israël : « […], le juge Barak, de la Cour suprême d’Israël, considère (…) qu »il n’est aucune question – qu’elle soit politique ou non – qui, par essence, pourrait être considérée comme injusticiable’. Les cours suprêmes des pays démocratiques n’adoptent pas une position aussi absolue ».  ¹  

On le voit, la Cour suprême d’Israël, par son absolutisme, s’est mise en marge des plus hautes autorités judiciaires des pays démocratiques.  

Le combat fit donc rage dans tout le pays au sujet de cette réforme et de plus en plus d’officiers, de quasiment tous les corps d’armée, décidèrent de ne plus participer à leurs périodes de réserve, affaiblissant ainsi très sensiblement la sécurité d’Israël. Ce mouvement factieux, ce putsch, s’interrompit officiellement un certain 7 octobre 2023…, mais le mal était fait.

« Ils n’ont rien appris, ni rien oublié ! », disait Talleyrand

Aujourd’hui la guerre n’est toujours pas terminée et des militaires de réserve recommencent déjà à se révolter contre le gouvernement Netanyahou en signant des pétitions et des tribunes appelant à cesser la guerre et donc à laisser gagner le Hamas ! « Ils n’ont rien appris, ni rien oublié ! », disait Talleyrand.  

Le combat contre la réforme de la Cour suprême continue, malgré les 1200 morts du 7 octobre, malgré les 840 soldats tombés au combat et malgré les otages dont le sort est odieusement et cyniquement instrumentalisé par la gauche ! D’ailleurs, en janvier 2025, un adversaire affiché de la droite devint le nouveau président de la Cour suprême, il s’agit du juge Yitzhak Amit, qui fut, accrochez-vous bien, officier dans … l’Unité 8200.

Mais, ce n’est pas tout !  Une information parue dans « Times of Israël » en novembre 2023 révélait que « L’unité de renseignement militaire 8200 (SIGINT) n’était pas opérationnelle le matin fatidique du 7 octobre près de la frontière de Gaza », mais cette fois-ci pas à cause de la «panne» citée plus haut mais à cause d’une décision prise par un général, deux ans auparavant, de réduire le personnel et de suspendre les opérations pendant la nuit et les week-ends […]. Cette décision, dont les détails ont été révélés par la chaîne publique « Kan », « a privé l’armée d’un outil essentiel pour les écoutes téléphoniques et le décryptage de codes, et semble avoir largement contribué à la confusion et au chaos qui ont empêché l’armée de réagir efficacement à l’attaque terroriste du mois dernie ». (Times of Israel, le 28 novembre 2023)

Il existe donc un problème gravissime qui entache la crédibilité et l’efficacité de cette unité pourtant si essentielle à la protection du pays. Espérons que le nouveau chef d’état-major de Tsahal, le général Eyal Zamir, fera enfin le ménage dans les rangs de cette unité et dans l’armée israélienne dans sa globalité. 

¹  Pour une théorie des  » cas extrêmes  » ; aux limites du pouvoir juridictionnel

© Frédéric Sroussi 

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2 Comments

  1. Non M. Sroussi, la Cour suprême d’Israël ne s’est pas mise en marge des plus hautes autorités judiciaires des pays démocratiques. L’Etat de droit, faut-il vous le rappeler, est caractérisé par une stricte séparation des pouvoirs entre le législatif, l’exécutif et le judiciaire. Or Netanyahu n’a de cesse d’interférer dans le pouvoir judiciaire pour mieux le contrôler. Il n’est pas le seul. Cette volonté d’interférence caractérise tous les gouvernants attirés par l’autoritarisme, comme son grand ami Orban, pour ne citer que lui.

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