“Les délires de Jean-Luc Mélenchon et de ses soutiens”. Courrier à l’adresse de Mme la Médiatrice de Radio-France envoyé le 6 mai 2024 par Alain Bienaimé

Illustration : Laura Acquaviva. franc-tireur.fr

Les délires de Jean-Luc Mélenchon et de ses soutiens

Courrier à l’adresse de Mme la Médiatrice de Radio-France envoyé le 6 mai 2024.

Madame la Médiatrice,

Courrier à l’attention de Mme Adèle Van Reeth, Directrice de France-Inter,

Madame la Directrice,

Que se passe-t-il sur France-Inter où la situation semble totalement échapper au contrôle de sa direction ? Cela fait deux semaines que Mme Vanhoenacker prend un malin plaisir à en remettre une couche, comme on dit trivialement, et défie ouvertement l’autorité de ses dirigeants, en permettant, d’une part, à M. Meurice de redire les propos antisémites – que j’ai du mal à qualifier de blague – pour lesquels il a été une première fois poursuivi (le classement sans suite du Parquet ne l’autorisant pas, comme il feint de le croire, à nous la resservir une deuxième fois, et pourquoi pas une troisième, une quatrième fois… car de nouvelles plaintes pourraient parfaitement être déposées à chaque fois) et d’autre part, en permettant à M. Lompret, dimanche 5 mai, de nous en fournir une navrante explication, sous les rires gras d’un public comblé par la vulgarité ahurissante de ses propos. Que ces gens cessent de parler de droit à l’outrance, de liberté d’expression, ou encore de dire publiquement, comme l’affirme Mme Vanhoenacker, narquoise : “Comme l’extrême droite a décidé de nous faire taire ce soir, on ne va tout de même pas leur laisser ce plaisir”, pour revenir en compagnie de toute son équipe sur le sexe de M. Netanyahou. Où l’on apprend incidemment, de sa bouche même, que l’extrême droite ce serait donc la direction de France-Inter. Dont acte. Comment cette même direction peut-elle laisser dire de telles énormités à l’antenne sans réagir, venant de quelqu’un qui reste une employée, fût-elle la productrice de son émission ?

J’ai l’impression que tous ces potaches ne se rendent plus bien compte de ce qu’ils disent et où ils sont à le dire, savoir sur une radio de service public. Ils se montent la tête et se croient dans un maquis à combattre le fascisme, quand ils ne sont que derrière un micro, payés par les impôts d’un État policier qu’ils honnissent. Or une radio n’est pas exactement une salle de spectacle, où l’on peut s’esclaffer entre soi sur les nazis, les juifs, et l’hygiène comparée des pénis circoncis ou non, au moyen des clichés les plus répugnants de l’antisémitisme. La scène dont je parle, visible sur Youtube, est absolument sidérante, comme vous pourrez en juger par vous-même, si vous ne l’avez pas déjà vue. Nous sommes bien sur France-Inter en 2024, pas sur Radio-Paris en 1943 !

Si ces propos étaient tenus par des “humoristes” d’extrême droite, il est bien sûr – et cela est fort heureux – qu’ils n’auraient jamais eu l’occasion de récidiver, comme M. Meurice et M. Lompret l’ont fait par bravade, pour le premier, ou franche bêtise, pour le second. La liberté d’expression parce qu’elle est publique ne peut pas être confondue avec la licence de dire n’importe quoi, n’importe comment. Si l’on exige une liberté d’expression qui soit sans limite ou sans forme, alors il faut rester chez soi et parler à sa plante d’appartement. France-Inter se rend-elle bien compte de la situation dans laquelle se trouve le pays pour permettre qu’on déverse, avec tant de désinvolture, de telles ordures sur la personne physique du Premier Ministre israélien, quel que soit le jugement que l’on porte sur sa politique, et à travers lui, sur tous nos concitoyens juifs, dans ce moment de crise aiguë que nous traversons ? Prétendre que les propos de M. Meurice ne sont rien au regard des morts palestiniens pour lesquels ces propos auraient été tenus n’est qu’une façon paresseuse de justifier par avance les choses les plus basses en convoquant des motifs supérieurs censés leur donner une valeur qu’elles n’ont pas. En réponse aux bombardements de Guernica, Picasso avait peint  “Guernica”. En réponse aux bombardements de Gaza, M. Guillaume Meurice, quant à lui, a répondu par une blague antisémite. On peut en conclure que Meurice n’est pas Picasso. Ou que Meurice, hélas, n’est que Meurice, c’est-à-dire une grenouille qui voudrait se faire aussi grosse que le bœuf. Et l’on connaît la triste fin qui fut la sienne. 

Je vous prie de croire, Madame la Directrice, en l’assurance de ma parfaite considération.

© Alain Bienaimé.

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5 Comments

  1. Sur le plateau de France 5, le mardi 7 mai dans l’émission C à vous, Sophia Aram a déclaré : « C’est pénible que toute une rédaction, que toute une antenne, soient réduites à une blague pourrie, parce que c’est ça qui est en train de se passer, c’est ça qu’on est en train de vivre. Quand je dis qu’on est chez les fous, on est vraiment chez les fous. On est en train de ramener tout France-Inter à cette blague pourrie. Parce que franchement, c’est ça. C’est une blague pourrie ! (…) Nazifier un juif, c’est pourri. Le répéter, c’est pourri ! Il y a d’autres moyens de dire que Netanyahou est une ordure. On sait que c’est une ordure. Il y avait d’autres moyens que de le ramener à sa judéité. (…) Il [Guillaume Meurice] le sait, on lui a dit, il l’a répété, voilà maintenant on en est là. Toute l’antenne de France Inter est mobilisée. Je suis là pour parler de mon Molière, [et] on me parle de Meurice… Dans la manif [contre] l’antisémitisme, il y avait des panneaux qui dénonçaient l’antisémitisme de France-Inter, on en est là à cause d’une blague pourrie. » Et Sophia Aram de conclure au sujet de la liberté d’expression : « Il [Guillaume Meurice] est libre de l[a] faire, mais ça reste une blague pourrie. (…) Et qu’il est aussi de sa responsabilité de considérer qu’aujourd’hui, parce qu’il a fait cette blague pourrie, toute l’antenne est associée à [elle]. Il nous a emmenés là. »
    Cette déclaration courageuse est tout à l’honneur de celle qui la tient publiquement. Du côté de l’extrême gauche, on peut supposer que son sort est scellé. Elle appartient désormais et à jamais à la maison Bolloré. Il faut se féliciter qu’il y ait encore sur France-Inter des gens capables de faire preuve de lucidité et qui, en toute conscience, refusent l’esprit de corps ou la défense d’une liberté d’expression dévoyée, en s’interdisant de rejoindre la meute des chiens fous de la bande à Charline, lâchés sur les juifs de notre pays. A la direction de Radio-France de prendre de toute urgence les mesures qui s’imposent pour mettre fin à cette invraisemblable dérive, sans précédent depuis les années d’occupation.

    • Ce n’est pas une déclaration courageuse mais la volonté de nier le racisme et l’antisémitisme structurel des médias du service public. Sophia Aram (qui traite Netanyahu “d’ordure”) essaie de noyer le poisson : c’est tout sauf courageux.

  2. Chère Judith,

    Je serais plus nuancé que vous sur ce point et peut-être moins sévère. Il y a deux choses à distinguer dans les propos de Sophia Aram : une opinion politique sur Netanyahou, qu’elle a le droit d’exprimer et que je ne partage en rien, ni sur le fond ni sur la forme (“ordure” n’est pas une catégorie politique, c’est encore une insulte, mais qu’on ne peut pas exactement qualifier d’antisémite, vous en conviendrez avec moi). Par contre ses propos montrent que tout le monde ne se laisse pas emporter comme un seul homme – ou une seule femme -, par la dérive antisémite de Radio-France au sein même de Radio-France, dérive que l’on est très nombreux à dénoncer depuis un certain temps. C’est sans doute une bien maigre consolation, j’en conviens avec vous, mais devant les clairons de l’extrême gauche qui sonnent le rassemblement des troupes pour résister aux armées bolloriennes venus faire le siège de la “maison ronde”, dire qu’on refuse le combat et dénoncer ceux qui forcent à l’enrôlement, relève quand même d’un certain courage qu’il faut souligner. Je le mets au crédit de l’intéressée, d’autant que, personnellement, je ne m’attendais pas, connaissant un peu Mme Aram, à ce qu’elle puisse tenir de tels propos. Certes, ma surprise est peut-être la cause qui fait que je surestime un peu sa prise de position. Mais dire qu’elle noierait le poisson, comme vous le faites, c’est lui faire trop vite un procès d’intention. Devant l’aveuglement et l’intolérance de ces petits Torquemada, qui officient sur le service public en qualité de commissaires politiques, ce zeste de scrupule est appréciable. Mais attendons de voir la suite…

    Ce à quoi on assiste sur France-Inter n’est rien face à la montée mondiale d’un antisémitisme de gauche qui s’étend partout, en Europe comme aux États-Unis, à Science Po comme à Columbia. Pour ne rien dire du monde musulman où il ne se discute même pas (il ne risque donc pas de monter !), et où les rares qui le tentent, le font au péril de leur vie. Cet antisémitisme virulent actuel est à l’intersection de trois idéologies toutes hostiles, à des degrés divers, au judaïsme et aux Juifs : les droits de l’homme post-modernes, fondés sur le triomphe du subjectivisme (croisement du droit naturel gréco-latin et du volontarisme de l’idéalisme allemand (Fichte)), la théorie de la domination bourdivine (qui à gauche a remplacé, pour le pire, le marxisme, substituant la lutte des races à la lutte des classes), enfin la théologie de la libération et plus généralement l’anti-judaïsme chrétien (car le judéo-christianisme n’existe pas), expression idéologique profonde de toutes les institutions internationales dans leur vocation “catholique” c’est-à-dire “universelle”.

    Pour conclure, ce qui s’annonce concernant Israël est terrifiant, et nous ne sommes sans doute qu’au début de l’horreur. Cela, d’abord, parce que sur le plan des idées, la guerre idéologique a peut-être déjà été perdue, celle-là même dont Gramsci soulignait toute l’importance dans les guerres ou les luttes révolutionnaires que l’on mène. Qu’au moins la guerre militaire, elle, ne le soit pas. Il y va de la survie d’Israël qui doit combattre, sur le terrain, des ennemis qui veulent sa destruction totale. Face à une telle situation, tendre la joue gauche ou pardonner, ce serait disparaître nécessairement. Le talion répond à une autre logique qui n’est pas celle, chrétienne, de l’amour et du pardon mais celle, juive, de la justice. La seule qui puisse empêcher Israël de périr une nouvelle fois et qui doit inspirer aussi sa conduite effective sur un plan strictement géopolitique. Et ce juste talion, souvent diabolisé le marcionisme d’atmosphère de notre époque, était déjà la loi que s’était donnée l’Empire romain, inventeur du droit du même nom, bien avant qu’il ne devienne (hélas ?) la sainte Église catholique et romaine, bref l’heureuse époque où Rome était encore dans Rome.

    A vous, très cordialement

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