“El Babour”, à Nazareth, est le meilleur restaurant arabe du pays.
Le patron Hussein Abbas nous invite dans les vastes cuisines aux plafonds voûtés.
Le restaurant occupe une vieille maison turque.
Il taille l’agneau, les oignons. Malaxe le tout à la main en ajoutant épices, zaatar et fenouil.
Il goûte la viande crue pour s’assurer de sa fraîcheur.
“Ici, on ne sert pas shawarma ou falafel/frites ! On fait de la gastronomie ! Nos recettes sont ancestrales”.
Sa grande fierté: d’avoir parmi ses meilleurs clients des ashkénazes: “Ils supportent mal le piment !”
Il a construit un empire avec plusieurs restaurants dans le pays et une grande épicerie qui vend les épices et les légumes nécessaires pour cuisiner ses plats.
Il nous montre d’ailleurs un curieux fruit / légume issu de la recherche agronomique israélienne. Un hybride entre un petit melon et un concombre: “C’est la star ici, ça donne beaucoup de goût aux plats”.
…
Qu’est-ce qu’il pense de la situation des Arabes en Israël.
“Il y a des hauts et des bas. Tout dépend de la situation sécuritaire.
À chaque attentat, les juifs viennent moins nombreux chez nous.
Mais je ne me plains pas, les affaires marchent bien”.
En Europe, certains parlent d’apartheid.
Hussein acquiesce.
“C’est vrai ! Regardez l’émission Top Chef, pas un seul arabe dans le jury. Sinon mon fils aurait gagné sans problème cette année”.
Son fils l’interrompt.
“Arrête de parler politique Abba ! C’est mauvais pour ta santé”.
…
Tous les deux jours Hussein Abbas va à l’hôpital pour sa dialyse. Son diabète s’est compliqué depuis quelques années.
Assis confortablement dans un fauteuil, entouré de câbles et de tubulures, il a le temps de refaire le monde avec son médecin, le Dr Goldberg.
La fenêtre est ouverte et donne sur un jardin avec un olivier majestueux.
“Doktor, cet arbre est vieux de 700 ans. C’est lui le véritable propriétaire de cette terre”.
Le Dr Goldberg caresse le bras de Hussein et règle le débit de la perfusion. Il est d’accord.
© Daniel Sarfati
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