Hommage. Christian Boltanski. “Peut-on être Juif sans croire en Dieu”

L’artiste plasticien Christian Boltanski, Photographe, sculpteur et cinéaste, rendu célèbre par ses installations où se mêlent angoisses, émotions et souvenirs et reconnu comme l’un des principaux artistes contemporains français, est mort hier, mercredi 14 juillet.

Autodidacte, le plasticien et photographe, marqué dans son enfance par la Shoah, a travaillé toute sa vie sur l’absence, la disparition et l’inquiétude universelle face à la mort, luttant contre l’oubli et la disparition par des œuvres mêlant objets hétéroclites, vidéos, photographies et installations.

Ce fils d’un médecin juif converti d’origine ukrainienne et d’une Corse catholique se considérait comme un artisan de la mémoire.

A son sujet, Delphine Horvilleur raconte : En 2018, il avait demandé à me parler pour savoir si l’on pouvait être juif sans croire en Dieu. La conversation ne s’était plus interrompue. Ce soir, je pleure l’absence de celui qui savait la rendre visible. Je ne sais toujours pas si Boltanski croyait en Dieu… mais si Dieu existe, il croyait forcément en Boltanski.

Son père, médecin d’ascendance juive, a passé la période de l’Occupation nazie dissimulé dans une cache aménagée dans l’appartement familial.

Il abandonne la peinture pour une autre manière de s’exprimer montrée dans sa première exposition personnelle, en mai 1968 : La Vie impossible de C. B. faite d’ installations, de poupées grandeur nature, de films, dévoilant déjà ce qui sera un des principes essentiels de son œuvre : l’omniprésence de l’autobiographie. Son premier livre, en 1969, se nommera Recherche et représentation de tout ce qui reste de mon enfance, 1944-1950, quête vouée à l’échec si l’on en croit les Dix portraits photographiques de Christian Boltanski qui réunissent en 1972 des images d’enfants inconnus rangées par ordre d’âge probable.

Toute son œuvre parlera d’indices d’un passé ou d’un présent tout aussi incertains, de présence et d’absence, mémoire et oubli, le plus souvent via des images photographiques prises dans des albums de famille, récupérées par accident, demandées à des archives ou encore trouvées dans la presse aux pages nécrologiques ou à celles des faits divers. L’artiste les rehausse de pastel, y ajoute des légendes et constitue des collections par types sociaux, dates ou lieux. Il rassemblera en 1994 dans Menschlich 1 200 d’entre elles en noir et blanc : des enfants de la fête de Pourim s’y trouvent à proximité d’officiers nazis, illustrant l’espèce humaine vue par Boltanski, les victimes avec les bourreaux.

Des photos, mais encore des amas de vêtements usagés suspendus ou répandus au sol, des meubles récupérés, des choses ordinaires où affleurent des allusions au désastre auquel son père échappa, la Shoah : Nommer Canada en 1988 ou Le Lac des morts en 1990 renvoient à la gestion des victimes par les nazis dans les camps d’extermination.

Des livres aussi : Sans-Souci, en 1991, réunira des portraits de famille de nazis ordinaires et heureux, et Signal  sera consacré à la propagande du IIIe Reich.

Sarah Cattan

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