Maxime Tandonnet. Libre: Les Sentinelles de la République. Jean-Victor Roux

Cet ouvrage de M. Jean-Victor Roux aborde l’histoire politique française sous un angle inhabituel, celui des maires charismatiques de grandes villes, ou barons locaux depuis la Libération, qui ont joué un rôle fondamental dans la reconstruction et l’œuvre de développement économique et social de la France.

L’auteur souligne opportunément que l’actuel chef de l’Etat, le président Macron, est le premier de la Ve République (et sans doute des deux précédentes) à n’avoir jamais exercé un mandat d’élu local. La disparition de ces grandes figures, comme les piliers de la République, se rattache inexorablement au phénomène de fuite de la politique dans la communication et les chimères au détriment de l’ancrage dans la réalité.

Ces grands seigneurs de la politique locale ont aussi tous œuvré au développement  de leur ville qui était leur véritable passion: Gaston Deferre, le Marseillais d’adoption, à l’origine des plages du Prado, du métro et du campus de Luminy; Jacques Chaban Delmas l’ambitieux maire de Bordeaux qui développe une politique avant-gardiste en  matière culturelle (festival Sigma); Pierre Mauroy, ou « Rougeot de Lille », qui ambitionne de faire de Lille la capitale de l’Europe du Nord par une politique sociale et architecturale volontariste; Jacques Médecin, le sulfureux niçois, et ses réalisations notamment l’extension de l’aéroport; Jacques Chirac, maire de Paris et la création du SAMU social; Georges Frêche, le dernier des grands maires, agrégé d’histoire, célèbre pour son franc parler, ses provocations explosives, qui lui valurent l’exclusion du parti socialiste, mais qui a complètement transformé la ville, à l’image du quartier Antigone.

Certes les barons locaux avaient d’immenses défauts. Certains ont utilisé leur mandat à des fins de carrière nationale, tels Chaban Delmas, Premier ministre (1969-1972), Pierre Mauroy, Premier ministre (1981-1984), Jacques Chirac, Premier ministre (1986-1988), et Président de la République (1995-2007). D’autres se sont diabolisés comme Jacques Médecin accusé de détournement de fonds qui a fui la justice en Uruguay, avant d’être condamné à une peine de prison ou comme Georges de Frêche, accusé de racisme par ses ex-amis de gauche pour avoir poussé la provocation à son paroxysme…

Doit-on regretter ces personnages de légende qui ont imprimé leur marque personnelle sur la vie de leur cité et sur celle de la Nation? Oui, à en juger par l’effroyable médiocrité de la nouvelle génération des maires de grandes villes, Lyon, Bordeaux, Marseille, sans parler de Notre-Drame de Paris, des inconnus qui se signalent par des prises de positions dont la bêtise le dispute à la méchanceté tandis que leur ville s’ébat dans la violence et la saleté.  Comme disait Montaigne, « un bien ne succède pas forcément à un mal; un mal pire encore peut lui succéder ». Nous le constatons dans nos grandes cités mais aussi sur le plan national. Merci à Jean-Victor Roux de cette éclairante galerie de portraits.

Les Sentinelles de la République. Jean-Victor Roux. Le Cerf. 2020

© Maxime Tandonnet

Haut fonctionnaire français, ancien conseiller à la Présidence de la République sur les questions relatives à l’immigration, l’intégration des populations d’origine étrangère, ainsi que les sujets relatifs au ministère de l’Intérieur, Maxime Tandonnet, contributeur régulier du FigaroVox, a notamment publié André Tardieu. L’incompris (Perrin, 2019).

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