Yves Lusson. Pourquoi j’aspire à une immunisation sociale

Nid et Nous. Sophie Vaupré

La distanciation sociale promue et instaurée par le pouvoir constitue à terme un remède pire que le mal. En nous plongeant durablement dans le stress et la dépression, nos isolements tuent à petits feux les êtres sociaux que nous sommes. Il est plus que temps de réagir.   

Je ne sais pas vous, mais moi cette crise sanitaire (qui est bien plus qu’une crise sanitaire) je la sens à travers tout mon être, au travers de mon âme, de mon esprit, de mon corps. Et Dieu que ça fait mal. Ce n’est pas un signe de bonne santé mentale que d’être bien adapté à un monde malade, nous ont prévenus en leur temps le philosophe indien Krishnamurti, le psychanalyste américain d’origine allemande Erich Fromm, et aujourd’hui l’inventeur français de la thérapie sociale, Charles Rojzman. 

Ma formation à la Thérapie sociale TST m’aide heureusement à mieux cerner les violences sociales qui poussent chacun d’entre nous dans ses failles et nous privent des garde-fous qu’une société et ses institutions saines devraient pouvoir nous assurer.

J’ai envie de mentionner ici l’une de nos folies collectives qui contribue grandement à nous maintenir inconsciemment sous l’éteignoir : notre croyance culturellement partagée en cette part d’individualisme narcissique savamment entretenue par les avidités de la société marchande – et ses lieutenants politiques et médiatiques – selon laquelle chacun n’aurait définitivement « besoin de personne » (en Harley-Davidson !).

C’est ainsi que la notion – et les mesures gouvernementales qui l’accompagnent – de distanciation sociale née au début de la crise du Covid n’ont fait ciller personne ou presque. C’est ainsi que nous aurions oublié que l’être humain est un ETRE  SOCIAL par essence, qu’il a un besoin vital de faire partie intégrante d’un corps social pour pouvoir demeurer dans sa part de sérénité, de confiance, pour pouvoir s’épanouir, sans quoi à terme il dépérit dangereusement. M’obliger à me couper durablement des autres et du monde, c’est me plonger dans le stress du bébé vulnérable que je fus (et que je suis encore quelque part), terrifié par l’abandon, c’est m’enlever le sentiment profond que ma vie a un sens.

Malades d’être coupés des autres

Toutes ces brisures m’affolent et me stressent, toute cette fragmentation que je ressens au plus profond de moi-même, je n’en peux plus, je n’en veux plus. Je refuse cette assignation à solo-résidence, à rester enfermé tout seul pendant des jours et des semaines sans voir personne – non, ni le téléphone, ni les réseaux sociaux ni Zoom ne me suffisent avec le temps -, sans plus pouvoir vivre et travailler au vrai contact des gens, sans plus pouvoir échanger avec eux ni regards, ni poignées de main et accolades, ni sourires, ni mots qui touchent, librement, ici et maintenant, où je veux, quand je veux, avec qui je veux. Les mois passants, je souffre de ne plus être relié charnellement à la communauté des Hommes, en sentir la bienfaisante vibration, être reconnu, sécurisé, plongé dans la réalité du monde. La présence d’un coronavirus qui entraîne aujourd’hui la mort de 0,5% des personnes atteintes (0,1% à l’IHU de Marseille) justifie-t-elle toutes ces violences exercées par le pouvoir sur notre corps social ?

Un tel virus ne fait de dégâts que sur un terrain fragile. C’est une folie que de continuer à fragiliser le terrain, en l’occurence nos systèmes immunitaires. De nombreuses recherches scientifiques ont en effet montré le lien ténu qui existe entre la santé de nos défenses naturelles face aux virus et la santé de nos vies psychiques et sociales. Une récente étude publiée par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) – rendue publique le 5 mars 2020 (1), soit dix jours avant le Grand confinement – relate les travaux en ce sens d’une équipe française. Celle-ci démontre comment, biologiquement, en cas d’infection, le stress est clairement associé à l’affaiblissement de notre système de défenses immunitaires. De leur côté, des équipes de scientifiques canadiens ont affirmé dans le Huffington Post (2) que « c’est l’isolement social qui pourrait être, en bout de ligne, une plus grande menace que le coronavirus pour notre survie et notre longévité. » Deux chercheurs de l’Université Mc Gill de Montréal ont démontré que ceux qui s’isolent volontairement – par exemple en se soumettant à des mesures gouvernementales NDLR – voient leur système immunitaire directement affecté, ce qui les rend moins résistants aux maladies. A contrario, le retissage des liens sociaux stimule la libération des globules blancs du système immunitaire inné, dont la fonction principale est de détruire les bactéries et les virus nuisibles.

D’autres études, enfin, montrent les corrélations évidentes entre la dépression, la perte de liens sociaux et les pertes de nos défenses immunitaires. Aveuglés par notre croyance en l’indépendance sociale des individus, nous nous entraînons mutuellement dans une spirale négative : + de distanciation = + d’affaiblissement immunitaire = + de cas Covid graves, et ainsi de suite…

Nous ne sommes pas de la “chair à labos

Bien sûr, il y a la réponse médicale. Mais doit-on croire les yeux fermés en l’efficacité d’un vaccin développé en seulement un an (au lieu de dix généralement) et qui d’ores et déjà ne semble pas répondre – au même titre que les vaccins controversés contre les virus mutants de la grippe – à ce qu’on devrait attendre de lui, à savoir une pleine efficacité auprès des plus fragiles, un temps d’immunité illimité, voire un minimum d’immunité collective ? Et quid de la maîtrise des effets secondaires à long terme d’une thérapie génique nouvelle et inconnue ? Dans ce domaine, je crois plutôt aux bénéfices des traitements qui font leurs preuves, comme le « protocole Raoult », l’ivermectine (très prometteuse et déjà utilisée dans plusieurs pays y compris en prophylaxie), le zinc, la vitamine D, etc., qui littéralement sauvent de nombreuses vies. Je crois en la liberté redonnée aux médecins de soigner et de prescrire en leur âme et conscience. Ne dit-on pas que le soin et l’accompagnement humain des malades représentent la moitié de leurs chances de guérison ? Nous en sommes tous témoins impuissants, la médecine d’aujourd’hui – et ses combats de chapelles – a une fâcheuse tendance à se perdre dans une course folle aux médicaments et aux vaccins en oubliant sa dimension humaine – une fuite en avant commercialement juteuse qui ferait de nous de la « chair à labos » comme jadis les soldats des grandes guerres furent qualifiés de chair à canons.

Il est temps de prendre du recul et de remettre souverainement la main sur notre destin. Il est temps d’aller par-delà cette médecine qui se perd, et de faire en sorte de pouvoir oeuvrer à renforcer une « immunité sociale » qui nous protégerait tous et mieux, aussi bien des virus naturels que des virus de nos folies collectives. Il est temps de chercher ensemble comment transformer la spirale négative en spirale positive, et de mettre des chantiers de « rénovation humaine et sociale » (voir article de Charles Rojzman du 10 janvier dans TJ (3)) au cœur de nos programmes politiques.

 (1) https://presse.inserm.fr/quand-le-stress-affaiblit-les-defenses-immunitaires/38527/?amp=1

(2) https://quebec.huffingtonpost.ca/amp/entry/isolement-covid-19_qc_5f2bffc5c5b6e96a22aecf88/

(3) https://www.tribunejuive.info/2021/01/10/charles-rojzman-sommes-nous-devenus-fous/

© Yves Lusson

Yves Lusson est écrivain social (journaliste scientifique et intervenant en Thérapie sociale TST)

Dessin de Sophie Vaupré, artiste plasticienne

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2 Comments

  1. Des mots , des phrases … et si on les prenait au sérieux bcp plus de victimes , bcp trop de malades , les hôpitaux saturés et la mortalité qui a augmenté de 9 % ( 70.000 morts de plus à cause du virus …
    si on écoute le refrain de l’homme animal social et qu’on ne prenne plus aucune mesure après combien de morts supplémentaires on devra revenir à la raison ?

  2. “Distanciation sociale”

    “Je refuse cette assignation à solo-résidence, à rester enfermé tout seul pendant des jours et des semaines sans voir personne – non, ni le téléphone, ni les réseaux sociaux ni Zoom ne me suffisent avec le temps -, sans plus pouvoir vivre et travailler au vrai contact des gens, sans plus pouvoir échanger avec eux ni regards, ni poignées de main et accolades, ni sourires, ni mots qui touchent, librement, ici et maintenant, où je veux, quand je veux, avec qui je veux.”

    Cette “distanciation sociale” existait dejà avant le Covid pour des millions de personnes : malentendants et sourds aveugles handicapés personnes âgées vivant seules à domicile ect… Mais qui s’en souciait ? Un petit virus trés agressif a introduit dans notre société d’hypersensibles narcissiques un semblant d’égalité (tous logés à la même enseigne). Plutôt que de se lamenter en enfant gâté ne serait il pas mieux en considérant que ce virus est là pour longtemps même avec une vaccination massive ( qu’il faudra renouveler régulièrement comme c’est le cas d’autres maladies infectieuses)reflechir à proposer un mode de vie plus inclusif, plus chaleureux vis à vis de tous, mettre fin à cet entre soi vestige tribal réactivé par les réseaux sociaux entres autres ? Bref une occasion de refaire société sur un mode renouvelé sans coupure d’avec notre mode de sociabilité passée,pacifiquement,d’oeuvrer pour une Renaissance.De revoir nos comportements sociétaux notamment ceux du quotidien : avons nous besoin d’être collés comme des moutons,de s’agglutiner, se parler voire crier se mitrailler en postillionnant dans le visage de l’autre dans un élan possessif et/ou par peur du “manque” de l’autre.Profitons en pour revoir ces codes de conduite sociétaux avec pour objectif 1er le respect de l’autre : serrer la main ou prendre le temps de dire bonjour comment allez vous ect…la parole son écoute sont vecteur de sociabilité. Peut être pouvons nous nous inspirer du langage des signes des sourds et muets pour exprimer cette sociabilité. Mettons à profit cette intermède sociétal pour nous redéfinir comme être social dans tous les domaines. Les medias ont un rôle à jouer en interrogeant nos us et coutumes perturbés par ce Covid plutôt que de répéter quotidiennement les chiffres mortifères fournis par un gouvernement – et leur président- dont ce virus a révélé la totale incompétence à diriger notre pays.

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