Offices de Kippour : une amie en colère

C’est en cette sortie de Kippour, où j’aurais dû me sentir apaisée et dénuée de toute colère que je prends ici la plume.

Car comment ? comment ne pas être colère, alors que nous sommes en pleine pandémie de Coronavirus, devant le constat de l’incapacité de nos instances religieuses à se coordonner pour faire en sorte que nous puissions passer des fêtes sereinement ?

Je m’appelle Sarah, femme de 42 ans traditionaliste qui tente du mieux qu’elle peut de pratiquer la religion et qui au fur et à mesure aspire à en faire plus, sinon mieux, en tous cas pas moins. Mais force est de constater que rien n’est fait pour nous y aider.

Alors que de nombreuses synagogues ont fermé leurs portes, d’autres ont limité leur accès aux hommes ou bien encore aux plus fidèles, afin de garantir à la communauté des offices dans le respect des règles sanitaires.
Mais alors qu’en est il advenu de toutes les autres familles qui n’ont pas eu accès aux offices ???

Comment suivre un office quand on est seul, quand nos connaissances restent limitées, quand le Minyan n’est pas réuni, quand personne n’est habilité à sonner le Choffar.

Jour de l’Expiation par Isidor Kaufmann (av. 1907). – Wikipédia

Je ne suis qu’une simple traditionaliste et je me désole d’avoir du passer les fêtes sans pouvoir écouter le moindre office que rien ne m’ait été donné ou à mes parents pour pouvoir suivre un office digne de ce nom et disposer en ce Kippour si particulier des clés pour l’accomplir pleinement.

Il a été question dans une sorte de cacophonie générale que quelques prières ou chants soient diffusés sur radio J, mais étant donné que le canal FM est partagé par 3 radios juives communautaires, quelle ne fut pas notre surprise en allumant le poste (pour le laisser allumé toute la nuit afin de pouvoir écouter les offices en intégralité et pour ne pas enfreindre les règles de Kippour) d’écouter dès 19h21 les hits dansants du moment. Etait ce bien nécessaire ? Etait ce à propos ce jour là ? Quelle nécessité absolue à continuer à diffuser sur ce canal, uniquement écouté par la communauté un programme si déconnecté de l’actualité ?

Ces 3 radios ne pouvaient elles pas s’associer ? pour une fois ? et pour le jour de Kippour cela aurait il pu être un symbole fort de l’union de notre peuple pour ne diffuser d’une seul programme ? en direct ou enregistré (je laisse la décision à notre ministres officiants de trancher).
Qui aurait il eu de grave ??

Est il plus grave de rester chez soi à ne rien faire, voire peut être faire des choses assour que nous n’aurions pas commises si nous avions pu aller à la synagogue ou d’écouter une radio allumée qui nous permettra d’écouter les prières ????

De certains brandirons le fait que laisser une radio allumée c’est assour, que cela produit de l’énergie ou en nécessite. Quid alors des lumières allumées dans les synagogues pendant Kippour ou Shabbat ? quid des minuteries ? quid des ascenseurs de Shabbat en Israël ?

Désormais nous pouvons faire les kapparot par internet, la technologie a du bon finalement, pourquoi ne pas y penser pour d’autres utilisations ?
La religion est ce qu’elle est et il n’est pas question d’en remettre en cause ni le sens ni les obligations, mais nos dirigeants religieux ont le devoir d’en donner l’accès au plus grand nombre.

Est-ce normal que les initiatives n’aient été qu’individuelles ?
J’ai reçu le lien d’une vidéo zoom initiée par la communauté de Levallois que je salue afin de pouvoir à la sortie de Kippour écouter le Choffar, mais quelle ne fut pas ma déception quand je ne pu y avoir accès car plus de 100 personnes étaient déjà connectées ? Heureusement que quelques minutes après la vidéo a été diffusée sur Facebook. Visiblement plus de 3000 personnes (soit 3000 foyers) avaient essayé de se connecter. Est-ce normal de laisser autant de personnes dans le flou ?

Le shamash souffle dans le shofar à la fin de Yom Kippour à la synagogue Ohel Moed Sephardi à Tel Aviv, 1960 ( Wikipédia )

Comment se fait-il qu’en 2020, à l’heure du numérique, aucune coordination n’ait été mise en place pour assurer aux membres de la communauté un semblant d’office religieux afin que tout un chacun puisse le suivre dans le respect de la Halakha ? Ne serait ce qu’une sonnerie du Choffar unique et diffusée sur une seule et même page facebook dont l’ adresse aurait été diffusée au plus grand nombre ?

Alors qu’on nous assène à longueur de journée qu’il est important d’accomplir telle ou telle mitsva, les autorités religieuses, ainsi que notre consistoire n’auraient ils pas eu mieux à faire que de nous donner les clés d’une pratique de la religion si ce n’est assouplie, tout du moins facilitée en ces temps de crise ?

Il ne suffit pas de brandir la menace d’une punition divine si nous n’accomplissons pas telle ou telle mitsva pour donner l’envie ou convaincre les gens de faire la religion.

Une religion qui évolue avec son temps n’est pas une religion qui se perd,
au contraire, le temps actuel est celui de la communication, des médias et de la technologie. Plutôt que de les ériger en arme du mal et de la perdition, n’est-il pas temps d’y voir le moyen de permettre aux gens de pratiquer la religion ?

Je ne sais pas si les solutions digitales ou FM proposées auraient été possibles « judaïquement » parlant, mais ce que je pense c’est que rien n’a été pensé conjointement pour aider la communauté à vivre ces fêtes sereinement.

Sortie de Yom Kippour au local du Beth Loubavitch

Pourquoi ne pas avoir lancé une initiative auprès de toutes les communautés de France pour un office commun, sinon une communication commune pour permettre à la communauté de savoir la marche à suivre pendant les fêtes ?

Ne vous inquiétez pas, celui qui cette année aurait eu l’opportunité d’écouter l’office de chez lui (à la radio, sur le web ou à la télé) n’en aurait pas moins eu l’envie d’aller à la synagogue l’année prochaine.

Allez savoir, peut être que celui qui prendra l’habitude de suivre les offices d’une nouvelle manière trouvera t il demain plus de force et de croyance en la religion, qu’en se sentant rejeté parce qu’il ne fait pas telle ou telle chose, qu’il ne donne pas assez.

Je ne suis personne, mais je suis juive et à ce titre j’estime avoir le droit de donner mon avis et me permettre de vous proposer des clés ou ouvrir la voix à une discussion constructive pour qu’à l’avenir nous puissions vivre nos fêtes (si ce n’est dans les synagogues comme nous y aspirons tous) dans des conditions facilités et accessibles au plus grand nombre.

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4 Comments

  1. Madame,vous avez bien évidemment le droit de donner votre avis et de vous offusquer.
    Mon épouse qui ne sait pas lire en hébreu a lu les prières en français tandis que je les lisais en hébreu . Le déroulé étant plus rapide , nous avons parlé du sens de cette journée,de la difficulté de se sentir seul, de l’organisation face à la pandémie de nos autorités religieuses, de la foi, de la pratique… C’était mon 1er Kippour sans synagogue, sans liturgie, sans chofar . Mais la vie doit être préservée

  2. je donne entièrement raison à cette dame, moi j’étais seule a force de lire en francais et parfois en phonétique j ai plusieurs livre mes yeux me brulèrent j’ai du raccourcir “mon office” moi je me suis aidée de la radio en l’arrêtant quand la musique n’était pas appropriée et d’un CD KIPPOUR du RABBIN DARMON que je félicite j’ai aussi la HAGADA DE PESSAH là aussi c’était utile
    souhaitons nous que l’an prochain en plus d’être à JERUSALEM, le virus sera vaincu
    et que nos sages n’aient pas à prévoir une organisation pour les esseulés
    Chana Tova et Gmar Ratima Tova

  3. Il y a des synagogues qui ont fait preuve de creativite, comme la mienne a Jerusalem, Zion Kehila Eretz Israeli. Prevoyant le confinement, Rabbin et payetanim (chantres) ont enregistre a l’avance (un enorme travail mais pour le bien de la communaute), en presence de personnes de la communaute, pourqu’il y ait un minian et cela est passe sur une onde silencieuse sur internet qui se mettait en route au moment des prieres. Ainsi de nombreuses personnes ont pu suivre les prieres des 2 fetes. Merci aux bonnes volontes et a la technologie

  4. Je vis au Brésil, S paulo, la plus grande colonie du pays, environs 70 mille juifs. par hazard,j´habite dans un quartier avec une grande concentration, on a envirnos 16 synagogues proches. La plus petite, pour environs 40-50 personnes, parfois il y a des difficultés pour avoir le minian. Et a 700 mts, la plus grande, Safra, sepharade.Nous avons des rabbins orthodoxes, et ´´liberaux´´. Et j´ai pu accompanier à l´ordinateur les services religieux. Bien sur, ce n´est pas la même chose,pas de minian, on est seul ou avec sa famille. Mais c´est mieux que rien, pour la 1ere fois dans l´histoire des juifs. On attend le vaccin chinois pour decembre. Shaná Tová pour tout le monde !

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