Jacques Neuburger. Polanski, mine de rien

POLANSKI, MINE DE RIEN….

C’est chabess, on voudrait rester optimiste et lumineux, on aimerait peut-être lire ou raconter un petit quelque chose plein de tendresse ou de légèreté, une histoire de très petite fille qui fait le lapin sous la table, des propos de haute portée sur les ongles carmin d’une copine ou le massage des pieds d’une nana prête à toutes les expériences par un cambodgien jadis interrogateur de justice chez Pol Pot mais reconverti en masseur thaïlandais et herboriste tibétain, enfin du léger, du fantaisiste, du sans souci, et pan, une actualité compulsive vient cogner au carreau en appliquant sur la vitre son visage hideux de masque de carnaval flamand ou espagnol.
C’est toujours la même insolence méprisante, toujours la même façon de nous regarder de haut, comme si nous étions des minables, des minables revanchards et sans pitié. Des usuriers acculant une honnête famille à la plus extrême misère – à moins qu’on ne nous envoie pour quémander un report d’expulsion une très adroite et compréhensive, délicieuse et naïve, fraîche fleur des champs bientôt froissée entre de gros doigts gras, boudinés, bourrus, une petite jeune fille de la famille, treize ans bientôt, déjà des petits seins qui pointent sous son tablier à carreaux d’écolière, agneau du sacrifice offert au prédateur à nez crochu et grosses paluches, image d’Epinal du malheureux juif Süss dont le film faisait toujours salle comble sous Vichy: “le sam’di soir, après l’turbin, l’ouvrier parisien, dit à Titine, viens ma chérie, j’te paye le cinéma” – et hop, flirt, amour et pelle roulée dans la chaude pénombre cependant que le prédateur sexuel à gros nez et doigts crochus se balance à l’écran en sa cage de fer…

Ah, oui, on était cruels, sans pitié pour les vieillards: Barbie qu’on aurait pu laisser vieillir en paix, sans oublier le malheureux Papon, glorieux préfet de police du bon vieux temps de la guerre d’Algérie, quand on retrouvait des algériens flottant entre deux eaux aux portes des écluses.

Car cette société est noble, elle nous apprend le pardon et la pitié à nous, nous qui jadis crucifiâmes le tendre agneau sans pitié pour les larmes de sa mère. Jean XXIII est passé par là, et Vatican II, peut-être, mais les images perdurent, les réflexes de pensée, les mépris, les haines – ces haines désormais plus jamais antisémites – oh, le vilain mot – mais antisionistes, solidaires, équitables, écologiques et féministes: car on a tout changé, le Petit Larousse nous le garantit – et désormais l’antisémitisme est un délit reconnu, référencé dans la loi: on est tranquille, la loi veille.

Et puis la Loi, c’est pour nous, nous qui ne connaissons ni le pardon ni la pitié. Ah, oui, quand on a gracié Carl Oberg et Helmut Knochen, respectivement général de la SS en France et colonel SS responsable de la police allemande en France, on ne pouvait pas comprendre.

On ne pouvait pas comprendre parce que nous étions sans compassion et sans pardon: ils pouvaient bien finir leurs jours en famille, tranquillement, bien à l’aise, sans qu’on s’acharne sur eux. Enfin! Et puis, ils étaient nickel, eux, ils étaient bien propres sur eux, les mains pures, la conscience tranquille, toujours corrects. Ils n’étaient accusés d’aucun viol, d’aucun harcèlement sexuel. Rien, rien vous dis-je. Ils s’appelaient pas Polanski, en plus. Ah, vous pouvez pas comprendre, vous autres…..

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1 Comment

  1. Oui Jacques Neuburger l’écrit justement , car, mine de rien, la bête immonde , celle qui ne devait jamais revenir nous tracasser nous insulter, nous tuer, je vous le donne en mille ,elle est là, bien présente, elle se fout des lois de nos vies de notre honneur, de notre nom . comme ceux d’avant pas si longtemps que ça, je me souviens ,nos rues renommées en allemand, des croix gammées partout ; il faut se cacher , fuir pour sauver nos vies . Nous sommes le peuple élu beaucoup ne s’en sont pas sorti. nous sommes là et nous ne nous tairons pas.

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