La chronique de Pascale Davidovicz : Une mort annoncée

Quelques réflexions sur les réactions aux attentats, leur traitement dans les médias et les avertissements faits.

Les forces de l'ordre autour de la salle du Bataclan, le 13 novembre 2015.  (CHRISTIAN HARTMANN / REUTERS)
Les forces de l’ordre autour de la salle du Bataclan, le 13 novembre 2015.
(CHRISTIAN HARTMANN / REUTERS)

 

La colère.

C’est ce qui m’a frappée dans la réaction de certains intervenants sur les plateaux de télévision.
A commencer par celle de Marc Trévidic, ancien juge antiterroriste, débarqué après dix ans de bons et loyaux services.
Mâchoires serrées et l’œil noir, il dit avoir réclamé des moyens qu’il n’a pas eus, et que chacune de ses demandes d’intervention demandait quatre mois d’attente faute de moyens.
Pendant ce temps, les suspectés de terrorisme avaient disparu dans la nature.
Des années de laxisme, d’attentisme et d’angélisme quand tous les voyants étaient au rouge.
Il avait averti qu’après les attentats de janvier 2015, il y en aurait d’autres plus monstrueux.
Dès septembre dernier, il annonçait un acte terroriste dans une salle de spectacle.
Il réclamait en vain les moyens d’arrêter les terroristes revenus de Syrie dans un cadre judiciaire avec l’appui des forces armées, et de démanteler les mosquées salafistes.
« Mais on nous a laissé dépérir sans pouvoir agir. » dit-il.
Il est frustré de ne plus pouvoir apporter son expérience et ses connaissances à ses collègues.
Mais une législation imbécile du Conseil Supérieur de la Magistrature lui interdit de revenir avant deux ans !
D’ici là, il aura traité des affaires de divorce au Tribunal de Grande Instance de Lille !
J’ai dit à mon fils aîné qui travaille sur les ravitailleurs en vol de l’Armée de l’Air : « C’est comme si on te disait, tu as fait ton temps, maintenant tu vas être à l’accueil téléphonique !
Toute ton expérience et ton professionnalisme passe aux oubliettes. »
On marche sur la tête !
Dans le même ordre d’idée, mon fils m’avait appris que lorsqu’il était amené à patrouiller, il y a quelques mois en arrière, dans le cadre du Plan Vigipirate, son FAMAS (fusil d’assaut) n’était pas chargé.
Devait-il dire : « Excusez-moi monsieur le terroriste, ne bougez pas, laissez-moi le temps de charger mon arme ? »
Rassurez-vous ce n’est plus le cas, les FAMAS sont désormais armés.
De même que les policiers sont désormais autorisés à tirer et à conserver leur arme hors service, au lieu de se faire abattre sans pouvoir se défendre, ni pouvoir porter secours aux victimes.
Et oui ! Nous avons quitté le monde merveilleux des Bisounours !
J’ai appris que de nombreux courriers et messages de français ont demandé le retour du juge antiterroriste Marc Trévidic.
Il déclare être prêt à s’y remettre, être au service de la Patrie, même si, précise t-il, il en a bavé.
La colère, c’est aussi celle de Pierre Servent, journaliste et colonel réserviste, qui dit qu’il prône depuis des lustres des périodes de réserve et des armes à disposition des réservistes.
Comme beaucoup, il s’insurge contre la mise à l’écart du juge Marc Trévidic.
La colère, c’est aussi celle de Mohamed Sifaoui, journaliste et écrivain, qui dit que les mosquées doivent faire allégeance aux valeurs de la République.
Il réclame du gouvernement une vraie communication de crise, au lieu de laisser les médias s’en charger, jusqu’à laisser planer le risque d’un nouvel attentat à La Défense.
La colère, c’est aussi celle de Malek Boutih qui appelle à la fermeture  de 89 mosquées considérées comme radicales.
La colère, c’est aussi celle du docteur Bonnot, anesthésiste réanimateur, témoin du massacre sur les terrasses et qui a tenté de sauver des victimes en pratiquant du bouche à bouche.
Il dit avoir été sur des terrains de conflits et déplore amèrement qu’en France il ne dispose pas dans son cabinet de matériel pour sauver des vies.

Les « cibles molles ».

En langage d’antiterrorisme, on appelle les « cibles molles » les salles de spectacle, les écoles, les universités, les centres commerciaux, etc.
Sur les réseaux sociaux, Abou Mohammed al-Adnani, le porte-parole de l’EI, avait appelé à tuer des citoyens, le plus de français possible, y compris dans les salles de concert.
« Frappez sa tête avec une pierre, égorgez-le avec un couteau, écrasez-le avec votre voiture, jetez-le d’un lieu en hauteur, étranglez-le ou empoisonnez-le »
Le Bataclan avait reçu des menaces inquiétantes d’islamistes pro palestiniens pour avoir organisé des spectacles juifs et pour eux « sionistes », comme ceux du Magav, la Police aux frontières israélienne, d’Enrico Macias et d’un rappeur en tenue traditionnelle.
En tournée en Israël, les membres du groupe Eagles of Death Metal, présents lors de l’attentat au Bataclan, sont condamnés à mort par les islamistes palestiniens pour perversité et leurs fans pour idolâtrie.
Le groupe leur avait rétorqué : « Nous ne boycotterons pas un état comme celui là ».

La sidération.

La « sidération », les « français sidérés », ces termes sont revenus en boucle dans les médias, à croire que les français étaient sur une autre planète ces dix dernières années, voire plus.
Je rêve ou je cauchemarde ?
Pourtant, il y a un an, Hollande disait que nous étions en guerre, mais les français n’en prennent pas conscience et continuent de vivre sereinement.
Sans remonter aux attentats en Espagne en 2004 et au Royaume Uni en 2005, ni parler de ceux perpétrés dans des pays plus ou moins lointains qui n’intéressent pas grand monde, je m’étonne que l’on en revienne systématiquement au 11 janvier 2015 ?
La tuerie à Toulouse en 2012 a-t-elle disparu des écrans radar de nos chers journalistes ?
Qui parle des victimes de Montauban et de Toulouse ?
Parce qu’en 2012, ce n’était pas à Paris, ou parce que c’était des militaires et des  juifs ?
Le Grand Rabbin de France Haïm Korsia s’interroge sur la mobilisation après les attentats du 11 janvier 2015.
Certes, elle fût massive, mais « tant que cela ne nous concerne pas » pensaient les français dit-il.
Certains pensaient même que les caricaturistes de Charlie Hebdo l’avaient bien cherché, que les juifs avaient l’habitude, et que des policiers attaqués dans leurs commissariats et une policière municipale tuée, c’était le risque de leur métier.

Le revirement sécuritaire.

Les français rebellaient contre les contrôles, les fouilles et la surveillance téléphonique et sur Internet qui nuisaient à leur liberté avec un égoïsme, une insouciance et un aveuglement pathétiques.
On s’offusquait de ce que l’on considérait comme une atteinte aux droits de l’homme.
Maintenant, oubliés les cris d’orfraie, tout le monde veut bien être fouillé et écouté.
Cela dit, l’Europe n’a guère montré l’exemple.
Elle s’est faite remarquée par son inertie depuis les attentats de Madrid en 2004.
Les textes fondamentaux européens sont en attente depuis 10 ans.
L’adoption du PNR, Passenger Name Record, les données des dossiers passagers, a été systématiquement remise aux calendes grecques, comme le renforcement d’Europol et les  contrôles à l’espace Schengen.
Les USA ont plusieurs fois suggéré à la France un grand fichier de coordination comme il en existe depuis le 11 septembre 2001. Sans suite.

La taqiya.

Nous avons eu deux magnifiques exemples de taqiya, l’art de la duperie et de la dissimulation préconisée par le Coran.
Comme vous sans doute, j’assiste consternée aux déclarations que fait tranquillement à la presse le logeur des terroristes, un trentenaire qui s’appelle Jawad Bendaoud.
Les policiers se tiennent respectueusement à distance avant de se décider à lui passer les menottes.
Bien sur il prétend ne rien savoir sur ses « invités », car comme tout un chacun, il prête son appartement à des personnes qu’il ne connaît pas par bonté d’âme !
On apprendra plus tard que ce généreux hôte, qui joue les caïds dans la rue pour les « marchands de sommeil », a été condamné à 8 ans de prison pour coups et blessures ayant entraîné la mort sans l’intention de la donner en 2008.
Il avait comparu aux assises de Bobigny pour avoir mortellement poignardé son « meilleur ami » qui s’appelait David, 16 ans, le 26 décembre 2006 à St Denis pour une histoire de téléphone portable perdu.
L’avocat général avait mis l’accent sur « sa dangerosité » et les proches de la victime avaient fait part de leur crainte qu’il ne « recommence ».
Charmant garçon !
Dans la fratrie Abdeslam, Mohamed est celui qui n’est pas inquiété par la police.
Son frère Brahim s’est fait explosé au Comptoir Voltaire, et son frère Salah est activement recherché.
Même si Mohamed a un alibi pour le jour des attentats et semble ne pas être lié au terrorisme, il a menti sur son passé judiciaire.
Il déclare : « Je suis employé communal depuis dix ans, je n’ai jamais eu de problème avec qui que ce soit. Je n’ai jamais eu d’ennuis avec la justice. Nous sommes une famille ouverte qui n’a jamais eu de problème avec la justice. Mes parents sont sous le choc de la tragédie. Mes deux frères sont normaux, je n’ai jamais rien remarqué ».
Les médias belges font pourtant état d’une condamnation en 2010 pour l’affaire dite des « ambulanciers charognards ».
Des ambulanciers détroussaient les défunts, le plus souvent des personnes âgées, lors de leur transfert vers la morgue ou le funérarium.
Mohamed Abdeslam, alors âgé de 18 ans, sera condamné par défaut à une peine de deux ans de prison avec sursis.
Charmant garçon !

Deux poids, deux mesures.

Un bandeau défile sur nos écrans de télévision : « Emission enregistrée avant les attentats à Paris », mais quand c’est le tour du Mali d’être frappé par un attentat, et qu’une chanteuse malienne passe sur France 2, cela devient : « Emission enregistrée avant les évènements au Mali ».
Comme les évènements d’Algérie ?
L’ORTF est de retour ?

Morts pour la France !

C’est ce que j’entends sur Canal +.
En quoi nos concitoyens au spectacle, au stade ou sur les terrasses sont-ils morts pour la France ?
Ils sont morts parce qu’ils étaient là au mauvais moment, au mauvais endroit, fauchés par les balles des terroristes.
Ce sont les militaires et les forces de l’ordre qui meurent pour la France.
Pas un mot pour le sergent-chef Alexis Guarato, du commando parachutiste de l’air de la base aérienne d’Orléans-Bricy, qui a succombé à ses blessures après avoir sauté sur une mine antichar au Mali.

Photo Armée de l’Air
Photo Armée de l’Air

C’est le treizième militaire à mourir au Mali depuis l’engagement français.
Pascale Davidovicz
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

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