Maor Melikson, l’Israélien de Valenciennes FC

Quelle trace laisse un footballeur ?

Ça dépend du joueur. Ou du club : ici le Valenciennes FC, 18e de Ligue 1 en souffrance avant un déplacement périlleux ce soir à Monaco. Le joueur : Maor Melikson, 29 ans, élément le plus doué techniquement – et de loin – de l’effectif et qui fut, dans une autre vie, la sensation à venir d’un football israélien qui n’en finit pas de s’imaginer un avenir faute de présent.

melikson

Dans le petit monde du foot hexagonal, Melikson est apparu à la lumière le 14 septembre, jour du Yom Kippour, le Grand Pardon, où le pratiquant est tenu à un jeûne et un chômage complet. Celui-ci s’achevant après le début du match, le meneur de jeu n’est entré qu’à la 64e minute, transformant du tout au tout une partie pourtant perdue 1-3 (face à Saint-Etienne) au prix d’une astuce, puisqu’il s’était calé sur le fuseau horaire d’Israël pour jouer un peu. L’intéressé précise : «Je ne suis pas la personne la plus religieuse qui soit.» L’astuce en question disait ça, ou plutôt le souci de se concilier toutes les parties.

BETAR JÉRUSALEM

Menace. On comprendra vite qu’il est souvent question le concernant du poids du regard des autres ; Melikson l’ayant souvent perçu comme une menace. Fils d’un cadre travaillant dans le médical et d’une mère dans la banque, le natif de Yavné n’a jamais été poussé par personne : «Mes parents m’ont laissé faire, je n’ai jamais eu besoin de rien et j’ai grandi dehors. Je jouais tout le temps. Mes parents se sont contentés de me payer l’académie de foot [la formation est payante en Israël, ndlr],celle du Maccabi Yavné – pas la plus prestigieuse, pour tout dire. Mais j’ai intégré le Beitar Jérusalem à 17 ans. Un club spécial : beaucoup de pression, des fans partout dans le pays, notre Olympique de Marseille à nous. Puis, en 2006, je signe au Maccabi Haïfa. Tout le monde parlait de moi, les médias n’arrêtaient pas. Je n’ai jamais été le mec à sortir le soir, mais il a fallu comprendre certaines choses, comme le fait que tu peux perdre ta place. C’est un travail dur. En Israël, 90% des joueurs se payent des entraîneurs physiques perso.»
Un peu perdu, blessé à la voûte plantaire, Melikson aura alors une démarche délicate et rare : il signe en 2008 en deuxième division à l’Hapoël Beer Sheva, «le seul club israélien présidé par une femme», l’idée étant surtout de retrouver l’entraîneur qui s’était occupé de lui en sélection des moins de 21 ans.

WISLA CRACOVIE

Comme souvent, Melikson excelle quand il évolue à l’ombre. Mais puisqu’il excelle, il en sort : en février 2011, il est contacté par le Wisla Cracovie, dont les supporteurs affichent à chaque match un antisémitisme forcené. Quand il en parle aujourd’hui, le joueur ouvre tout grand les yeux : «On m’a expliqué que les mots des fans étaient dirigés contre l’autre club de Cracovie, le KS Cracovia, créé au début du XXe siècle par la communauté juive de la ville. Bon… Après quelques matchs, ils chantaient pour moi. Je dois dire que tant que j’étais sur le terrain, il n’y avait ni slogan antisémite ni rien. Je ne sais pas si c’est beaucoup arrivé là-bas. Sportivement, je vivais au paradis. Les joueurs polonais aiment courir, ils défendent plus qu’ils n’attaquent, ils sont disciplinés.»

ÉLÉGANT DANS TOUT

«Élégant». A Cracovie, Maor Melikson brille ainsi par contraste : fin, technique, porté par son idée du moment. Lindsay Rose, défenseur et coéquipier à Valenciennes : «Il est élégant dans tout. Le genre de mec qui ne se bat pas contre le ballon. Je n’ai pas souvent croisé un joueur comme lui, et j’ai été international espoir.» La Fédération polonaise lui propose donc d’intégrer l’équipe nationale – une ascendance suffit. Melikson est tenté, d’autant que la sélection israélienne le laisse en jachère : «Jouer l’Euro 2012 [coorganisé par la Pologne, ndlr], c’était bon pour moi.» En France, où cela arrive tous les mois, tout le monde s’en fout. En Israël, l’affaire Melikson fait scandale : c’est la première fois.

maor-melikson

Le joueur fait deux choses : il coupe son portable et laisse tomber. Rose : «On est arrivé ensemble à Valenciennes en janvier 2013. C’est un type très, très discret. Depuis peu, il s’autorise à parler sur le terrain. Pour lui, c’est un grand pas.» Un voisin de vestiaire, le défenseur uruguayen Gary Kagelmacher : «Melikson est un type absolument normal.»

equipe va fc

 On a rencontré le bonhomme au centre d’entraînement de Mont Houy : paisible, clairvoyant, un peu étonné d’être l’objet d’une interview. En repartant, on l’a recroisé à la gare avec son épouse, soit deux anonymes au visage d’ados traversant la place sans susciter un regard ; le meilleur joueur de la ville qui se confond avec les murs environnants. Son épouse fut une étudiante brillante : ingénieure informatique, elle a suivi un programme de deux années dans le renseignement militaire. Quand on l’a vue, elle semblait encore plus timide que lui.
Paru dans Libération le 20/12
 
monacopsg
Le Paris Saint-Germain (PSG) s’est assuré vendredi 20 décembre le titre honorifique de champion d’automne de la Ligue 1 sans même jouer, avec la défaite surprise de son dauphin Monaco contre Valenciennes (1-2), 18e au classement.
L’entrée en jeu en deuxième période de l’attaquant Radamel Falcao, absent pendant près d’un mois à cause d’une douleur lancinante à la cuisse, n’a pas suffi à ragaillardir les Monégasques, bloqués à la deuxième place. Les hommes de Claudio Ranieri ont réalisé une très mauvaise opération face à la 18e équipe du championnat, alors qu’ils ont dominé, ont eu de nombreuses occasions dangereuses et inscrit deux buts refusés pour hors-jeu.

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