Le Hezbollah veut retrouver le chemin de Jérusalem par Maxime Perez

Le mouvement chiite libanais mise désormais

sur un arrêt des hostilités en Syrie.

Pour mieux retrouver son ennemi juré, Israël, qu’il est fin prêt à combattre.
Le cheick Hassan Nasrallah n’a pas perdu de temps. Profitant du triomphe électoral de son parrain Bachar el Assad, réélu le 3 juin avec 88,7% des suffrages, le secrétaire général du Hezbollah vient d’appeler  l’ensemble des factions rebelles en Syrie à déposer les armes « pour cesser l’effusion de sang » et engager des négociations. « Les élections prouvent que toute solution politique en Syrie commence et se termine avec le président Bachar al-Assad », a-t-il déclaré dans une allocution télévisée, prouvant que le tango irano-syrien continuait de fonctionner à merveille.

Hassan Nasrallah
Hassan Nasrallah

Nasrallah est un fin stratège. Sa soudaine modération n’a rien d’une clairvoyance et, de toute évidence, ne sera pas entendue par les belligérants. Il n’empêche, le charismatique leader chiite transmet le message qu’il cherche à s’extirper du conflit syrien. Une guerre qui ne lui a que trop porté préjudice au Liban et dans le monde arabe. Ses combattants, dont plusieurs centaines ont déjà trouvé la mort, n’abandonneront pas demain le champ de bataille. Mais leur départ semble inéluctable dans une Syrie qui retrouvera difficilement une unité nationale et géographique, et dans laquelle les 40% de territoire sous le contrôle du régime ne semblent plus menacés.
Faut-il aussi y voir un geste d’apaisement ? Une certitude : un retrait de Syrie ne mettra pas fin à la vendetta promise au Hezbollah par les groupes sunnites radicaux, au premier rang desquels les redoutable organisations Jobat al Nosra, émanation locale d’Al Qaïda, et les djihadistes inféodés de l’EIIL (Etat islamique d’Irak et du Levant) qui jurent de faire flotter leur drapeau noir à Dahiyé, fief du Hezbollah au sud de Beyrouth. Reste que dans un Moyen-Orient embourbé dans une décennie d’instabilité, le mouvement chiite pro-iranien a d’autres cartes à abattre ou, du moins, veut préserver celle qui légitime son existence : la lutte contre Israël.
Les combattants de l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL)
Les combattants de l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL)

La troisième guerre du Liban

Ce retour aux sources est en marche. Depuis que l’une de ses bases stratégiques dans la Bekaa a été bombardée par l’aviation israélienne, le 25 février dernier, les règles du jeu ont changé. Après des années de retenue, le Hezbollah a revendiqué l’attaque d’une patrouille de Tsahal dans le secteur des fermes de Chebaa et a été vraisemblablement impliqué dans d’autres attaques à la charge explosive sur le Plateau du Golan, à la frontière israélo syrienne. Réchauffé de la sorte, le terrain apparait donc propice à une escalade.

hezbollah
Le Hezbollah

L’expérience acquise sur le sol syrien a donné au Hezbollah de nouvelles ambitions militaires. Son rôle dans les vastes offensives terrestres menées à Qousseir, Qalamoun et Yabroud, même en force d’appui, lui ont forgé de nouvelles aptitudes au combat. En somme, une maitrise des rudiments offensifs de la guérilla urbaine : assaut, prises de bâtiments stratégiques et contre-sniping. Une évolution presque contre-nature alors que le mouvement chiite, depuis sa création, avait exclusivement formé ses troupes à des techniques de harcèlement, donc défensives, contre l’armée israélienne au Sud-Liban.
Les renseignements militaires de Tsahal, dont la collecte d’information et les analyses sont indispensables avant toute planification opérationnelle, estiment que le Hezbollah est en train d’opérer un revirement tactique. Un document, publié dans le magazine militaire Marekhot (« Batailles ») et signé par un officier israélien de haut-rang – répondant à l’appellation  « N », censure oblige -, dresse plusieurs scénarios de guerre contre le Hezbollah.
Contrairement à l’été 2006, il semble acté que l’organisation du cheick Nasrallah ne se contentera pas d’une guerre d’usure contre l’arrière front israélien, à savoir de tirs nourris de roquettes et missiles contre Kyriat Shmona, Haïfa, Tel Aviv et même Beer Sheva. En quête de symboles victorieux, le « parti de Dieu » clame désormais haut et fort qu’il prépare l’invasion, au moins partielle de la Galilée.
S’inspirant de la doctrine de Tsahal, les hommes du Hezbollah entendent déplacer rapidement le combat en zone ennemi. Dès 2011, le mouvement chiite publiait une carte de la région nord d’Israël où figuraient, marquées du drapeau jaune chiite, plusieurs cibles potentielles : aérodromes militaires, stations d’écoute, kibboutz frontaliers et même les raffineries de pétrole de Haïfa. En aout 2012, selon la presse libanaise, 10.000 combattants du Hezbollah avaient pris part à un exercice simulant l’invasion de la Galilée. Réduit à l’époque à de la pure propagande, ce plan est aujourd’hui pris très au sérieux par l’état-major de Tsahal. Même s’ils ne doutent pas de l’issue d’un conflit contre le Hezbollah, les généraux israéliens savent qu’en temps de guerre, tous les symboles et les images comptent. Ceux d’un drapeau du Hezbollah flottant sur une localité israélienne proche du Liban aurait un impact assurément désastreux.
Maxime Perez
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