
Mon ami Jean-Pierre Winter nous a quitté, dans la nuit de lundi 8 à mardi 9 décembre. Immense peine !
Il y a juste deux semaines, sa force de vie le poussant encore, malgré sa santé, à la curiosité intellectuelle et à l’élaboration de la réalité, nous avons, en nous retrouvant, pu parler de tout, ainsi que nous le faisions en nous appelant régulièrement.
Notre amitié devenue essentielle est née avec notre première vraie rencontre lors du colloque sur « États du Symbolique » que j’avais organisé avec Schibboleth – Actualité de Freud, dont il allait devenir l’un des membres-piliers, à La Sorbonne, dans le mythique amphithéâtre Tillard il y a près de 15 ans. Nous avions débattu notamment de la question de la transmission, qui lui était fondamentale, avec entre autres comme participants, Raphaël Draï, Éric Marty, Daniele Brun, Michael Bar Zvi, Marc-Alain Ouaknin, Bernard Golse, Pascal Bruckner, Jean-Jacques Moscovitz, Bruno Karsenty, Sophie Nizard, Helene Widlocher, Thibault Moreau, Simone Wiener, Michael Prazan, Patrick Bantman, Isy Beller, Isy Morgensztern, Bernard Grelon, Emmanuel Jeulan, Philippe Robert, Paul Zawadzki …

Compagnons intimes en amitié, de pensée et de travail, nous partagions nos schibboleth freudiens et de pensée juive, chacun avec notre style et selon nos filiations respectives, déclinés dans nombre de séminaires, colloques et publications avec, en point d’orgue, notre intervention, aussi avec Bernard Golse, à l’Unesco sur l’apport de Freud et de la psychanalyse au travail de culture .
Combien de fois par semaines nous nous appelions spontanément juste pour nous raconter une nouvelle histoire juive, ou encore dans une autre version, meilleure ?
L’humour, le travail de culture, où que tu sois, Jean-Pierre, haver cheli, nous continuerons !
Affection à Florence, à ses enfants Elie, Mathias et Boris et à ses chers petits enfants dont il était si fier.
Au nom aussi de tous les amis de Schibboleth
Baroukh ata Hachem, Elokhenou melekh hàolam dayan haemet…

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Jean-Pierre Winter, psychanalyste, essayiste, est décédé le 9 décembre 2025, à l’âge de 74 ans.
Psychanalyste reconnu, il a co-fondé et présidé le Mouvement du Coût freudien. Il était membre du Comité éditorial de l’Association internationale inter-universitaire Schibboleth -Actualité de Freud, participant de façon marquante à ses activités et contribuant à tous les ouvrages de sa collection chez In Press éditions, dont le récent « Et le sexuel, aujourd’hui? »
Son fils Elie, psychiatre, écrit : « Sa vie professionnelle aura été consacrée à l’écoute de ses patients et à la transmission de la psychanalyse. Dans ses nombreux séminaires et ouvrages, il a développé une pensée originale, nourrie des enseignements de Jacques Lacan et de Françoise Dolto ainsi que de réflexions sur la tradition biblique et la pensée juive profane. Son engagement intellectuel l’aura également conduit à intervenir dans le débat public, mais à distance de tout militantisme. Il a également été membre de la CIASE (Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église).
Il a publié notamment « Dieu, l’amour et la psychanalyse » (avec Anne Dufourmantelle, Bayard), « Transmettre (ou pas) » et « L’Avenir du père » (Albin Michel)
Il était chevalier de la Légion d’honneur.
Son humanité et sa parole vivante et libre auront marqué toutes celles et ceux qui ont eu la chance de le connaître et de partager son chemin. »
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Jean-Pierre était fatigué, en rage contenue, lui le lion qui n’avait peur de rien, de personne, d’aucun sujet à aborder, et là, découragé face à l’impuissance qui s’est abattue sur lui depuis des mois, lui qui faisait parler le destin, notre destin, qui nous inspirait pour peser ensemble sur lui, a continué à parler avec moi jusqu’au dernier moment de notre intime avec sa sincérité absolue.
On a vite pensé l’actuel du monde, la clinique du contemporain, et on s’est raconté des blagues juives, qui ne sont pas seulement des blagues, lui 2 inédites, moi une : il a gagné 2 à 1.
« J’aimais ton père, ai-je écrit à Elie, au delà de l’estime et de l’admiration qu’il méritait. Je crois qu’on avait beaucoup de tendresse l’un pour l’autre, une confiance infinie, si semblables et différents, sachant le fonds commun indestructible. Il a inspiré beaucoup de personnes, même certains qui combattaient ses idées, car à moins d’être totalement idiots, comment ne pas être interpellés par ces questions?
Un personnage marquant, un analyste rigoureux, un intellectuel puissant, au travail de culture ouvert et précis, convoquant avec fidélité et créativité filiations diverses et généalogies de pensée, un lecteur curieux et éclectique, un être à la détermination sans relâche.
Principales publications
- Les hommes politiques sur le divan, Calmann-Lévy, 1995
- Les errants de la chair. Études sur l’hystérie masculine, Calmann-Lévy, 1998 et Payot (poche) 2000, Prix Œdipe 1998
- Choisir la psychanalyse, Éditions de la Martinière, 2001, Points Seuil 2010
- Les images, les mots, le corps. Entretien avec Françoise Dolto, Gallimard, 2002
- Stupeur dans la Civilisation avec Valérie Marin La Meslée, Pauvert, 2002
- L’éthique de Job. Lectures psychanalytiques de la Bible, MAHJ, 2008
- Pourquoi ces chefs-d’œuvre sont-ils des chefs-d’œuvre, avec Alexandra Favre, La Martinière, 2009
- Homoparenté, Albin Michel, 2010
- Dieu, l’amour et la psychanalyse, Bayard, 2011
- Transmettre (ou pas), Albin Michel, 2012.
- Peut-on croire à l’amour? avec Nathalie Sarthou-Lajus, Le Passeur, 2015, essai Poche, 2019
- L’avenir du père: réinventer sa place? Albin Michel, 2019.

A sa famille , à ses amis, et à tant d’autre, je m’associe à ce deuil. Jean-Pierre Winter était un « mensch » . Honneur à sa mémoire.