Espionnage russe, le contre-espionnage allemand lanceur d’alerte ou ce qui nous attend, si nous ne réagissons pas. Par Francis Moritz

L’avertissement du contre-espionnage allemand, qui vaut pour nous tous

On pensait la guerre froide terminée depuis longtemps. On s’était juste un peu trompé. Elle s’était assoupie, pensant jouir d’un repos bien mérité. L’Ouest pensait que depuis la chute du mur de Berlin (09/11/1989), que la Stasi s’était volatilisée, oui, sauf pour le Kremlin. Autant de bons serviteurs et loyaux sujets actifs ou « dormants » d’abord en Allemagne, mais pas seulement. Berlin est désormais en première ligne face à Moscou. Ça se confirme depuis la décision allemande de se réarmer et de devenir la première force conventionnelle d’Europe. Devant cette réalité, l’espionnage russe, lui, s’est redéployé. Il s’est parfaitement adapté.
Au fil des récentes révélations du Bundesamt für Verfassungsschutz (BfV Contre-espionnage allemand) et de ses homologues allemands. Il pratique désormais un espionnage hybride. il apparaît que la Russie ne se contente plus d’espionner : elle recrute désormais des agents « jetables », cible les infrastructures civiles et teste le socle de l’OTAN, dont la France est un membre éminent. Autrement dit : la guerre froide n’est pas terminée — elle a simplement changé de costume.

1. Une menace repensée

Au printemps 2025 déjà, les dirigeants du renseignement allemand déclaraient que l’espionnage et le sabotage russes avaient atteint un « niveau inédit ». Plus récemment encore, le BfV a mis en garde contre une augmentation visible de ­« l’infiltration, de l’espionnage et des actes de sabotage », visant tout autant les secteurs militaires que ceux de la logistique ou de l’énergie. Ukrinform+1. On n’a peu évoqué en France divers incidents qui ont perturbé le trafic SNCF tels qu’incendies inexpliqués de centres de contrôle d’aiguillage ou mis hors d’aiguillages électroniques, hôpitaux ou autre établissements publics cyber attaqués, hôtels de régions, préfectures, etc… sabotages divers… infiltration à la préfecture de police de Paris (qui fit 4 victimes) Les réseaux sociaux et l’Intelligence Artificielle en sont devenus des partenaires plus qu’efficaces.

« Nous observons un comportement agressif de la part des services de renseignement russes. »  président du BfV.

La Russie, qui s’était longtemps appuyée sur des « agents dormants » durant la guerre froide, adapte aujourd’hui ses méthodes : moins d’opérations spectaculaires, davantage d’acteurs furtifs, sans couverture officielle. Au-delà de l’espionnage traditionnel, c’est un profil « hybride » qui émerge. On a arrêté il y a quelques mois des citoyens bulgares auteurs de graffitis antisémites, d’autres qui ont agi de même au mémorial de la Shoah, cherchez l’erreur.

Les drones espions

On évoque régulièrement les survols de drones « non identifiés » dans les pays de l’OTAN, en France encore ces derniers jours. On affirme ignorer leur origine…On ne met pas en cause les moyens de notre défense aérienne, qui serait donc impuissante à les identifier, les empêcher de nous survoler ?

2. Le « modèle jetable » : quand l’espion devient remplaçable

Le scénario est clair : le BKA identifie une recrue via réseaux sociaux, elle est payée quelques centaines d’euros, effectue une tâche (repérage, collage d’affiches, drone amateur…), puis est « jetée ». Le nouveau terme est celui d’agent « jetable ».

On observe rigoureusement le même mode opératoire en Israël au service de l’Iran. On signale dejà diverses arrestations et d’autres que nous ignorons.

Pour la Russie, on ajoutera aujourd’hui l’Iran : peu d’investissement, peu de risques diplomatiques, peu de visibilité.
Et pour l’Occident : une asymétrie redoutable — beaucoup de petites actions, beaucoup de zones grises, peu d’éclats. Un casse-tête de contre-espionnage.

3. Pourquoi l’ancien modèle n’a pas disparu

On pourrait croire que la fin de l’URSS, l’ouverture des frontières et la « fin de l’histoire » signaient la retraite des espions classiques. Mais non. L’analyse du BfV dans les années 1990 le prévoyait déjà :

« Il faut supposer… qu’un nombre indéterminé d’individus issus de divers anciens services de renseignement continuent d’opérer illégalement en République fédérale d’Allemagne. » Ukrinform. On doit prendre en compte tous les anciens de la Stasi qui se sont trouvé au chômage du jour au lendemain. Certains ont repris du service en Allemagne de l’Ouest, d’autres ont été embauchés par Moscou. On se souvient que le président russe était le chef du KGB en Allemagne de l’est…
En 2025, les faits parlent d’eux même : la tradition clandestine s’est adaptée.

Les frontières européennes, sont devenues des passoires et le nombre croissant d’immigrés et de clandestins accéléré le processus d’agents n’ayant servi leur donneur d’ordre « qu’une seule fois »

4. Quelles sont les cibles ?

  • Infrastructure critique & chaînes logistiques : le repérage de bases militaires, d’acheminements d’armes vers l’Ukraine, la logistique lourde. On a vu l’Iran agir de même en Israel.
  • Information, influence et cyber-opérations : message ciblé, bots, faux comptes, désinformation. Le champ d’action s’élargit.
  • Population civile / usage indirect : les nouvelles recrues ne sont pas de vrais professionnels, mais des acteurs marginaux attirés par l’argent vite gagné. Le tout est de semer le doute, la perturbation.

5. Le calcul russe : à quoi bon l’espionnage de la vieille école ?

  • Le KGB ne veut pas abandonner des capacités qui peuvent encore servir : son « capital humain » formé depuis des décennies.
  • Le coût d’un « dormant » classique reste élevé (langue, couverture, insertion), mais pour Moscou, c’est un pari stratégique, pas une dépense.
  • L’environnement technologique et géopolitique rend l’infiltration plus subtile : couverture civile, université, mariage, double nationalité. Le BfV l’a déjà relevé.
    Ainsi, il ne s’agit plus seulement d’apprendre « quoi » espionner, mais « comment » sans se faire repérer.

6. L’alerte allemande : pourquoi maintenant ?

Plusieurs facteurs convergent :

  • L’appui de l’Allemagne à l’Ukraine, la militarisation de la chaîne logistique, font du pays un champ d’espionnage.
  • La perception d’une Russ­ie qui considère désormais l’Allemagne comme son adversaire direct Nr un en Europe.
  • La multiplication des petits incidents (drones, repérage, sabotage) qui dessinent un « hybride » entre guerre et espionnage classique.
  • Et, plus récemment, l’émission publique d’avertissements. Le BfV et la BKA lancent des messages clairs : surveillez votre voisinage, ne répondez pas à des offres douteuses sur les réseaux sociaux.

« N’acceptez pas d’être un agent jetable. »  Campagne de la BKA (sept. 2025) Arab News

7. Quelles marges de manœuvre pour la France et l’Europe ?

Même si l’alerte part d’Allemagne, les enseignements sont transposables :

  • Vigilance accrue : toute offre en ligne de « petit boulot bien payé » mérite scepticisme.
  • Renforcement du contre-espionnage civil : les agents ne portent pas toujours un imperméable ou un passeport estampillé « espion ».
  • Partage d’information transfrontalier : un drone filmant une base allemande peut être le signe d’une action dirigée depuis Moscou mais ayant un pan européen.
  • Sensibilisation citoyenne : chacun peut être la porte d’entrée d’un réseau. L’espionnage à moindre coût joue sur l’ignorance.

8. Vers une nouvelle ère espion-sabotage ?

L’arme invisible se pare d’habits ordinaires : étudiant russe, travailleur détaché, influenceur recruté. Le modèle est évolutif.
Et les « dormants » classiques ne sont pas enterrés : ils sont peut-être simplement en sommeil, prêts à être réactivés. Le BfV l’a souligné : « un nombre indéterminé continue d’opérer ». Ukrinform
L’attention doit donc porter autant sur la reprise d’anciens réseaux clandestins que sur l’éclosion de nouveaux dispositifs hybrides. Les réseaux sociaux sont devenus un moyen efficace, bon marché et discret pour rechercher des candidats à l’affut d’un petit boulot, ponctuel et qui rapporte. Une technique similaire est utilisée par le crime organisé, comme on a pu le constater à plusieurs reprises en France et en Europe.

Conclusion

Le message est clair : l’espionnage russe n’a pas pris de vacances. Il a changé d’habits.
Tandis que les dirigeants européens, en proie à d’autres urgences, pouvaient penser que l’ère des « espions dormants » était terminée, les services de renseignement allemands tirent la sonnette d’alarme. Espionnage, sabotage, influence : le spectre s’élargit
Alors que les frontières de la guerre sont de plus en plus minces et devenues très poreuses, une question se pose : serons-nous prêts à les surveiller, quels que soient les visages de ceux qui les franchissent ?

Ainsi va notre monde,

© Francis Moritz


Francis Moritz a longtemps écrit sous le pseudonyme « Bazak », en raison d’activités qui nécessitaient une grande discrétion.  Ancien  cadre supérieur et directeur de sociétés au sein de grands groupes français et étrangers, Francis Moritz a eu plusieurs vies professionnelles depuis l’âge de 17 ans, qui l’ont amené à parcourir et connaître en profondeur de nombreux pays, avec à la clef la pratique de plusieurs langues, au contact des populations d’Europe de l’Est, d’Allemagne, d’Italie, d’Afrique et d’Asie. Il en a tiré des enseignements précieux qui lui donnent une certaine légitimité et une connaissance politique fine. Fils d’immigrés juifs, il a su très tôt le sens à donner aux expressions exil, adaptation et intégration. © Temps & Contretemps


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15 Comments

  1. Merci de vos analyses toujours si pertinentes. J’admire tout particulièrement votre profonde connaissance de l’Allemagne et de sa politique, j’en apprends tellement plus que dans les médias y compris allemands.

    • Bien d’accord avec vous Mme Rivière. Au lieu de regarder avec crainte du coté de Moscou, vous feriez mieux Mr Moritz, de disserter sur l’avancée des troupes mahométane en Europe. Là ou il y a vraiment moyen d’avoir peur. Au lieu de singer la presse mainstream pour complaire au politiquement correct, vous feriez mieux de regarder ce qui se passe en Israël avec cette engeance islamique.

      • D’accord avec vous, Baba. Il est évident que le danger est celui que vous signalez, qui ne se cache nullement celui-là, l’avancée des troupes mahométanes en Europe. Mais à force d’être considéré comme un ennemi par des va-t-en guerre et de se faire menacer, Poutine va sans nul doute se conduire comme tel.

  2. Bonjour et merci pour vos commentaires. Vous êtes trop indulgente . Il y a média et média,on ne s’intéresse pas suffisamment ä notre grand voisin et partenaire le plus important. Nos médias français mettent trop souvent en avance la désormais usêe «  exception française » , c’est une erreur. Elle a changé de sens, hęlas.
    Bien cordialement

    • Bonjour Mme Rivière, pour la Commisdion de l’UE ça me paraît mal parti… Mme von der Leyen veut créer une branche de services secrets, dont elle serait la cheffe, alors à suivre…

  3. De toute façon, l’Allemagne suit le même chemin que la France et les autres pays d’Europe de l’ouest : guerre civile à la libanaise. Angela Merkel restera comme une des dirigeantes les plus folles et irresponsables de l’ère moderne : elle a livré la partie ouest du vieux continent aux barbares islamistes. Ursula Von der Leyen est carrément une nazie, et il semblerait d’ailleurs qu’à ce sujet sa famille ait d’assez lourds antécédents. Les Français assez vils pour se mettre à plat ventre devant l’Allemagne, Bruxelles, les islamistes et tous leurs ennemis sont encore plus collabos dans l’âme que leurs aînés de 40-44. L’Allemagne se porte beaucoup mieux que la France sur le plan économique mais ne dispose plus du gaz russe à bon marché pour faire fonctionner son économie et est en récession. Elle a tout de même les moyens de fabriquer des chars pour les envoyer sur le front de l’Est…comme au bon vieux temps de la Wermacht et de la Waffen SS. Au vu des circonstances, la réaction russe est extrêmement mesurée. Alors que la pieuvre de l’UE a fait le choix de l’expansionnisme et de la guerre, je suis frappé par le très grand sang-froid du président, du gouvernement et de la population russes. Des dirigeants moins sages que Poutine auraient déjà rasé des bases militaires de l’OTAN…Ou bien plus.
    L’Allemagne a toujours été le fléau de l’Europe et semble n’avoir été créée que pour détruire ses pays voisins. En 1888, Nietzsche nota : « Partout où va l’Allemagne, elle corrompt la civilisation » et en 1917 ou 1918, alors que l’Allemagne avait failli anéantir l’Europe et que son allié turc venait de commettre un triple génocide contre des Chrétiens, Gustave Le Bon écrivit :
    « Les guerres représentent l’extériorisation visible de forces invisibles en conflit. »
    « Après des siècles de défaites, l’islamisme est encore redoutable. Le rêve d’hégémonie de l’Allemagne ayant pris une forme religieuse restera pour l’Europe une source de conflits prolongés »
    « Si l’idée allemande triomphait, la face du monde changerait parce que l’indépendance des peuples serait anéantie pour toujours »
    Il n’a pas été écouté. 15 ans plus tard, Hitler arriva au pouvoir, puis ce furent la Shoah, la deuxième guerre mondiale et la première collaboration.
    Gustave Le Bon l’avait dit :

    « La leçon des faits n’instruit pas l’homme prisonnier d’une croyance ou d’une formule. »

      • @Baba Ce n’est malheureusement ni le seul ni le pire article de ce genre ici. Il y en a d’autres…Ce n’est certainement pas en relayant la propagande des Eurofascistes qu’on va lutter contre celle des Islamonazis, d’autant qu’elles ont des points communs en terme de modus operandi et tendent vers le même objectif.

        La bêtise et l’endoctrinement qui règnent en Macronie donnent honte d’être français. Les actes de barbarie qui y sont régulièrement perpétrés, dans l’indifférence presque générale, donnent honte d’appartenir à l’espèce humaine.

  4. étrange cette russophobie qui semble vouloir à tout prix faire oublier l’erreur historique majeure de l’administration Biden qui, en souhaitant renforcer sa position politique auprès des vieux pays européens, a crée les conditions d’un conflit armé interminable.
    cher Monsieur Moritz, je ne vous apprends pas que tous les russes en âge de l’être étaient soviétiques; votre argumentation est très légère et surtout très partiale!

  5. Non, c’est pas étrange d’être contre toute forme de barbarie. Ce qui est étrange de nier l’une au profit de l’autre . Tant qu’on aura pas compris cela, on n’avancera pas d’un iota. Je suis islamophobe, sovjetophobe, la liste est pas complète. Hélène.

  6. @Pencole Hélène « soviétophobe ? » Les choses m’ont l’air assez confuses dans votre esprit : il n’existe plus de Soviétiques depuis 35 ans. Il existe des Russes. Donc dites plutôt russophobe…Ce qui ne vous place pas exactement du côté des civilisés. Personne ne nie que l’armée russe peut être brutale et commettre des exactions (croyez-vous que l’armée américaine n’en commet pas ?) mais si vous étiez « contre toute forme de barbarie » vous seriez contre le régime ukronazi qui bombarde des populations civiles depuis 2014 et dont les milices bandéristes commettent des crimes de guerre tels que : au Donbass, séquestration de femmes russophones utilisées comme esclaves sexuelles, exécutions sommaires et tortures de soldats russes prisonniers. Méthodes de SS. Vous seriez contre les ordures qui dirigent l’Europe de l’ouest et financent la guerre : ils ont le sang de centaines de milliers de victimes sur les mains. Et si vous êtes contre les actes de barbarie commis par les islamistes en Angleterre et dans l’UE, vous devez également être contre nos gouvernants parce qu’ils sont complices. Rien de tel n’existe en Europe de l’Est et dans la Russie d’aujourd’hui : les femmes sont d’ailleurs infiniment plus libres et en sécurité à Moscou que dans n’importe quelle ville de cette chose qu’on nomme Europe de l’ouest.

    • Et vous, de quel côté êtes-vous ?…De celui d’Emmanuel Macron et d’Ursula la muerte ? Du côté du régime de Kiev et de ses milices criminelles ? Vous n’auriez de toute façon aucun argument solide à m’opposer.

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