
Ben Hakoon/FLASH90
Il y a parfois, dans l’histoire d’un pays, des secousses qui ne viennent pas des urnes ni des frontières, mais de l’intérieur même de ses institutions. Depuis quelques jours, un vent de stupeur souffle sur Israël : la Histadrut, la grande fédération des travailleurs, pilier historique de la société israélienne, est au cœur d’une vaste enquête pour corruption. Une affaire d’une ampleur telle que la police la qualifie déjà de « plus importante de ces dernières années ».
Lundi matin, alors que Tel-Aviv s’éveillait encore, les enquêteurs de la Lahav 433 — l’unité d’élite de la police nationale chargée de la lutte contre la fraude — lançaient une opération coup de poing : cinquante-cinq perquisitions simultanées, vingt-sept arrestations, et des dizaines d’interrogatoires. Dans le lot, un nom a résonné comme un coup de tonnerre : Arnon Bar-David, le président même de la Histadrut, conduit en garde à vue puis présenté à un juge, qui a ordonné son maintien en détention pour huit jours supplémentaires.
Les soupçons sont lourds : pots-de-vin, abus de confiance, blanchiment d’argent, et favoritisme au sein de la centrale syndicale. Les enquêteurs soupçonnent un réseau d’influence mêlant responsables syndicaux, entrepreneurs, élus locaux et agents d’assurance. Des marchés publics auraient été orientés, des nominations favorisées, des décisions économiques manipulées au profit de quelques-uns.
Mais c’est la profondeur des ramifications qui intrigue. Car les enquêteurs évoquent déjà des liens possibles avec des membres du Likud, parti au pouvoir, et même avec des sociétés semi-publiques où la Histadrut exerce traditionnellement son influence. Le scandale prend ainsi une dimension politique et institutionnelle inédite : celui d’un système d’interpénétration entre le monde syndical et le pouvoir politique, hérité de décennies de cohabitation et de connivence.
La Histadrut, née en 1920, n’est pas une institution ordinaire. Elle fut le cœur battant du jeune État hébreu, soutenant les pionniers, les kibboutzim, les caisses d’assurance maladie, et même les premières entreprises nationales. Elle fut aussi, longtemps, la colonne vertébrale du parti travailliste. Aujourd’hui encore, elle compte plus de 800 000 adhérents et exerce une influence considérable sur la vie économique du pays.
C’est précisément cette puissance, forgée dans l’histoire et la légitimité sociale, qui rend l’affaire si déstabilisante. Car elle ne concerne pas seulement un homme ou une dérive personnelle, mais un modèle institutionnel. Les images du président de la Histadrut escorté par la police ont produit un choc symbolique : celui d’une institution fondatrice contrainte de rendre des comptes, et d’un Israël qui regarde soudain son propre miroir.
Les journaux israéliens s’interrogent déjà : s’agit-il d’une affaire isolée, ou du symptôme d’un système devenu trop proche du pouvoir ? Certains rappellent qu’au fil des années, la frontière entre le syndicat et l’État s’est brouillée : la Histadrut négocie les salaires des fonctionnaires, participe aux grandes réformes économiques, tout en gérant ses propres entreprises et fonds d’assurance. Ce mélange des genres, autrefois vu comme un pilier de la cohésion sociale, pourrait bien devenir aujourd’hui son talon d’Achille.
Pour l’heure, l’enquête se poursuit. Les gardes à vue se multiplient, les ordinateurs sont saisis, les comptes passés au crible. Les accusations n’ont encore donné lieu à aucune inculpation formelle, mais le vernis s’est déjà fendu. Le scandale, lui, a pris racine dans l’opinion publique.
Dans un pays où l’on a l’habitude des crises politiques, ce sont souvent les affaires morales qui fissurent le plus profondément la confiance collective. L’affaire de la Histadrut n’est pas seulement un épisode judiciaire ; elle touche à la mémoire, à la promesse d’un Israël social, éthique et solidaire. Et dans ce silence qui suit les arrestations, beaucoup perçoivent déjà la fin d’une époque : celle où la maison des travailleurs se croyait à l’abri des tempêtes.
Dr Bernard Saal

Non ce n’est un séisme c’est le nettoyage des écuries d’Augias . Le gouvernement israelien est en train de récurer le pays qui en a bien besoin. La vérité sort et nul ne pourra l’arrêter ! Quand on vit en israel et après le 7/10 , nous avons besoin de vérité et de réponses.