Lettre à H… Par Gérard Kleczewski

H… ma petite-fille. C’est pour te découvrir quelques semaines après ta naissance que je suis revenu il y a une semaine en Israël, à quelques encablures de Jérusalem. Ce pays et cette ville qu’au fond si peu de gens connaissent autrement que par ce qu’on leur raconte…

H… ma petite-fille, toi et ta grande-soeur T vous vivez dans un Yishuv (un village) paisible en apparence, non loin de ce lieu (Ramot) où six personnes au moins ont été assassinées ce 8 septembre au matin (et plusieurs grièvement blessées, dont une femme enceinte de 8 mois) à un arrêt de bus. 

J’avais pris les jours précédents les transports en commun dans cette ville à nulle autre pareille dont le Seigneur a voulu qu’elle soit bénie entre toutes et maudite par ceux qui mettent la mort au sommet de toute ambition… 

Une femme de 60 ans, mère et grand-mère, est décédée. J’ai 60 ans, je suis père et grand-père, j’aurais tout aussi bien pu être devant cette station de bus le jour de l’attentat…

Mais H… ma petite-fille, je m’apprête à rentrer à Paris dans une ambiance que l’on dit, cette fois encore, insurrectionnelle. Je rentre en France, mon pays que ta maman et ton papa ont quitté il y a quelques années pour vivre pleinement leur vie et leur judaïsme, contraint ou honni par beaucoup dans la patrie d’Hugo et de Zola. Je reviendrai… 

H… ma petite-fille, ici la vie n’est pas toujours facile mais elle est pleine de sens. Celui que nous autres français avons perdu. La faute aux gouvernants… Notre faute avant tout. A ton âge, tu te fous bien de la politique, concentrée sur tes besoins essentiels. Et tu as bien raison ! 

Mais H… ma petite-fille, il faut que tu le saches: tu surgis dans un monde en fusion. Un monde où le mensonge est roi. Un monde où l’inculture-crasse alimente la haine, attisée par des militants bornés, sans foi ni loi, en keffiehs et en flottilles… 

De ton landau, H… ma petite-fille, tu n’as pas conscience de cette haine, et c’est heureux. Elle a conduit tes parents il y a quelques mois, alors que tu attendais paisiblement de pouvoir naître dans le ventre de ta maman, dans des abris pour éviter le pire… 

Quand tu seras grande H… ma petite-fille, tout ceci sera-t-il d’un passé sur lequel on se retourne sans se dire que c’était mieux avant ? Je l’espère de tout mon coeur de grand-père pour toi H… ma petite-fille, et ta magnifique soeur ainée T.  

Vous aurais-je rejointes en Israël quelque semaines ou quelques mois après ce message qui franchit, sur ce réseau que l’on dit social, le mur de ma pudeur ? 

Il y a quelques années, je t’aurais répondu « sans doute pas »… Aujourd’hui, je peux dire « sans doute ». Non pas que je ne me sente plus français, bien au contraire. 

Mais je suis d’une France qui disparaît à vue d’oeil.

D’une France qui se détourne de l’essentiel.

D’une France qui a renié ce qui faisait ses valeurs et sa grandeur. 

D’une France prête à toutes les lâchetés et toutes les compromissions. 

D’une France dont Israël a vainement attendu le soutien dès le 7 octobre 2023 mais dont on n’a pas attendu longtemps sa condamnation dès lors qu’il s’agissait de défendre son intégrité et ses habitants, notamment ses otages croupissants encore dans des conditions dantesques sous la terre maudite de Gaza.

Alors, H… mon amour de petite-fille, l’an prochain à Jérusalem ? 

Je ne l’exclus pas, je ne l’exclus plus.

© Gérard Kleczewski

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