
Décidément, les relations entre Israël et l’Union Européenne restent contrastées. Certains pays, Espagne en tête, ont demandé la suspension de l’Accord avec Israël, sachant pertinemment qu’ils ne l’obtiendraient pas, faute de l’unanimité indispensable pour ce genre de décision. L’hypocrisie n’en est que plus évidente.
Une centaine d’ONG, des syndicats et partis d’extrême gauche se sont associés à ces pays pour lancer un appel collectif le 19 juin avec la même revendication.
Le 23 juin les responsables des affaires étrangères de l’UE ont finalement confirmé que la suspension n’était envisagée par aucun pays ( !) y compris la France, qui reconnaît la légitimité d’un contrôle de l’Accord (?)
Paris préfère soutenir « un examen approfondi » en lien avec la Commission et milite pour des « résultats concrets sur le terrain » mais pas pour une rupture formelle. Elle valide l’idée d’une enquête « sur le respect des droits par Israël » : la France mise sur la diplomatie.
Au-delà des gesticulations et mises en demeure, c’est l’occasion de rappeler plusieurs évènements décisifs de ces 75 dernières années entre Israël et l’UE via l’Allemagne, qui est devenu un sujet d’une brûlante actualité.
Les évènements depuis 2023 : ARROW 3 pour l’Allemagne
- En août 2023, les États‑Unis ont validé la vente du système Arrow 3 entre Israël et l’Allemagne, un accord de 3,5 milliards $ (autour de 3,2 milliards €), représentant le plus gros contrat de défense jamais conclu par Israël.
- En septembre 2023, une signature officielle a eu lieu à Berlin entre les ministres de la Défense Yoav Gallant (Israël) et Boris Pistorius (Allemagne) : La Bundeswehr vise une première livraison fin 2025, avec mise en service initiale attendue pour cette même période ou début 2026.
- En juin 2025, des réunions de coordination sont en cours pour préparer les installations des sites allemands (radars “Super Green Pine”, lanceurs, etc.) Un déploiement initial devrait s’effectuer sur trois sites, dont la base de Holzdorf — avec de possibles extensions en Bavière et dans le Schleswig‑Holstein . Le système Arrow 3 visera une pleine capacité opérationnelle.
- L’Allemagne planifie également d’ajouter plus tard Arrow 4 – déjà à l’étude – pour couvrir des altitudes encore plus élevées.
L’événement majeur de 2025, fin juin
L’Allemagne vient d’annoncer la conclusion d’un pacte de cybersécurité avec Israël.
Qu’est-ce qui vient d’être signé ?
Fin juin 2025, le ministre de l’Intérieur allemand, Alexander Dobrindt, en visite en Israël, a annoncé plusieurs mesures majeures pour renforcer la coopération cyber entre les deux nations :
- Création d’un centre de recherche cyber germano-israélien
- Renforcement de la coopération entre services de renseignement (Mossad et BND)
- Déploiement du futur « Cyber Dome », inspiré de l’Iron Dome, mais pour la protection des infrastructures numériques
- Rôle renforcé des défenses anti‑drone
- Mise en place d’un réseau de protection civile et d’alertes.
D’après Reuters, c’est une « stratégie à cinq volets », symbolisant le passage d’un simple renforcement militaire à une défense civile apte à contrer les cyberattaques de grande ampleur.
Pourquoi maintenant ?
- Contexte géopolitique tendu : poussée de cyberattaques étatiques (Russie, Chine) et réalités du nouveau conflit entre Israël et l’Iran.
- Retour d’expérience israélien : les succès d’Israël lors des récentes attaques iraniennes ont convaincu Berlin de la validité de l’« Iron Dome du numérique ».
C’est quoi le « Cyber Dome »
- Un bouclier cyber national intelligent, équipé de capteurs, de systèmes d’IA et de machine learning, capable de détecter et stopper des attaques en temps réel sur les infrastructures critiques (énergie, santé, transports…)
- Inspiré de l’Iron Dome, mais ciblant les menaces cyber, NDTV décrit un concept permettant de centraliser les données et détecter les menaces de manière coordonnée.
Enjeux & Répercussions
- Souveraineté numérique : l’Allemagne renforce sa résilience contre les attaques hybrides.
- Leadership européen : Berlin envisage ce modèle comme un prototype potentiellement déployable à l’échelle de l’UE.
- Transfert de savoir-faire : l’initiative inclut la formation, la R&D, et l’intégration des startups israéliennes dans l’écosystème allemand.
Mais avant, que s’est-il passé ? Comment la relation germano-israélienne s’est-elle créée ? Comment a-t-elle survécu à tous les aléas de la vie politique depuis 75 ans.
Les premières relations concernant des fournitures d’armes entre l’Allemagne et Israël remontent aux années 1950, dans un contexte hautement sensible et politiquement délicat, marqué par la mémoire de la Shoah et les débuts de la Guerre froide. Voici les étapes clés :
1. Les prémices : les années 1950 – accords secrets (1957-1965)
- Contexte : après la Seconde Guerre mondiale, Israël se dote rapidement d’une armée moderne, mais reste isolé diplomatiquement. L’Allemagne de l’Ouest (RFA), de son côté, cherche à se réhabiliter sur la scène internationale.
- Le Chancelier Konrad Adenauer et David Ben Gourion entament des discussions dès 1952, qui déboucheront sur :
- 1952 – L’Accord de Luxembourg : l’Allemagne accepte de verser des réparations financières à Israël (environ 3 milliards de Deutsche Marks) pour compenser les crimes nazis.
- À partir de 1957-1958, des livraisons secrètes d’armes sont mises en place, pour ne pas froisser les pays arabes ni l’opinion publique allemande.
Nature des armes : chars, pièces d’artillerie, munitions, véhicules blindés, et assistance technologique.
Ces livraisons sont gérées dans un cadre non public, par le biais de sociétés-écrans et d’arrangements indirects, souvent via les États-Unis.
2. Tout finit par se savoir et devient public : crise diplomatique (1965)
- 1965 : les premières révélations publiques sur les ventes d’armes de la RFA à Israël déclenchent la colère du monde arabe.
- En réaction, plusieurs pays arabes (dont l’Égypte) rompent leurs relations diplomatiques avec Bonn.
- La RFA prend alors officiellement ses distances, mais les États-Unis prennent le relai dans les fournitures à Israël… parfois avec le soutien technologique de l’Allemagne en coulisses.
3. Reprise et approfondissement (années 1990 à nos jours) LE TOURNANT STRATEGIQUE
- Après la guerre froide, les relations deviennent plus ouvertes. Fait marquant : à partir de 1998, l’Allemagne livre à Israël des sous-marins de la classe Dolphin I, capables d’emporter des missiles à capacité nucléaire (supputé, mais sans confirmation formelle)
Ces sous-marins seront le prélude au ciment d’un partenariat stratégique durable.
1. Première génération — Classe Dolphin I
Commandée dans les années 1990, livrée entre 1999 et 2000
Après la Guerre du Golfe de 1991, Israël accuse l’Allemagne d’avoir indirectement contribué aux capacités chimiques de Saddam Hussein. En réponse, l’Allemagne décide de fournir des sous-marins à Israël — deux offerts, un partiellement financé.
2. Deuxième génération — Classe Dolphin II
Commandée en 2006–2012, livrée entre 2014 et 2017
Nouveauté : Ces sous-marins sont équipés de propulsion AIP (Air-Independent Propulsion), permettant de rester immergés beaucoup plus longtemps sans refaire surface.
Sous-marins livrés :
INS Tanin — livré en 2014 INS Rahav — livré en 2016INS Drakon — livré en 2027 (construction achevée, entré en service estimé pour 2027-2028)
3. Troisième génération en cours — Classe Dakar
Commandée en janvier 2022, livraisons prévues à partir de 2031
Cette nouvelle classe vise à remplacer progressivement les Dolphin I vieillissants.
Sous-marins prévus :
INS Dakar (nom symbolique, en mémoire du sous-marin israélien perdu en 1968)
2 autres unités sans noms publics connus à ce jour.
Caractéristiques attendues :
- Modèle encore plus avancé que les Dolphin II, possiblement avec capacités de frappe nucléaire étendues (sous-marins stratégiques d’attaque).
- Système AIP amélioré, capacité furtive accrue.
LE TOURNANT POLITIQUE DE 2008
Israël devient explicitement une raison d’État pour l’Allemagne à l’occasion d’un discours historique prononcé par Angela Merkel, alors chancelière, le 18 mars 2008 devant la Knesset (le parlement israélien) à Jérusalem. Visite d’État de Merkel en Israël pour les 60 ans de la création de l’État hébreu cours : Premier chef de gouvernement allemand à prendre la parole devant la Knesset
La déclaration marquante : ISRAËL RAISON D’ÉTAT
« La sécurité d’Israël fait partie de la raison d’État de l’Allemagne. Elle n’est pas négociable.»
La raison d’État (Staatsräson) renvoie à un principe fondamental non négociable de la politique étrangère allemande.
Cela signifie que protéger Israël (et en particulier sa sécurité) est désormais un pilier stratégique et moralde la diplomatie allemande
- Soutien diplomatique constant d’Israël au sein des institutions internationales (parfois en contradiction avec les positions de l’UE).
- Livraisons militaires stratégiques, comme les sous-marins de la classe Dolphin.
- Craintes internes parfois exprimées en Allemagne sur une relation « intouchable », même lorsque la politique israélienne est controversée (colonisation, Gaza, etc.).
Cette position a été réaffirmée par plusieurs dirigeants allemands :
- Frank-Walter Steinmeier, président fédéral (notamment en 2022 à l’occasion de la commémoration de l’attentat de Munich (50 ans)
- Olaf Scholz, en 2022 et 2023, dans le contexte des tensions à Gaza. F. Merz en 2025 à son tour, en ajoutant pendant la guerre avec l’Iran « Israël fait le sale boulot pour nous »
ENSEIGNEMENTS
Les gesticulations et les déclarations intempestives qui sont devenues banales et hypocrites sont sans effet, lorsqu’un pays, l’Allemagne, conduit une politique déterminée, souveraine, avec un partenaire de haute fiabilité. L’Allemagne fait la démonstration qu’en tant que membre le plus important de l’U.E., elle est en mesure de décider de sa politique de défense, au sein d’une politique européenne balbutiante, en ayant en vue ses intérêts qui, de fait, se confondent avec ceux de l’UE, en raison de sa position géographique et de ses moyens à bâtir une armée en capacité d’intervenir en cas de conflit prolongé. Ce qui ne semble pas du tout le cas actuellement pour l’Union, sauf à utiliser l’arme à un coût que représente la bombe atomique.
Enfin, citons quelques chiffres :
En 2024, Israël a exporté près de 15 milliards de dollars. 54% étaient destiné à des pays européens contre 36% en 2023 (source Reuters.com) Les faits sont les faits.
Ainsi va le monde,
© Francis Moritz
Francis Moritz a longtemps écrit sous le pseudonyme « Bazak », en raison d’activités qui nécessitaient une grande discrétion. Ancien cadre supérieur et directeur de sociétés au sein de grands groupes français et étrangers, Francis Moritz a eu plusieurs vies professionnelles depuis l’âge de 17 ans, qui l’ont amené à parcourir et connaître en profondeur de nombreux pays, avec à la clef la pratique de plusieurs langues, au contact des populations d’Europe de l’Est, d’Allemagne, d’Italie, d’Afrique et d’Asie. Il en a tiré des enseignements précieux qui lui donnent une certaine légitimité et une connaissance politique fine. Fils d’immigrés juifs, il a su très tôt le sens à donner aux expressions exil, adaptation et intégration. © Temps & Contretemps
Un detail merite d etre appuyé :
L allemagne comme bien d autres clients choisit nos equipements parce qu ils sont les meilleurs ,et , bien sur , a cause du bonus que represente l epreuve du feu .
L’Allemagne qui est le patron economique et politique de l europe mene la danse , son ambitieuse politique de rearmement ne passera pas par Paris , au grand dam de l insignifiant macron laissė par Berlin a ses gesticulations ridicules .
Il faut noter la consideration des allemands pour le savoir faire israelien , lorsqu ils acceptent de confier leur protection anti missiles a nos industriels alors qu au meme moment ils refusent categoriquement de se placer sous pavillon français , que ce soit pour les futurs chars de combat ou les avions , malgré le tres haut niveau de Dassault , c est dire si la confiance ne regne pas !!! Et on peut aisement comprendre pourquoi lorsqu on regarde la deliquescence macronienne vue de l autre rive du Rhin .
Heureusement que certains pays ne suivent pas
ces dérives autoritaires
Ils font entendre leur voix et heureusement qu’elles tranchent
avec ces pays que l’on appelle progressistes et qui cache un antisémitisme profond
honte à eux !!!!!!
Merci de ce brillant résumé de faits qui m’a personnellement fait chaud au coeur. Je sais qu’au sein de la Bundeswehr notamment on a le plus grand respect, voire de l’admiration pour l’armée israélienne, récemment au sujet de l’attaque contre les centres nucléaires en Iran.
L’Allemagne n’a pas besoin d’armée, si ce n’est pour se donner une importance illusoire. Tant mieux si elle fait du commerce avec Israël et si son gouvernement est moins ouvertement pro-islamiste que ceux de Londres et Paris. Mais il s’agit de double langage : c’est bien l’Allemagne d’Angela Merkel qui a massivement ouvert la porte à des millions de musulmans dont un grand nombre d’islamistes. L’Allemagne aura décidément causé deux fois la perte de l’Europe et la deuxième sera la dernière. L’Allemagne est finie, comme tous ses pays voisins, et subira le même sort. Posez-vous une question : qui croit encore au grand mensonge de l’UE aujourd’hui ? En dehors de l’UE : personne. A l’intérieur de l’UE : des bobos lobotomisés et surtout des plus de 70 ans. L’UE est une monstruosité sénile. Qu’elle disparaisse et qu’on n’en parle plus.