Quelques croquis de consultations. Par Daniel Sarfati

Daniel Sarfati :

Quelques croquis de consultations. 

Des enfants que j’avais opérés ou suivis, et qui reviennent me voir, adultes. 

Celui-ci, ma secrétaire m’avait prévenu :

« C’est le grand caïd des cités. Faites attention. Même la police a peur de lui. »

Je l’avais opéré d’une tumeur à l’oreille gauche. Il avait à peine 3 ans. Déjà, un gamin un peu turbulent mais sympathique. Les suites avaient été simples, quelque chose de bénin mais qui nécessitait une surveillance post-opératoire régulière. Je l’avais perdu de vue. Il revenait, histoire de voir si tout allait bien, côté oreille. 

Nickel, je lui ai dit, pour faire cool. 

« Merci Docteur. Si un jour, tu as une embrouille avec quelqu’un, tu as mon 06. »

C’est gentil de ta part, mais j’ai d’embrouilles avec personne. 

Juste ma voiture, je te la montre. On sait jamais, des fois qu’un 14 juillet, quelqu’un voudrait me la cramer…

« T’inquiète Docteur. Ta bagnole, personne la touche. »

Celui-là, sa mère était une anxieuse. 

Je l’avais opéré des amygdales. 

Ça n’avait pas loupé, un appel de l’hôpital à 2 heures du matin. 

J’avais cru à une reprise hémorragique.

Non. Tout allait bien. 

C’était l’anesthésiste qui appelait, excédé par la mère qui le harcelait toutes les minutes, pour qu’il vérifie si son fils n’était pas mort. 

« Il faut que tu passes la calmer, Daniel, j’en peux plus… »

Le petit garçon était devenu un beau jeune homme élégant, accompagné d’une très belle femme. Il avait le même type d anxiété que sa mère. Il voulait que je vérifie sa gorge, persuadé d’avoir un cancer incurable. 

Je l’ai rassuré, pas l’ombre d’une cellule cancéreuse. 

Sa mère m’avait téléphoné, un quart d’heure plus tard pour avoir des nouvelles de son « petit ».

Cette autre, que j’avais suivi pour un retard de langage. 

Je soignais toute sa famille. 

Entre soutien scolaire et orthophonie, elle avait beaucoup progressé. 

Elle était étudiante en droit maintenant. 

Elle était voilée. 

Elle m’a tendu sa carte vitale sur laquelle était collé un sticker « Boycott Israël ».

J’ai eu un grand moment de découragement. 

J’ai eu envie de lui dire qu’à l’hôpital Ichilov de Tel Aviv, des chercheurs israéliens avaient découvert une molécule innovante pour la maladie de Parkinson, et que son père aurait pu en bénéficier. 

Mais je lui ai rendu sa carte vitale sans un mot.

À chaque consultation, un épisode de la comédie humaine.

© Daniel Sarfati

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1 Comment

  1. Drôles de patients qui défilent, le reconnaissant, la mére anxieuse, harceleuse ,la femme voilée étudiante en droit au sticker infamant collé sur sa carte vitale,il les soigne quand même,Teva, boycott, Il les soigne quand même Daniel Sarfati.

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