Archives du 28 février 2022. Russie-Ukraine: Mais qui donc a ouvert la boite de Pandore?

La guerre est la réponse de Moscou à l’expansion continue de l’OTAN vers l’Est. L’UE réagit à la guerre contre l’Ukraine, par un nouveau paquet de sanctions Au même moment, l’OTAN lance pour la première fois ses plans de défense pour l’Europe de l’Est. C’est la deuxième guerre d’agression d’une grande puissance contre un autre État en Europe depuis la fin du système de confrontations ; elle présente les caractéristiques que la guerre de l’OTAN contre la Yougoslavie au printemps 1999, la première guerre d’agression illégale sur le continent européen depuis la Seconde Guerre mondiale. La guerre contre l’Ukraine est la troisième contre-attaque de la Russie contre les provocations pro-occidentales et contre l’expansion régulière de l’OTAN vers l’Est. Cela a été précédé par un vaste réarmement et des manœuvres extensives près des frontières russes, ainsi que par le conflit sur l’éventuelle adhésion de l’Ukraine à l’OTAN.

Les prémisses de l’action violentes étaient visibles pour les chancelleries et ses fins analystes, sauf peut-être chez certains encore pétris de leurs certitudes, dont Paris qui annonçait une rencontre au sommet démentie le lendemain par le Kremlin et suivi d’un appel téléphonique pour enjoindre à Poutine d’arrêter le conflit. Gouverner, n’est-ce pas prévoir et comprendre ses adversaires ? Sinon à quoi bon faire semblant de négocier.

Moscou se réfère au précédent du Kosovo en lien direct avec ses décisions successives et la caducité de fait de l’accord de Minsk. L’une des raisons était qu’il n’y avait plus aucune perspective de mise en œuvre de l’accord. Berlin et Paris en assument toute la responsabilité. Un grand quotidien allemand conseillait de poursuivre les négociations afin de contraindre la Russie, mais pas sérieusement pour sa mise en œuvre.  C’est ce qu’ont fait les deux partenaires du format de Normandie. Ils ont joué les prolongations sans intégrer que le compte à rebours avait démarré.

Réunion à Paris du format de Normandie

Poutine a compris que le président Zelensky ne pourrait jamais remplir les obligations figurant dans l’accord de Minsk. Il a donc décidé de reconnaître les deux républiques avec les mêmes arguments que Berlin et l’OTAN en son temps pour forcer la Serbie à se séparer du Kosovo contre sa volonté – C’est ce précédent qui a ouvert la boîte de Pandore en Europe. Il faut aussi rappeler que la Russie était en négociations avec les États-Unis en vue d’un accord sur la sécurité qui a été interrompu par les Américains. Joe Biden par ses déclarations équivoques a déjà jeté l’éponge en déclarant que son pays n’interviendrait pas en Ukraine.

Nombreux sont ceux, médias inclus, qui feignent d’ignorer que la guerre d’agression contre l’Ukraine n’est pas la première en Europe depuis 1945. La première sur le continent a été la guerre de l’OTAN contre la Yougoslavie en 1999, au prétexte de la violence serbe contre à la minorité albanophone au Kosovo. Le chancelier de l’époque, Gerhard Schröder, a admis que la guerre avait été menée en violation du droit international ; le secrétaire d’État de l’époque au ministère des Affaires étrangères, Wolfgang Ischinger, admettra ensuite – qu’elle était «problématique» au regard du droit international – «beaucoup !».

Premier bombardement de l’Otan en ex Yougloslavie march 1999

À cette époque, l’armée de l’air allemande a joué un rôle dans la destruction de la défense aérienne serbe pour préparer les frappes aériennes. Les Tornados allemands ont tiré plus de 230 missiles HARM sur des positions serbes. Le nombre des victimes n’est pas connu à ce jour. Avec cette guerre contre la Serbie, l’OTAN a ouvert la boîte de Pandore. A la guerre de la Russie contre l’Ukraine s’ajoute une seconde guerre d’agression en Europe, qui viole le droit international. Contrairement à ce qui était prévu après la chute de l’Union soviétique et l’entente Gorbatchev-Bush, il devait y avoir un modus vivendi en Europe et un accord sur la non-expansion de l’Otan face à la Russie.

La guerre russe est la réponse violente à l’avancée constante des puissances occidentales vers l’Est – et non la première. Lorsque la Géorgie, soutenue par l’Occident, a commencé à bombarder l’Ossétie du Sud en août 2008, rompant le cessez-le-feu, frappant les troupes russes surveillant le cessez-le-feu, les forces russes ont brièvement envahi la Géorgie pour arrêter tout nouveau bombardement : c’était la première réaction de Moscou. Quand, après les deux premières phases de l’élargissement à l’Est de l’OTAN, les Occidentaux ont soutenu un coup d’État à Kiev début 2014, qui comprenait plusieurs ministres du parti fasciste Svoboda et qui visait clairement l’adhésion à l’OTAN – une question très controversée dans le pays lui-même, la Russie a absorbé la Crimée après un référendum réussi : c’était la deuxième riposte de Moscou. 

L’OTAN, à son tour, a répondu par une nouvelle escalade des tensions, en stationnant des troupes de combat en Europe de l’Est et du Sud-Est – en violation de l’Acte fondateur OTAN-Russie – et en amplifiant ses manœuvres près de la frontière russe, notamment par le déploiement d’importantes unités américaines transférées des États-Unis vers l’Europe de l’Est. La Russie a demandé à plusieurs reprises le démantèlement de la présence de l’OTAN en Europe de l’Est et du Sud-Est. Le pacte militaire occidental y a répondu en décidant le 16 février de stationner encore plus de troupes dans la région. Moscou a renouvelé ses demandes d’arrêter l’expansion de l’OTAN vers l’Est et, surtout, à ne pas accepter l’Ukraine dans l’alliance. L’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN est inacceptable pour la Russie qui perdrait la «profondeur stratégique». Ce qu’il faut comprendre comme zone tampon entre le cœur de la Russie et les puissants européennes (de l’Otan).

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L’Otan a refusé d’officialiser sa position : l’Ukraine ne rentrera jamais dans l’Otan, ce pays est en guerre avec la Russie depuis 2014. L’UE n’intègrera pas ce pays, elle a déjà beaucoup de difficultés avec les pays de l’Est. Toutes les chancelleries le savent, On évoque toutes sortes de raisons qui ne constituent pas une acceptation, en invoquant la liberté de choisir une alliance, mais en ignorant le principe de «sécurité sans partage», qui est également inscrit dans les accords internationaux tels que la Charte européenne de sécurité et par laquelle tous les États sont tenus de ne pas mettre en danger ceux des autres États en garantissant leurs besoins de sécurité En outre, plusieurs pays de l’OTAN ont répondu aux appels à ne pas intégrer l’Ukraine dans l’alliance en commençant à moderniser encore plus largement les forces armées ukrainiennes, au mépris  de ses intérêts de sécurité en renforçant la présence de l’OTAN et en liant l’Ukraine à l’alliance militaire occidentale. Le ministre ukrainien des Affaires étrangères a récemment assisté à une réunion des ministres des Affaires étrangères de l’OTAN – la Russie a maintenant répondu par une troisième contre-attaque. Elle prend la même forme que la guerre de l’OTAN contre la Yougoslavie en 1999.

Il y a évidemment un risque d’escalade incontrôlable. On ne peut que condamner la marche militaire en cours. On ne peut toutefois pas ignorer les origines du conflit et se poser la question : est-ce celui qui a ouvert la boite de Pandore qui est responsable ou est-ce celui qui en sort et peut-on être responsable mais pas coupable ou coupable sans être responsable ? Jean-Paul Sartre avait sa réponse, l’enfer c’est les autres. En dernière minute, mais très tardivement, le président ukrainien vient de déclarer qu’il pourrait discuter d’un statut de neutralité avec Moscou. Il vient de comprendre qu’il est seul face au Kremlin et son maître.

© Francis Moritz

Source: Temps & Contretemps

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7 Comments

  1. Francis Moritz a raison de rappeler le scandale des bombardements du Kosovo. C’est là que la dérive hitlérienne de l’UE a commencé à se dévoiler. Le gouvernement allemand était à l’origine d’une vaste manipulation ayant eu des conséquences dramatiques sur le plan humain et géopolitique. Le fait est que la parole de nos dirigeants n’a aucune valeur et que tout le monde en dehors de l’Europe, du Canada et du parti démocrate américain condamne le bellicisme des Europeistes. La Russie est aujourd’hui soutenue par plus de 80% de la planète, pour des raisons bonnes ou mauvaises, mais le résultat est là.

  2. Les serbes ne voulaient pas devenir musulmans et ils avaient bien raison, ils se sont donc battus contre le Kosovo. Biden qui sévissait déjà a donner l’ordre de bombarder leurs ponts. L-union européenne a evidemment pris la défense du Kosovo.De tout temps, la Serbie s’est opposée à l’empire ottoman.Le Kosovo est à 90% musulman.La Yougoslavie c’était Josip Broz Tito qui avait réussi à garder son indépendance face à L’URSS. Aprés sa mort la Yougoslavie partit en éclat.

  3. Le Kosovo, premier pas vers la guerre en Ukraine.

    Le drame actuel trouve une première source dans le Kosovo.
    En 1999 l’ Otan, 900 millions d ‘ habitants, a attaqué la Serbie, 10 millions d’ habitants, suite à une manipulation de l ‘ opinion publique occidentale ( la mise en avant d’un plan ” fer à cheval” ) sans autorisation de l’Onu et sans déclaration de guerre et ce alors que l ‘Otan, alliance défensive, n ‘a pas été attaquée par la Serbie. Ce conflit a pris la forme unique d ‘ attaques aériennes, les Occidentaux n’ont pas pris le risque d ‘ envoyer des troupes au sol.
    Cela s’est terminé par la création de l ‘ État du Kosovo et donc la fin du principe de l’ intangibilité des frontières en Europe.

    «Le précédent du Kosovo est horrible et va faire voler en éclats tout le système existant des relations internationales. C’est un boomerang qui va un jour leur revenir dans la gueule » ( cf. 1 )
    Voilà la diatribe de Poutine en 2008, suite à la déclaration d’indépendance du Kosovo, c’est à dire de la transformation de la limite d ‘une province de la Serbie en frontière internationale.
    « Vous n’avez aucune idée, j’insiste, aucune idée de la manière dont nous, les orthodoxes, allons vous faire payer cette guerre du Kosovo ! Un jour vous allez la payer au centuple « .
    déclaration d un officier Serbe au colonel Lalanne-Berdouticq ( cf. 2 ).

    Cette création de l ‘ État du Kosovo, fait donc suite à un immense mensonge. Un plan dit  » fer à cheval  » aurait été mis en place en 1999 par les Serbes dans le but de commettre un génocide contre les Albanais du Kosovo. A l’ époque seul Régis Debray avait affirmé qu’il n’en était rien. Il a été descendu en flèche par l ‘ensemble des médias ( cf. 3 ). C’est ce mensonge qui a permis de justifier des bombardements massifs par l’Otan sur toute la Serbie.

    Le mensonge n’a été dénoncé qu’ en 2019 et en 2000.
    En 2019 Le Monde Diplomatique titre, au sujet du plan  » fer à cheval  » :  » Le plus gros bobard de la fin du XXe siècle  » ( cf. 4 ), Libération en 2000 :  » Berlin: un faux plan pour aller au Kosovo. Les militaires auraient menti pour justifier l’intervention de l’Otan.  » ( cf. 5 ).

    Au moment où toute les caméras sont tournées vers l ‘ Ukraine, caméras qui ne nous ont rien montré des bombardements ukrainien sur le Donbass, bombardements qui ont quand même duré 8 ans et fait plus de 10 000 morts et un million et demi de réfugiés, pour moins de 6 millions d ‘ habitants , il nous faut nous souvenir du Kosovo; première fois depuis 1945 que le principe de l ‘intangibilité des frontière a été remis en cause en Europe par le mensonge et par la guerre.

    sources :
    1) https://www.lefigaro.fr/international/2008/02/23/01003-20080223ARTFIG00475-kosovo-poutine-menace-l-occident-.php

    2) https://www.seneplus.com/opinions/mon-analyse-sur-la-guerre-en-ukraine

    3) https://www.letemps.ch/monde/regis-debray-scandalise-presse-intellectuels

    4) https://www.monde-diplomatique.fr/2019/04/HALIMI/59723

    5) https://www.liberation.fr/planete/2000/04/06/berlin-un-faux-plan-pour-aller-au-kosovo-les-militaires-auraient-menti-pour-justifier-l-intervention_323295/?outputType=amp

  4. @Daniela Exactement
    Eurofascisme et Islamonazisme ont toujours été liés. En tout cas, ils le sont depuis au moins les années 80-90. Faire passer l’europeisme, totalitarisme d’extreme-droite heritier de Pétain, du mufti de Jérusalem et de Stepan Bandera, pour un système démocratique et opposé à l’extrême-droite représente une des plus grandes manipulations et impostures de tous les temps.

    Bat Yeor a livré une remarquable analyse https://www.tribunejuive.info/2022/03/08/bat-yeor-qui-est-responsable-de-la-guerre-en-ukraine-qui-sen-rejouit/?amp=1
    J’espère assister à la chute de l’euronazisme avant la fin de mon existence. On s’y dirige, fort heureusement.

  5. @Joseph1 Merci pour les liens. Cela montre l’ampleur de la désinformation caractérisant l’Europe de l’Ouest. Pas un seul média français ne semble avoir rappelé les faits du Kosovo depuis 2022 : la « liberté de la presse » est aujourd’hui inexistante en France, en Suisse, en Belgique et la majorité des citoyens sont totalement désinformés. Les mensonges sur lesquels étaient bâtis l’UE se sont écroulée en 1999, mais cela n’a pas empêché les masses zombifiées d’applaudir les désastres ultérieurs. Goebbels disait : « Plus les mensonges sont gros, plus cela passe ». Ursula Von der La Hyène, Emmanuel Macron et d’une manière générale les Europeistes appliquent ce principe.
    Au sujet du Donbass, les bombardements contre la population russophone ont été accompagnés de divers autres crimes de guerre perpétrés par les unités nazies de l’armée ukrainienne y compris la séquestration et la prostitution forcée de femmes russophones. Avec la complicité de l’UE et de tous ceux qui relaient la propagande russophobe depuis 9 ans.

  6. Erreur historique majeure : c’est la Serbie, déjà soutenue par la Russie, qui a agressé territorialement la Slovénie, la Croatie et la Bosnie-Herzégovine dès le début des années 1990. Déjà la lâcheté Mitterrandienne qui a soutenu la Serbie en refusant d’armer la Bosnie pour défaire le siège de Sarajevo.
    Pourquoi M. Moritz reprend-il les mensonges Poutiniens, relayés aujourd’hui par Le Pen et Mélenchon ?

  7. @JP Cet article de Francis Moritz est au contraire factuel. Il me semble plutôt que c’est vous qui relayez les mensonges européens et macronistes que démontent des faits historiques précis. Les guerres en Yougoslavie et au Kosovo ont été marqués par des violences intercommunautaires commises par les différents protagonistes : aucun camp n’était innocent. Quant aux bombardements de 1999, ils ont effectivement été commis en violation du droit international et sur la base de fake news émises par le gouvernement allemand. Plan Fer à Cheval : c’est le même type de procédé (campagnes d’intox) qu’utiliserent les Américains pour justifier les deux guerres contre l’Irak et qu’utilisent aujourd’hui Emmanuel Macron &Co.

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