Interview de Daphna Deouell
Représentante – Porte-Parole de S.O.S Pets
SOS Pets
עמותת S.O.S חיות
Par Daniella Pinkstein
Pour Tribune Juive
Herzliya
Novembre 2024
Pour Mitch
Chère Daphna,
Merci d’avoir accepté cette interview. Je vous suis sur les réseaux sociaux depuis quelques années, et sur Facebook avec une attention particulière ces derniers mois, pour tout le courage et l’obstination que vous mettez à sauver ces chiens, ces chats en situation d’épouvantable détresse.
Avant de vous interroger sur les mille aspects exceptionnels de votre organisation, pouvez-vous d’abord présenter SOS Pets, depuis quand cet organisme a-t-il été fondé et comment a-t-il vu le jour ?
L’organisation S.O.S Pets a été fondée en 1978 par Riki Bassry, le défunt Dr. Ze’ev Sheiner et la défunte Mona Halfman, dans le but d’aider les chiens et les chats sans abri et d’améliorer les conditions de vie des animaux d’Israël. Riki Bassary, qui est toujours le président bénévole de l’association, est depuis des années l’esprit vivant, encourageant quels que soient les difficultés, derrière les activités de l’association.
S.O.S Pets s’oppose à l’euthanasie des animaux et adhère à cette éthique depuis le jour de sa fondation, luttant pour la vie et la qualité de vie de chaque chien ou chat. L’association S.O.S Pets a été la première en Israël à fonctionner et fonctionne toujours sans refuges, basée sur le principe et la croyance que les êtres humains doivent prendre soin de leurs animaux et ne pas les abandonner, et assumer la responsabilité de leur sort, voire de leur destin commun.
L’association SOS Pets a initié le concept de familles d’accueil pour chiens et chats en Israël, et nous continuons à ce jour, encore à fonctionner de cette manière. Les animaux sont dans des familles d’accueil pendant la semaine et reviennent chez nous pour le « grand » jour de l’adoption, ayant lieu ici chaque semaine. La famille d’accueil s’occupe d’eux, leur donne chaleur et amour, et l’association prend en charge la nourriture, le matériel et les traitements vétérinaires.
Dans le cadre d’une approche holistique, nous croyons que les chats et les chiens jouent un rôle vital dans le maintien d’une communauté sensible et bienveillante.
Les chats et les chiens font partie de nos vies et il est de notre obligation de prévenir leur souffrance, de leur offrir une qualité de vie décente et des soins appropriés.
Par curiosité personnelle, mais je suis sûr que beaucoup d’entre nous se posent la même question, – j’ai vu au fil des ans le nombre de chiens augmenter dans tout Israël et à Tel-Aviv de manière exponentielle! Comment expliquez-vous cela ?
Tel-Aviv est, en Israël, la ville avec le plus grand nombre de chiens. C’est une ville aussi particulière que bigarrée, et de nombreux amoureux des chiens y vivent. La région centrale d’Israël est différente de la périphérie, où il y a moins d’adoptions et le problème des chiens errants est beaucoup plus grave.
Trouve-t-on en Israël beaucoup de chiens errants, en dépit pourtant en apparence du nombre important d’entre eux qui semblent aussi domestiqués qu’en sécurité ? D’où viennent-ils ?
Malheureusement, chaque année, le problème des chiens errants en Israël s’aggrave car le ministère de l’Agriculture n’a pas pris aucune mesure depuis la création de l’État pour réduire leur reproduction. À ce jour, il n’existe pas de plan national, et les budgets alloués ne correspondent pas à la réalité et ne s’attaquent pas vraiment à la question.
Pourtant, la plupart des demandes proviennent d’organisations de protection des animaux, dont la plus grande est l’association SOS Pets, qui sauve avec succès des dizaines de chiens sans abri chaque semaine.
On fait continument appel à nous, et de partout – des refuges municipaux à travers le pays, des bases militaires, des agents de contrôle des animaux, et de mille autres lieux encore. Beaucoup de chiens errants viennent des parties sud, nord et est du pays.
Une partie du problème est également l’abandon, pour de multiple raisons, de chiens déjà adoptés. L’association SOS Pets ne les accueille généralement pas mais leur permet de venir aux journées d’adoption afin de trouver un nouveau foyer. De cette manière, le chien passe d’un foyer à un autre et ressent ainsi un peu moins le traumatisme lié à l’abandon. Certaines personnes abandonnent leurs chiens dans des refuges municipaux, ce qui cause un vrai traumatisme aux animaux.
Les chats, en revanche, semblent prospérer librement dans la plupart des villes, chats sauvages pour la plupart. Qui est exactement responsable de leur soin ou de leur protection, la ville, la région, les résidents ?
En Israël, les chats des rues sont considérés comme des animaux protégés, et il est illégal de les déplacer d’un endroit à un autre. Cela est en contraste avec les chiens, qui ne sont pas autorisés à errer; Les autorités locales étant tenues de les attraper et de les placer dans des refuges. Dans de nombreux endroits, il y a des « nourrisseurs » de chats qui s’occupent d’eux, et la municipalité est censée procéder à des stérilisations et fournir des soins médicaux. En pratique, cela ne se produit pas partout. L’association SOS Pets a un projet de réhabilitation des chats de rue, où de nombreux sont soignés. Certains d’entre eux sont aveugles, boiteux, amputés ou ont d’autres problèmes médicaux. Nous agissons pour les protéger.
Votre centre est exceptionnel à plus d’un titre. Pour le sauvetage indéfectible des animaux, pour l’enseignement qui y est prodigué, pour le volontariat qui implique des enfants ou des adolescents vers la connaissance du monde animal, pour l’apprentissage aussi du dressage des chiens, et surtout pour la réflexion que vous ajoutez— rareté particulièrement émouvante —incitant à prendre soin de ces chats et chiens, pour faire de nous de meilleurs humains. Avez-vous conscience de menez une bataille ? Une bataille morale ?
Riki Bessry, qui a fondé S.O.S Pets, est éducateur. Il a travaillé intensément dans ce domaine, y compris en créant, en rédigeant des programmes éducatifs mis en œuvre dans les écoles et des jardins d’enfants. Nous croyons que l’enseignement est aussi important que le sauvetage des animaux, et nous encourageons les enfants à partir de 8 ans à faire du bénévolat lors des journées d’adoption de l’association. Le bénévolat en tant que famille d’accueil, qui nous aide à sauver des vies, est également une valeur éducative très importante.
Il y a aussi de nombreux cas de chiens et de chats blessés, malades et négligés. Ils reçoivent les meilleurs soins possibles comme s’ils étaient nos propres animaux de compagnie. Nous ne ménageons aucun effort, et nous avons également un groupe incroyable de bénévoles appelé « La Patrouille de l’Hôpital. » Ils visitent les hôpitaux et les cliniques vétérinaires pour offrir aux animaux chaleur, amour, contact et nourriture de qualité. Le processus de récupération est à la fois émotionnel et physique.
La majorité du budget de l’association est consacrée aux soins vétérinaires pour les chiens et les chats, dont certains sont des traitements d’immédiate survie.
Depuis le 7 octobre, comme nous informe votre site web, le nombre de chiens errants ou en détresse sévère est en constante hausse. Pouvez-vous expliquer ce qui se passe ? Vous avez envoyé des volontaires dans les régions du sud, où des animaux étaient retenus en cage dans des situations extrêmes ; vous avez sauvé 170 chiens de Sderot, Ashkelon, Dimona, Ashdod, Beer-Sheva. Quelle était exactement leur situation ? Étaient-ils des chiens dont les propriétaires ont dû fuir ces zones ?
Notre Activité après le 7 octobre 2023 en effet s’est intensifiée.
Au cours des premiers mois de guerre, il y avait une très forte volonté de la part des israéliens d’aider les animaux, et nombreux ceux qui se sont portés volontaires et ou qui ont adopté. Grâce à cet engagement, l’Association SOS Animaux a sauvé plus de 1 100 chiens et chats, principalement en effet des régions sud et nord. Les chiens que nous avons sauvés étaient ceux des bases militaires et des refuges municipaux dans de très nombreuses zones de conflit. Des refuges entiers ont dû être vidés, avec de nombreux chiens effrayés dans des cages, endurant les bruits des bombardements, des explosions et des sirènes — dans des endroits comme Sderot, Ashkelon, Tsfat, entre autres. Nous avons réalisé de nombreuses opérations de sauvetage avec l’aide de nos bénévoles.
Le problème des chiens errants dans le sud et le nord du pays était de toute façon déjà grave avant la guerre. Mais depuis le 7 octobre, nos incroyables soldats ont aussi sauvé des chiens de Gaza et du Liban, et l’association n’en finit plus d’aider et d’accueillir autant qu’elle le peut tous ces animaux dans une désespérance folle.
Peu à peu cependant, la volonté d’adopter s’amenuise, et nous rencontrons de plus en plus de difficultés à recruter des familles d’accueil et à recevoir des dons. Les familles d’accueil sont un maillon crucial dans le processus de sauvetage, car nous n’avons pas de chenils, et pour sauver des animaux, nous avons besoin de bénévoles pour les accueillir chez eux. Il est également devenu très difficile de lever des fonds pour tous les soins vétérinaires, du fait de l’évidente situation générale et de la nécessité d’aider financièrement d’abord les évacués, les survivants du massacre du 7 octobre et les soldats. Alors que nous recevons de plus en plus de chiens en mauvais état, nous avons de moins en moins de moyens.
Dans les images terribles rapportées par les assassins le 7 octobre, des femmes, des hommes, des enfants, mais aussi des chiens ont été tués avec un sadisme total. Preuve, s’il en fallait une, que toute la terre a été, ce jour maudit, vandalisée, torturée, avec une volonté d’anéantissement dont même les animaux n’ont pas échappé. Tous les enfants, toutes les espèces et toutes les lois de Noé ont été ciblés par une volonté infernale d’anéantissement.
Dans ce monde où la cruauté est plus courante que la gentillesse, la survie du chien tient de l’absolu anti-darwinisme. Loin d’avoir mangé ou surpassé d’autres espèces, ils ont survécu grâce à leur incommensurable gentillesse, leur bienveillance à notre égard, leur loyauté, leur amour, leur intelligence (qualités dont on use aussi en temps de guerre,- cette guerre incluse.). Peut-être en effet, il serait juste de leur rendre un éclat de toute cette générosité donnée sans compter, sans ombre, sans le moindre nuage.
Votre organisation est une Arche de Noé. Voici les coordonnées pour vous aider. Pour nous aider à traverser la tempête. Ensemble.
Le site web de votre organisation:
https://www.facebook.com/sospets1
https://www.instagram.com/sospets
https://www.sospets.co.il/donationen
https://www.facebook.com/sospetsinternational
טלפונים. 03-7441010 ,03-7441111 פקס. 03-7440384 אתר. sospets.co.il
https://www.sospets.co.il/aboutus
___________________________________________________________
_____________________________
« Murmuration ». Interview of Daphna Deouell, The spokeswoman of S.O.S Pets S.O.S Animals Association, By Daniella Pinkstein for Jewish Tribune
Interview of Daphna Deouell –
By Daniella Pinkstein
For Jewish Tribune
Herzliya
November 2024
For Mitch
Dear Daphna,
Thank you for agreeing to this interview. I have been following you on social media for a few years, and on Facebook with particular attention in recent months, for all the courage and determination you show in saving these dogs and cats in terrible distress.
Before I ask you about the many exceptional aspects of your organization, first, can you introduce SOS Pets, when was this organization founded, and how did it come into being?
The S.O.S Pets organization was established in 1978 by Riki Bassry, the late Dr. Ze’ev Sheiner and the late Mona Halfman, with the aim of helping homeless dogs and cats and improving the condition of animals in Israel. Riki Bassary, who still serves as the volunteer chairman of the association, is the living spirit behind the association’s activities throughout the years.
S.O.S Pets opposes animal euthanasia and has adhered to these ethics since the day it was founded and fights for every dog or cat’s life and quality of life. The S.O.S Pets association was the first in Israel to operate and still operates without shelters, based on the principle and belief that human beings should take care of their animals and not abandon them, and to take responsibility for their fate.
The SOS Pets association introduced the concept of foster families for dogs and cats to Israel, and we continue to operate in this way to this day. The animals are in the homes of foster families during the week and arrive for the big adoption day that takes place every week. The foster family cares and gives warmth and love and the association takes care of food, equipment and veterinary treatments.
As part of a holistic approach, we believe that cats and dogs play a vital role in maintaining a sensitive and caring community.
Cats and dogs are part of our lives and it’s our obligation to prevent their suffering, offer them a decent quality of life and proper care.
Out of personal curiosity, but I’m sure many of us wonder about this, – I have seen the number of dogs in Israel and in Tel Aviv grow exponentially over the years! How do you explain this?
Tel Aviv is the city with the highest number of dogs in Israel. It is a very special and diverse city, and many dog lovers live there. The central region of Israel is different from the periphery, where there are fewer adoptions and the problem of stray dogs is much more severe.
Are there many stray dogs in Israel, despite the seemingly large number of them that appear to be as domesticated as they are safe? Where do they come from ?
Unfortunately, every year the problem of stray dogs in Israel grows because the Ministry of Agriculture has not taken action since the establishment of the state to reduce their reproduction. To this day, there is no national plan, and the budgets allocated for this issue are directed to the wrong places instead of addressing the problem. Most inquiries go to the animal welfare organizations, the largest of which is the SOS Pets Association, which successfully saves dozens of homeless dogs every week.
The inquiries come from all over – from municipal shelters across the country, from military bases, from animal control officers, and more. Many of the stray dogs come from the southern, northern, and eastern parts of the country.
Part of the problem is also the abandonment of dogs from homes for various reasons. SOS Pets Association usually does not take them in but allows them to come to adoption days in order to find a new home. In this way, the dog moves from home to home and feels less trauma from the abandonment. Some people abandon their dogs in municipal shelters, which causes trauma to the animals.
Cats, on the other hand, seem to be thriving freely in most cities, many of them feral? Who exactly is responsible for their care or protection, the city, the region, the residents?
In Israel, cats are considered protected animals on the street, and it is illegal to move them from place to place. This is in contrast to dogs, which are not allowed to roam, and local authorities are required to catch and place them in shelters. In many places, there are cat feeders who take care of them, and the municipality is supposed to carry out spaying and neutering and provide medical treatment. In practice, this does not happen everywhere. SOS Pets Association has a street cat rehabilitation project, where many cats that came from the street and cannot return to it are treated and live in amazing conditions. Some of them are blind, lame, amputee or have other medical issues.
Your centre is exceptional in many astonishing ways. For the unwavering rescue of animals, for the education provided there, for the volunteering that engages children or teenagers with the animal world, for the learning of dog training, and especially for the thought you add—particularly moving —encouraging care for these cats and dogs, to make us better humans. Are you aware that you are waging a battle? A moral battle?
Riki Bessry, who founded S.O.S Pets, is an educator and has worked extensively in this field, including writing educational programs that are implemented in schools and kindergartens. We believe that education is as important as animal rescue, and we encourage children from the age of 8 to volunteer at the association’s adoption days. Volunteering as a foster family, which helps us save lives, is also a very important educational value.
There are also many cases of injured, sick, and neglected dogs and cats. They receive the best possible care as if they were our own pets. We spare no expense, and we also have an amazing group of volunteers called « The Hospital Patrol. » They visit hospitals and veterinary clinics to provide animals with warmth, love, touch, and quality food. The recovery process is both emotional and physical.
The majority of the association’s budget is directed toward veterinary care for dogs and cats, some of which are life-saving treatments.
Since October 7, as indicated on your website, the number of stray or severely distressed dogs is constantly rising? Can you explain what is happening? You have sent volunteers to the southern regions, where animals were kept in cages, in extreme situations; you have rescued 170 dogs from Sderot, Ashkelon, Dimona, Ashdod, Beer Sheva. What exactly was their situation? Were they dogs whose owners had to flee these areas?
Activity after October 7, 2023
In the first months of the war, there was a very high willingness from the public in Israel to help animals, and many people came forward to volunteer and adopt. Thanks to this involvement, the SOS Pets Association saved over 1,100 dogs and cats, primarily from the southern and northern regions. The dogs we rescued were those in military bases and municipal shelters in the conflict zones. Entire shelters were emptied, with many dogs frightened in cages, enduring the sounds of shelling, explosions, and sirens — in places like Sderot, Ashkelon, Tsfat, and more. We carried out numerous rescue operations with the help of our volunteers.
The problem of stray dogs in the south and north of the country was severe even before the war. Since October 7, our amazing soldiers have also rescued dogs from Gaza and Lebanon, and the association continues to help and take in as much as it can.
Currently, there is less willingness to adopt, and we are facing greater difficulty in recruiting foster families and receiving donations. Foster families are a crucial link in the rescue process, as we do not have kennels, and in order to save animals, we need volunteers to host them in their homes.
It has also become harder to raise funds for veterinary treatments due to the overall situation and the public’s desire to help the evacuees, the survivors of the October 7 massacre, and the soldiers.
In the terrible images reported by the assassins on October 7, women, men, children, but also dogs were killed with total sadism. This proves, if more was needed, that the entire land was, on that cursed day, vandalized, tortured, with a will to annihilation that even animals did not escape. All the children, all the species and all the laws of Noah were targeted by a hellish will to annihilation.
And in this world where cruelty is more common than kindness, the survival of the dog is strangely enough depending of an absolute anti-Darwinism behavior. Far from having eaten or surpassed other species of the animal kingdom, they have endured through their immeasurable kindness, their benevolence towards us, their loyalty, their love, their intelligence (which is even used in times of war, like in Gaza). Perhaps it would indeed be just to give them a glimpse of all this wild generosity given without counting, without fear, without shadow.
Your organization is a part of Noah’s Ark. Here are the coordinates to help you. To help us weather the storm. Together.
Your organization’s website :
Facebook page
Instagram page
https://www.facebook.com/sospets1
https://www.instagram.com/sospets
https://www.sospets.co.il/donationen
https://www.facebook.com/sospetsinternational
טלפונים. 03-7441010 ,03-7441111 פקס. 03-7440384 אתר. sospets.co.il
https://www.sospets.co.il/aboutus
________________________________________________
_________________________
— cattan (@sarahcattan_) November 27, 2024
Bravo pour votre belle initiative. On ne peut pas lutter contre la barbarie exercée contre les êtres humains si on ne lutte pas contre celle exercée contre les animaux.
Si j’étais croyant, je verrais autant dans les chats, les écureuils, les chiens, les ânes etc des passerelles entre l’humain et la divinité qu’entre l’humain et la nature.
Que les animaux puissent être capables d’amour et d’empathie, voire à un très haut degré n’est plus à prouver. En ce qui concerne de nombreux êtres humains, par contre, le doute est permis.
Etant très attachée à la cause animale, j’ai trouvé cet article formidable. Bravo pour l’organisation S.O.S.Pets pour tout ce qu’elle fait pour les animaux. Cette association, c’est tout à son honneur de ne pas euthanasier les animaux. Ce sont des êtres vivants et sensibles, ils ont le droit de vivre et on doit les respecter et non les considérer comme des objets. En France de nombreux refuges s’occupent des animaux grâce à des bénévoles et aux dons car il n’y a pas beaucoup d’aide de l’état.La SPA est contrainte parfois d’euthanasier les animaux quand ils sont trop nombreux et qu’ils n’ont plus de place pour les accueillir.La différence avec l’homme, l’animal dans la nature tue pour se nourrir et pour survivre, l’homme détruit et tue pour le plaisir.Je recommande le très beau livre de Boris Cyrulnik, Elisabeth De Fontenay, Peter Singer « les animaux aussi ont des droits », une très bonne analyse, cela donne à réfléchir sur nous-mêmes et notre rapport avec les animaux.D’où mon végétarisme depuis quelques années qui m’a fait prendre conscience et ouvert les yeux sur la cruauté et la maltraitance (abattoirs, tests dans les laboratoires lors d’expérimentations médicales, commerce d’animaux etc).
Le mot « animal » est un mot générique qui veut dire « animé », être disposant d’une « âme », au sens où cette âme était jadis le principe même de la vie (bien avant la biologie moderne chimico-organique). Un animal, c’est donc littéralement un être vivant, un être animé.
Vouloir opposer l’homme et l’animal n’a donc aucun sens, car c’est mettre en opposition l’homme – qui est une espèce animale, homo sapiens – et l’animal – qui n’est pas une espèce, mais un genre groupant souvent dans son emploi trivial, toutes les espèces vivantes qui ne sont pas homo sapiens. Ce terme générique groupe donc des espèces qui n’a pas grand chose à voir l’une avec l’autre : les grands singes et les arbres et les bactéries, etc., sont ainsi tous des « animaux ».
Si l’homme est bien un animal, ce n’est cependant pas à partir de la vie qu’il peut se comparer aux autres vivants – il reste un vivant très ordinaire, un mammifère –, mais à partir du langage et à travers lui de l’ordre symbolique et généalogique que ce langage porte avec lui. Par là, il n’est plus un vivant ordinaire, il trouve même dans le langage un trait distinctif, absolument unique, une différence. Différence qui ne vise pas à le distinguer des autres animaux, mais à lui attribuer une responsabilité, celle d’accueillir le langage et la voix de ceux qui lui parlent et l’ont précédé. Sur ce plan, en effet, l’homme n’a RIEN à voir avec les autres animaux. Il est le sujet du langage. Il ne parle pas pour communiquer, il est parlé, constitué par le langage qui lui donne sa place, et le désigne. Le langage n’est pas un moyen de communication, il est ce qui fait être l’homme et advenir le monde. Homme : écoute, « on » te parle chaque fois que tu parles, et même quand tu bavardes, et même quand tu aboies.
Dès qu’un petit homme naît, il est pris par la langage, soumis à lui, inventé par lui. Un veau tête sa « mère » (métaphore ?) qui le nourrit. Une fois nourri, il n’a plus de « mère » ou de « père » (où est le taureau ?). A la différence d’un enfant qui restera jusqu’à ses derniers jours le fils ou la fille de ses parents, même quand ses parents ne le nourriront plus, ne l’éduqueront plus, et surtout quand ses parents seront morts, réduits post mortem à des souvenirs ou des noms sur des tombes. A des noms ou des mots justement : notre mère, notre père qui êtes aux cieux.
Les zoowokistes, c’est-à-dire les antispécistes qui voudraient faire des animaux des sujets de droit, confondent tout. Les animaux ont des droits parce que nous décidons de leur en conférer, comme pour tout ce qui fait partie du monde humain, mais les animaux ne sont pas sujets de droit, autrement dit les animaux ne sont pas des hommes comme les autres. Dire que les « animaux ont des droits » est donc une généralité qui ne dit rien de l’enjeu philosophique crucial : qu’est-ce qui fonde ces droits ?
Ce qui fonde ces droits, ce sont les hommes en tant qu’ils sont seuls législateurs. Le livre de la Genèse ne dit pas autre chose. La Thora ne verse pas dans le zoowokisme qui est cette dernière illusion qui nous guette, le dernier clou sur notre cercueil. La pierre est sans monde, l’animal est pauvre en monde, l’homme est forgeur de monde. Et Kafka d’écrire dans son Journal : « une cage recherchait un oiseau ». Le langage est notre cage qui nous attend et nous précède. Une cage vide remplie par les enfants qui viennent de naître, à qui, dès l’instant de leur naissance, la mère et le père leur parle et dans laquelle ils les enferment, certains diront, les tiennent prisonniers jusqu’à l’instant de leur propre mort. Parents qui leur parlent la langue de leurs pères et de leurs mères, de leurs parents, de leurs aïeux, laquelle ne nous appartient pas puisque c’est nous qui lui appartenons plutôt. Par la langue que nous parlons, c’est toujours l’Autre qui nous parle et nous parlant, nous désigne et nous donne un état civil. Certains l’appellent Dieu. C’est encore une ressource du langage que de le nommer au moyen de cette métaphore terriblement équivoque.
@Alain Bienaimé « Les animaux ont des droits parce que nous décidons de leur en conférer »…Et alors ? On pourrait également écrire « Les enfants ont des droits parce que nous décidons leur en conférer » ou « Les malades, les infirmes et les personnes âgées ont des droits parce que nous désirons leur en conférer » Certaines sociétés barbares considèrent que les personnes âgées ou les enfants ou les femmes n’ont aucun droit parce qu’elles décident de ne pas leur en conférer. Dans la plupart des pays y compris la France, les autistes n’ont aucun droit ou n’en ont presque aucun parce que la société décide de ne pas leur en conférer. Les Nazis des années 30 et plus généralement les eugenistes allaient plus loin, considérant que les handicapés doivent etre éliminés de manière violente ou plus « démocratique ».
Dire que les « animaux ont des droits parce que c’est nous qui l’avons décidé est un lieu commun hors sujet. J’espère que Paul Mc Cartney, Iggy Pop Brigitte Bardot, Arno Klarsfleld et moi-même (sans même parler des auteurs célèbres tels que Pythagore, Montaigne Voltaire et Hugo) ne sommes pas à vos yeux des « zoowokistes ». Bien à vous.
@Sylvain, Bonjour et merci pour votre commentaire, tous les mots sont bien choisis, je n’ai rien à ajouter de plus. Cordialement.
@Sylvain
Il y aurait beaucoup à dire pour tenter de vous répondre. Vous écrivez que dire que « les animaux ont des droits parce que c’est nous qui l’avons décidé » est un lieu commun hors sujet. Comme j’aimerais que vous ayez raison et que cette opinion soit un lieu commun comme vous l’affirmez. A écouter ce que la plupart de nos contemporains disent en la matière, je ne suis pas sûr que ce soit vraiment le cas. Au contraire. Quant à la prétendre hors sujet, permettez-moi d’en douter. Mais il est vrai que l’autorité de Brigitte Bardot et Arno Klarsfeld dont vous vous prévalez, a de quoi me faire hésiter. Mais je plaisante.
Sur la volonté, tout d’abord. Elle décide du droit, elle le pose, l’impose, s’y soumet, mais elle ne le fait pas, ne l’écrit pas. Le triomphe du nihilisme auquel on assiste de nos jours consiste à dire : je me dois à ce que je veux et, de surcroît, je veux ce que je peux, de sorte que c’est la technique en toute fin qui me dicte ma conduite – mère porteuse, transhumanisme, théorie du genre, etc. – et cela en vue du « meilleur des mondes » (autre référence aussi importante à mes yeux que 1984). Le devoir ne se confond pas avec ce que veut la volonté. Ce qu’on doit respecter, ce n’est pas à la volonté d’en décider mais à l’être ou la nature, peu importe le nom que vous lui donniez. Hans Jonas a su dire des choses bien précieuses sur ce point : il y a nécessité de reconnaître qu’un droit naturel existe qui excède ou échappe à notre volonté, droit naturel qui ne doit pas, en outre, sacraliser l’individu à la façon des « droits de l’homme » moderne, s’il est vrai que l’homme est un animal politique et non un individu, ce que je crois. Poser sa volonté comme seule règle de droit, c’est sombrer tôt ou tard dans le crime : souveraineté inconditionnelle de la volonté générale sous la Terreur ou triomphe de la volonté des nazis, lesquels pouvaient à la fois défendre la vie sauvage et réduire les juifs à l’état de sous-hommes, pour finir par en faire des animaux nuisibles à éliminer physiquement.
Aimer les animaux, ce n’est pas aimer nos semblables, mais les vivants les plus dissemblables de nous, « aloga » disaient les Grecs, non pas dépourvus de « raison » mais de toute identité généalogique, ce qu’on nommait autrefois encore la civilisation (Kultur), quand on n’avait pas peur des grands mots. Au fond c’est cela le logos, ce Nom-du-Père qui est bien autre chose que cette violence patriarcale dont les militantes néo-féministes n’ont de cesse de nous rebattre les oreilles, elles qui oublient qu’un homme est violent envers une femme parce qu’elle est sa femme et non parce qu’elle est une femme.
L’animal, c’est toujours l’Autre, le plus totalement transcendant à l’homme dans cette immanence qui nous est commune, aussi transcendant que Dieu lui-même, pour ceux qui y croient. Relisez la huitième élégie de Duino de Rilke, pour vous en convaincre. Noé ne rassemble pas dans son arche les animaux pour former avec eux une « communauté » nouvelle de tous les vivants, une nouvelle utopie, une nouvelle république, mais parce qu’il est du devoir de l’homme de les sauver quand on sait le péril qui les menace et menace les hommes pareillement. Cela s’appelle la responsabilité, c’est le devoir d’un aîné vis-à-vis de ces « frères d’en-bas ». Et cette responsabilité, je n’attends pas que l’animal en fasse preuve à mon égard en retour, moi, l’être humain, pour l’endosser ou l’assumer. La responsabilité, parce qu’elle est morale, n’est pas affaire de réciprocité, de donnant-donnant, de calcul d’intérêt et de retour sur investissement. Sur cet insondable mystère de l’animal, de ce « monstre » qui montre l’abîme infranchissable qui nous sépare de lui, malgré toutes nos effusions et sympathies à son égard quand nous le regardons dans les yeux, j’aurai toujours en mémoire les pages inoubliables de Karl Philipp Moritz dans « Anton Reiser ».
Merci, cher Sylvain, par vos remarques mêmes un peu acides, de me permettre de préciser mes propos. Il n’est guère d’endroit sur la toile où ce genre d’exercice soit encore possible. Merci à « Tribune juive » de s’en faire l’écho. Partout ailleurs on s’insulte et on s’invective. A l’image de notre Assemblée nationale où il est devenu impossible de débattre, au risque de voir sombrer sous nos yeux la démocratie parlementaire toute entière et d’assister au triomphe du fascisme, par l’œuvre de ceux qui se seront délibérément livrés à un tel sabotage.
@Alain Bienaimé. Bonjour, je ne suis pas du tout d’accord avec votre commentaire. On n’oppose pas l’homme à l’animal, une vie est une vie et on doit respecter cela. Je vous cite, « un veau tête sa mère qui le nourrit, que devient t-il? Sa vie est de courte durée, il est tué après.L’élevage industriel intensif maltraite les animaux en les entassant et en leur infligeant de mauvais traitements afin d’augmenter la productivité. Des milliards d’animaux sont élevés dans des systèmes intensifs, où la priorité est de produire le plus de viande possible, au détriment du bien-être-animal.L’élevage industriel est une abomination. Quant aux fameuses traditions, pour certains la corrida ou on torture des taureaux avant la mise à mort, les chasseurs également par pur sadisme tuent des animaux, tout cela relève de l’inhumanité. Vous mélangez le wokisme et les antispécistes. Le wokisme c’est une idéologie qui cherche à étendre son emprise en particulier dans les universités, les associations culturelles, cinéma, médias etc. Les antispécistes c’est une pensée philosophique qui acorde une considération morale. Ce n’est pas une question de religion mais d’éthique. Je ne suis pas une wokiste comme vous avez l’air de le penser. Il y a d’ailleurs différentes personnalités qui sont sensibles à cette cause, pour les plus célèbres d’entre eux (Albert Schweitzer, Albert Einstein, Jane Goodall, Léonard De Vinci, Pythagore, Ghandi etc. Et pour terminer on peut remplacer la viande ou le poisson par des légumineuses, des haricots rouges, il existe de nombreuses alternatives végétales. C’est aussi pour sa santé, cela protège des maladies cardio vasculaires, du cancer colorectal et bien d’autres maladies. Chacun fait comme il veut selon sa conscience.
@Alain Bienaime
Sophismes. Le wokisme et le neo-féminisme ne luttent nullement contre les inégalités et les injustices : ce sont des faux-nez de l’islamisme et de l’indigénisme : donc anti-féminisme, racisme anti-blancs, antisémitisme, révisionnisme, totalitarisme et idéologie génocidaire à la clef. C’est la barbarie des Talibans et du Hamas (entre autres) mais venant de ceux qui applaudissent et déifient leurs futurs bourreaux ou ceux de leurs futurs enfants. Même leur haine de l’hétérosexualité (sans pour autant, bien sûr, defendre les homosexuels assassinés en Afrique et au Moyen-Orient) va d’ailleurs dans le sens de l’autodestruction. C’est le triomphe des Ténèbres et de Thanatos.
J’ai choisi mon camp depuis très longtemps : celui des Lumières et de la Vie. Or les animaux (qui sont tout à fait capables d’empathie et de bienveillance désintéressée que ce soit vis-à-vis d’animaux d’autres espèces et vis-à-vis ses humains là où beaucoup d’humains en sont tout à fait incapables et je suis malheureusement bien placé pour le savoir) représentent ce deuxième aspect.
Contrairement à une ordure humaine comme Aymeric Cameron dont le seul mérite (bien involontaire et « à l’insu de son plein gré ») est de prouver que beaucoup d’êtres humains (ceux qui lui ressemblent) sont inférieurs aux animaux. Sur les préjugés amenant à nier l’intelligence et la sensibilité animales, je vous renvoie à Montaigne et Voltaire. Mais plus que les philosophes, ce sont certains poètes (ex Baudelaire) qui comprennent le mieux cet Autre transcendent si proche et inaccessible a la fois qu’est l’animal. Nier la sensibilité et je dirais même l' »humanité » animale, c’est une manière de nier notre propre humanité d’humains. BAV
@Sylvain
Vous écrivez en conclusion : « Nier la sensibilité et je dirais même l’ « humanité » animale, c’est une manière de nier notre propre humanité d’humains. »
Je ne le crois pas du tout. Sensibilité et humanité n’ont pas grand chose à voir selon moi. La sensibilité animale, à elle seule, ne suffit pas à fonder l’humanité de l’homme. Le plus insensible des êtres humains – mais nous jouons sur l’équivoque du mot « sensibilité » en disant cela – reste toujours un homme parce que son humanité est d’un tout autre ordre justement, qu’elle se situe sur un autre plan que celui de la souffrance ou du plaisir, des sentiments ou de la sensibilité. Quant à nier l’humanité de l’homme, cela est tout simplement impossible, si l’homme est homme parce qu’il est un homme, c’est-à-dire parce qu’il est spécifiquement sujet du langage. Quand Lévinas parle de Bobby, ce chien du camp où il était retenu prisonnier, comme « du dernier kantien de l’Allemagne nazie », ce n’est pas pour dire ce qu’était vraiment cet animal mais pour dire ce qu’auraient dû être les Allemands de cette époque et dans ces circonstances : des kantiens qu’ils ne furent précisément pas, bien qu’ils prétendaient publiquement qu’ils le fussent.
C’est le rapport au langage, au « logos » et à l’ordre symbolique qui s’exprime à travers lui, qui fait le fondement de l’humanité des hommes. Que l’animal soit Autre, je ne dis pas autre chose. Relisez sur ce point ce que j’ai écrit, s’il vous plaît. L’Autre reste le radicalement différent. Appelez cette transcendance, Dieu ou l’animal, peu importe, c’est selon la direction de votre regard que vous dirigerez soit vers le ciel, soit vers la terre. Le transcendant est toujours l’inaccessible. Seul un homme peut avoir accès à un autre homme, par le biais parfois du truchement et de la traduction, de sorte que cet accès n’est jamais de parfaite entente ou de pure transparence. Mais c’était avec Google et avant qu’on sache parler à l’oreille des chevaux.
Je sais que cette thèse classique que je soutiens n’a pas bonne presse de nos jours après Singer et Derrida. Interrogez-vous pourquoi. Devrais-je en changer si je la crois vraie au motif qu’elle ne vous rend pas populaire dans les diners en ville ? Encore une fois aimer les animaux n’est la preuve de rien, sinon du pouvoir effectif de notre humanité qui seule nous permet d’aimer les animaux. Le chien n’aime pas son maître, il lui est fidèle, il le suit comme Sganarelle suit Dom Juan : pour ses gages. L’homme aime et espère qu’on l’aimera en retour, parfois même il s’en persuadera, mais son chien espère seulement que son maître, simple chien pour lui et comme lui, saura bien le nourrir, le promener ou le protéger. C’est la définition du maître comme « dominus » : l’autorité de la force qui domine et protège, l’autorité du seigneur. Mais chez les hommes, entre les hommes, les vrais maîtres sont des « magisters », des instituteurs : non pas ceux qui vous dominent dans un relation à deux, mais ceux qui vous introduisent dans le monde des idées, dans le trésor de la civilisation, qui vous présente à un tiers et qui tirent leur autorité de qu’ils vous y ont précédé.
Quand vous écrivez que ne pas aimer les bêtes serait le signe de notre inhumanité, c’est, permettez-moi de vous le dire, un lieu commun tout juste digne de figurer dans les publications de « 30 millions d’amis ». Même les pires criminels nazis, dans les camps d’extermination où ils sévissaient, une fois rentrés chez eux, après une longue journée de travail harassante, devaient caresser et sortir leur chien comme tout propriétaire d’animaux. Leur amour des animaux n’était pas la cause qui les rendait hommes ou humains, qui les empêchaient d’être des criminels de la pire espèce, de celle qui tue avec cette bonne conscience d’avoir raison ou de faire son devoir. Socrate l’avait déjà dit dans un mot saisissant de profondeur : « nul n’est méchant volontairement ». Leur humanité, leur caractère d’homme venait plutôt de ce qu’ils passaient leur temps à assassiner des êtres humains dont ils cherchaient à effacer aussi le NOM de la surface de la terre en plus de faire disparaître leur corps, avec bonne conscience, en agents laborieux du bien : leur humanité, je dis bien, car une telle occupation criminelle ne peut être que le propre de l’homme et vient confirmer l’humanité du criminel qui en fait sa mission. Et pensez qu’en disant cela je ne cherche aucune excuse au criminel, comme il est d’usage chez les avocats de gauche qui avancent souvent un tel argument pour défendre les canailles de la pire espèce. Au contraire. Même quand vous effacez un nom, il restera toujours la trace de ce nom effacé, par quoi, malgré vous, dans cette tentative de nier l’humanité de l’autre, jusque dans l’oubli de son nom, l’autre déjà réduit à un simple numéro tatoué sur l’avant-bras, vous restez encore un homme, précisément un criminel, par le sens symbolique que vous donner à ce crime : anéantir avec les meilleures raisons du monde. Et voilà qu’un vertige nous saisit : si le criminel est cet homme qui assassine un autre homme en niant son humanité par l’acte même de l’assassiner, de le faire disparaître, de l’anéantir, en revanche un animal se contente de dévorer sa proie pour manger et survivre. Tuer n’est pas assassiner : chez l’animal, il y a une totale innocence dans l’acte même de tuer, aucune perversion sadique, aucune cruauté, aucune certitude d’être un justicier. C’est le besoin de survivre qui commande et non une quelconque intention donnant portée métaphysique à son crime. Dostoïevski avait dit tout cela si bien. En bref, il ne veut pas tuer. N’est-ce pas la preuve que nous sommes précisément dans un monde qui n’a rien à voir avec celui des hommes ? Désignez-moi des criminels chez les animaux en dépit de tous ces singuliers procès de la fin du Moyen Âge où l’on condamnait et pendait des cochons afin que ce châtiment serve d’exemple à ses congénères. Étranges procès quand même dans lesquels l’homme de Moyen Âge pouvait se figurer l’animal, un homme comme les autres. Un autre temps auquel le zoowokiste nous renvoie.
Les nazis étaient des hommes qui assassinaient d’autres hommes et leur amour des chiens, chats, canaris et autres espèces à plumes ou à poils n’y changeait rien. Car le crime, tout crime, je le redis, a une portée ontologique et ce n’est pas l’amour de quoi que ce soit ou de qui que ce soit qui l’empêche : ni l’amour des animaux, ni celui de Bach ou de Goethe. Et pire encore : il y a des crimes commis par amour ou au nom de l’amour. Ainsi les crimes nazis commis par l’amour pour le peuple allemand, c’est-à-dire : au nom de…. L’amour n’interdit pas la haine, hélas, ni la peur. En revanche, il n’y a pas de crimes commis au nom de la loi quand celle-ci nous commande impérativement : « tu ne tueras point ». Comme tout notre monde moderne christianisé vous placez votre espérance dans l’amour de l’humanité servi par l’amour des animaux, au motif que l’amour ne se divise pas, qu’il est un. Qui n’aime pas les bêtes, n’aime pas les gens, à ce que clame la sagesse des nations. C’est une belle espérance, mais que les faits viennent très souvent contredire. Car en admettant qu’il soit indivisible, l’amour n’est jamais exclusif. Au contraire de la loi.
Je ne pense pas vous avoir convaincu. Peu importe dans le fond n’ayant pas l’âme d’un militant ou d’un missionnaire. J’habite une chapelle où les fidèles se font de plus en plus rares. Mais choisit-on vraiment son Église sinon celles qu’on sait ne pas pouvoir fréquenter ?
En attendant portez-vous bien, cher Sylvain, puisqu’il n’y a plus que ça à pouvoir se souhaiter dans un monde qui se porte si mal, et avant Noël, cette période de l’année où les animaux ne sont pas à la fête.
Vous dites : « Le chien n’aime pas son maître »…En vous basant sur quoi ??? Certains chiens, oui, s’ils ne sont pas traités avec amour par les maîtres en question. Mais en quoi le fait que les animaux (je parle ici des animaux intelligents, notamment des mammifères) soient moins intelligents prouve-t-il qu’ils ne puissent ressentir de l’amour ou de l’empathie ? En réalité, les études comportementalistes menées sur de nombreuses espèces ont montré quelles sont tout à fait capables de ressentir de l’empathie et d’agir de manière totalement désintéressée : par exemple, certains animaux sauvent la vie d’un animal d’une autre espèce, alors qu’ils le rencontrent par hasard et n’ont aucun bénéfice à en tirer. Ou la vie d’êtres humains. En outre, chaque chien, chat, singe, etc a sa propre personnalité et certains individus d’une même espèce sont plus intelligents ou/et empathiques que d’autres. L’empathie et l’amour sont peut-être (je dis bien peut-être) une specificite du monde mammifère mais pas du monde humain. Lorsque l’homme oublie qu’il est aussi un animal et veut faire l’ange (ce que l’on observe aussi bien chez de nombreux wokistes ou révolutionnaires athées que chez des fanatiques religieux), il se deshumanise et s’abaisse en dessous du monde animal.
@Sylvain
Vous écrivez : « En réalité, les études comportementalistes menées sur de nombreuses espèces ont montré quelles sont tout à fait capables de ressentir de l’empathie et d’agir de manière totalement désintéressée. »
Décidément, cher Sylvain, nous ne parlons pas du tout de la même chose même si nous employons la même langue. Cela tourne un peu « au dialogue des sourds » comme on dit. Vous n’avez de cesse, en effet, de me rappeler ce que les animaux et nous, les humains, avons en commun : l’intelligence, la sensibilité, le pouvoir d’empathie, etc. Je ne le conteste pas, puisque l’homme est un animal. Qui pourrait en douter ? « Mais pas que », comme on dit dans le français approximatif qu’on parle à la radio.
Il ne s’agit pas, selon moi, de sentir, d’avoir plus ou moins conscience de soi, mais de comprendre que l’homme et lui seul est un SUJET. Qu’il est soumis à quelque chose qui le FAIT homme. Et il faut vraiment être un mélenchonien endurci pour se faire un titre de gloire en proclamant qu’il serait un INSOUMIS, un rebelle. On a raison de se révolter ? Voire.
Soumission donc. Ou sujétion. Les musulmans répondent avec quelque argument : c’est la soumission qui apporte la paix (Islam / Salam). Mais pour cela il faut croire en Dieu, nommer l’Autre, auquel on est soumis, dont on se pense le serviteur, l’appeler Dieu. Je ne vais pas aussi loin. L’Autre, pour moi, plus structurellement, c’est l’ordre symbolique comme dirait l’autre, l’ordre généalogique, en un mot le langage. Le langage que nous parlons à la condition qu’on nous ait parlé au préalable. Cela fait, croyez-moi, une toute petite différence. C’est même lui, l’Autre, l’objet, si l’on y songe, de la prière qu’on lui adresse toujours. Et avant de demander à l’Autre quelque chose, de le prier de me répondre, de m’exaucer, il faut savoir se taire et l’écouter. Faire silence et écouter, lui qui nous parle et qui vient de loin, qui noue toute une histoire, porte une tradition, assure une fidélité. Écoute, Israël… C’est là une forme d’ascèse, vous en conviendrez, à une époque où tout le monde bavarde et déblatère, et oublie la caractère sacré, intouchable du langage. Vous connaissez sans doute la lettre que Scholem adresse à Franz Rosenzweig, quand se pose la question pour les Juifs en Israël de reparler l’hébreu, de faire de l’hébreu biblique ce qui deviendra l’hébreu moderne.
Le biais de éthologues sur la question est de penser la vie, le vivant, l’animal à partir de ce qu’ils observent. De sorte que par ce biais, qui est le biais de toute science expérimentale ou d’observation par définition, on arrive toujours à la même conclusion : les hommes et les autres espèces vivantes se ressemblent à s’y méprendre, vues du dehors. C’est au mieux une question de degré si l’on tient à les distinguer. L’animal est bien un homme comme les autres. Ils observent et induisent sans hésiter : les bêtes parlent (confondant langage et moyen de communication), elles échangent, elles raisonnent, elles transmettent, elles travaillent, elles jugent, elles ont des « enfants », elles agissent de manière désintéressée (hélas ! pauvres bêtes ! quand il faut plutôt agir pour la loi, pour l’intérêt de la loi, comme le rappelle Kant), etc.
En somme, selon eux, les bêtes disposent toutes d’une culture en tout point semblable à celle des hommes, à quelques degré près. Mais les éthologues ne prennent pas en compte ce qu’ils n’observent pas, ce qui est absent dans le « monde » animal, plus justement dans le milieu où ils vivent : les tombes, mon cher Sylvain, comme le faisait remarquer le philosophe Alain dans un Propos du 25 novembre 1935, dont je vous rapporte ce passage. « Encore moins voit-on les bêtes devant un tombeau fait de pierres amoncelées ; et pourtant il n’est pas difficile de faire un tombeau. Mais l’ancêtre est oublié dès qu’il est mort. On le recommence sans penser jamais à lui. Or, si la pensée n’est pas le pouvoir de penser à ce qui n’est plus, est-elle pensée ? Et cette société des bêtes, qui n’est que de présence est-elle société ? ». Pour moi, l’essentiel est dit. Les animaux saisissent ce qui se présente à eux, nous saisissons ce qui est absent, ce qui s’absente dans ce qui est présent. Un philosophe allemand, plus très à la mode ces derniers temps (ce qui est bon signe), appelait cela la vérité, l’alêtheia.
Quand nous en irons-nous où vous êtes, colombes !
Où sont les enfants morts et les printemps enfuis,
Et tous les chers amours dont nous sommes les tombes,
Et toutes les clartés dont nous sommes les nuits ?
A vous, très cordialement.
@Alain bienaime Bonjour. Nos échanges semblent être caractérisés par un malentendu ou une incompréhension mutuelle. Vous caricaturez mon propos, lequel est beaucoup plus nuancé que la lecture que vous semblez en faire.
Je n’ignore pas que l’on peut aimer les animaux et être un monstre, une ordure, et des Nazis à Aymeric Camron, les exemples ne manquent pas.
Je n’ai jamais non plus prétendu que les animaux et les êtres humains sont identiques en terme d’intelligence ou de libre arbitre, donc sur un plan moral. Non pas que les animaux soient tous dépourvus de libre arbitre (puisque le fait que dans certaines espèces des animaux viennent en aide à des animaux d’autres espèces d’une manière totalement désintéressée implique une forme de libre arbitre) mais celui des êtres humains qui ont en outre le pouvoir d’agir sur l’ensemble du monde animal et de lanature est beaucoup plus développé. Cette différence morale est d’ailleurs à mon sens un argument majeur en faveur de la protection animale car si l’être humain dispose d’un libre arbitre aussi important il a le devoir moral d’en user à bon escient et d’une manière bienveillante : c’est cette supériorité humaine en terme de capacités cognitives, créatives et de libre arbitre qui lui donne un devoir moral envers les animaux doués de sentiments et les autres êtres humains. (*) Par ailleurs, cela n’implique pas nécessairement le végétarisme, et moi-même, je ne suis pas végétarien.
Parmi les points que vous avez émis, le seul que je récuse est l’idee qu’un animal ne peut pas aimer un être humain : cette affirmation n’est pas logique et est contredite par les faits, même si bien évidemment le terme amour se décline sous plusieurs formes. Mais pour le reste, je ne contredis pas l’essentiel de votre propos. Le problème, c’est que visiblement vous m’attribuez des idées qui ne sont pas les miennes.
Je ne suis nullement un relativiste.
Bien à vous.
(*) position défendue à la fois par le boudhisme, le judaïsme, le christianisme et certains philosophes athées. Et que je rejoins dans les grandes lignes.