Charles Rojzman. George Orwell en 1941 avait saisi toute la cruauté de ce dilemme qui est celui des israéliens et qui sera peut-être le nôtre dans les temps prochains

Gaza : ce type de guerre où des combattants sans uniformes militaires se fondent dans la population civile est très coûteux en termes de destructions et de victimes, aussi bien parmi les civils que parmi les combattants des deux côtés.

La coalition qui comprenait la France a rasé pratiquement Mossoul et Raqqa et fait des dizaines de milliers de morts parmi la population civile, en voulant éradiquer l’état islamique.

Les autres guerres de ce type dans la région ont fait et font bien plus de victimes qu’à Gaza. Toutes les victimes, en particulier d’enfants, doivent été déplorées et pleurées mais il ne faut pas céder à la pression des propagandes qui diabolisent uniquement l’état d’Israël et son armée qui prend bien plus de précautions pour épargner la population que les russes, les américains ou même des armées arabes confrontées à ce type de guerre dite asymétrique.

Déjà George Orwell en 1941 avait saisi toute la cruauté de ce dilemme qui est celui des israéliens et qui sera peut-être le nôtre dans les temps prochains :

“Le seul choix qui s’offre apparemment à nous, c’est de réduire en poussière les maisons, faire éclater les entrailles des hommes et déchiqueter des corps d’enfants avec des explosifs, ou bien de nous laisser réduire en esclavage par des gens à qui ce genre d’activité répugne moins qu’à nous. Jusqu’ici, personne n’a proposé de solution pratique pour échapper à ce dilemme. […]

Un certain pacifisme a fait le lit du fascisme. C’est la force qui l’a abattu. La force n’est pas le fascisme. Elle est un passage obligé du combat au contraire de la soumission. Parfois les ressources du dialogue pacifique et de la coopération sont dépassées par l’état mental de l’adversaire. Il ne reste que l’usage de la force qui peut paraître brutale., qui l’est certainement mais qui seule peut le faire reculer ou capituler. […]

L’idée qu’on puisse avoir raison de la violence en s’y soumettant n’est rien d’autre qu’une vue de l’esprit. Comme je l’ai déjà dit, elle ne peut être soutenue que par des gens que l’argent et les canons protègent de la réalité. Mais pourquoi, au fait, ces gens-là se complaisent-ils dans les vues de l’esprit ?

Parce que, détestant, à juste titre, la violence, ils ne veulent pas comprendre que celle-ci est partie intégrante du monde moderne et que leurs beaux sentiments comme leurs nobles attitudes ne sont que le fruit d’une injustice soutenue par la force. Ils ne veulent pas savoir d’où ils tirent leurs revenus.

Derrière tout cela, il y a une dure réalité que beaucoup de gens craignent de regarder en face, à savoir que le salut individuel n’est pas possible, que la plupart du temps l’être humain doit faire un choix, non pas entre le bien et le mal, mais entre deux maux. Vous pouvez laisser les nazis régenter le monde, c’est un mal. Vous pouvez aussi les en empêcher par la guerre, c’est un autre mal. Il ne vous est pas offert d’autre choix, et quel que soit celui que vous fassiez, vous ne garderez pas les mains propres. Il me semble que la parole adaptée à notre temps n’est pas “Malheur à celui par qui le mal arrive” mais plutôt celle qui a inspiré le titre de cet article : “Il n’est pas un homme juste, non, pas un”. Nous avons tous trempé nos mains dans la poix, nous périrons par l’épée. Nous n’avons même pas la possibilité, en un temps comme le nôtre, de dire : “Demain, nous pourrons tous nous montrer vertueux”. C’est de la poudre aux yeux. La seule possibilité qui nous est offerte, c’est de choisir le moindre mal et de travailler à la construction d’une société où la rectitude morale sera à nouveau possible”.

George Orwell, Revue “Adelphi”, octobre 1941

© Charles Rojzman

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