Daniel Sarfati. J’ai suivi l’enterrement d’un poète

J’ai suivi l’enterrement d’un poète.

Yonatan Geffen a été inhumé cette semaine, à Nahalal, le moshav où il est né en 1947.

« Je suis plus vieux que l’Etat d’Israël, mais il me semble que je me porte mieux que lui. », avait-il ironisé quand on l’interrogeait sur son cancer.

Une cérémonie laïque.

Les femmes et les hommes autour du cercueil se tenaient la main.

Yonatan ne croyait pas en Dieu.

Toute l’assemblée avait la tête couverte, le soleil tapait dur. Une kippa, un foulard ça protège.

Un membre du moshav a récité des prières.

Le fils de Yonatan, le chanteur punk Aviv Geffen a prononcé le Kaddish.

Sa sœur, la cinéaste Shira Geffen en teeshirt noir portant un slogan pour la démocratie, a dit un poème liturgique.

Sur cette terre d’Israël, Dieu s’invite sans avoir été convié.

Yonatan Geffen était un pacifiste, pour une solution juste et négociée avec ses voisins arabes, ceux du village proche de son moshav, avec qui il jouait enfant.

Il avait fait la guerre des Six-Jours, dans une unité combattante de parachutistes.

« Je ne pouvais pas faire moins. » disait-il.

Son oncle était le légendaire Moshe Dayan.

A son retour de la guerre, il écrit un poème qui va devenir une chanson emblématique.

״ה נסיך הקטן מפלוגה ב״

Le Petit Prince de l’escadron B.

L’histoire d’un soldat perdu dans les sables du désert. Qui n’a pas eu le temps de dessiner un mouton. Tombé au combat, dans le silence absolu, les dunes ont étouffé le bruit d’un corps qui tombe.

La terre jetée sur le cercueil en bois blanc, fait à peine plus de bruit.

L’écrivain Etgar Keret, mari de Shira Geffen, a voulu lire un texte, une de ses histoires ironiques et absurdes dont il a le secret. Les démêlés de Yonatan avec son téléphone portable. Il n’a pas pu finir, la voix brisée par l’émotion.

Yonatan Geffen, le Petit Prince de la poésie hébraïque, est parti dans son monde.

Que son souvenir soit une bénédiction.

© Daniel Sarfati

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