Yves Lusson. Affaire Tissier-Coquerel : et si l’agression était politique ?

Si l’affaire Coquerel-Tissier a créé son onde de choc médiatique, c’est qu’elle touche au cœur de la blessure de notre monde politique. Et ça fait très mal.

Pendant que les féministes crient aux comportements sexistes et patriarcaux, et que les autres trouvent que les premières exagèrent – « On a quand même le droit de draguer et de danser le rock en mettant ses mains à la taille de sa partenaire ! » -, nous sentons bien le malaise. La souffrance de Sophie Tissier nous saute à la figure. Et la tentative du « Circulez y a rien à voir » d’Eric Coquerel lui-même dans sa tribune du JDD nous laisse sur notre faim. Notre faim de comprendre : pourquoi est-on si mal ?

Bien sûr, Eric Coquerel est bien trop intelligent pour se laisser aller à la faiblesse de l’agression sexuelle, ni même de « l’agression psychique » pour reprendre ses propres termes. Alors quoi ?

Drapée dans son féminisme militant, Sophie Tissier invoque les violences faites aux femmes dans des environnements patriarcaux dont profiteraient des « hommes prédateurs ». Autrement dit, il y aurait une fois de plus les victimes – des femmes – et de l’autre les bourreaux – des hommes -, dans l’éternelle guerre des sexes.

L’analyse vaut d’être entendue et débattue.

J’en propose une un peu différente.

Les faits

Sophie Tissier l’a bien expliqué. L’histoire se déroule en 2014. Fraichement débarquée à l’université d’été du Parti de Gauche de Mélenchon, dont Eric Coquerel est l’un des principaux dirigeants, elle s’est vue promettre une intervention à la tribune, pour défendre son combat pour les intermittents du spectacle.

Entre-temps a lieu la fameuse soirée, et les désormais tristement célèbres « avances lourdes et insistantes » du (sous-)chef envers la nouvelle venue.

Sophie repousse encore et encore les avances d’Eric Coquerel et ne cache pas sa colère devant tant d’insistance, jusqu’à subir les sms de fin de soirée pour l’attirer dans sa chambre d’hôtel. Rendue hypersensible à ce type de comportement du fait des violences dont elle a été victime dans son adolescence, elle est touchée là où ça lui fait le plus mal : dans son intégrité d’être humain. Pour couronner le tout, elle sera privée de sa tribune le lendemain, elle qui avait « traversé la France à ses frais, avec ses maigres économies de chômeuse ». Y aurait-il dans le parti une ligne jaune qu’on ne dépasse pas : refuser les « faveurs » du prince ?

Alors c’est vrai, Sophie Tissier ne semble pas vraiment avoir été victime d’une agression sexuelle caractérisée, ni même d’une agression psychique. « Plusieurs rédactions ont mené des enquêtes journalistiques, rien n’est jamais sorti faute d’avoir trouvé un témoignage pouvant s’apparenter à un comportement délictuel, à fortiori criminel » a tenté de se défendre Eric Coquerel lui-même dans le JDD, avouant presque entre les lignes que ses tentations assumées de queutard n’étaient pas répréhensibles par la loi. Non, a priori non.

Agression politique

Le malaise est ailleurs. Il est dans la réalité selon laquelle Sophie Tissier a été victime d’une AGRESSION POLITIQUE. Le temps d’une soirée, elle était devenue le énième objet de l’appétit illimité d’un pouvoir absolu, mais elle, contrairement à tant d’autres, elle fut rejetée du corps abusif – le parti – qui manifestement n’avait pas pu ou su la digérer, l’asservir par la soumission (sexuelle) du chef. Elle était le caillou dans la chaussure, le grain de sable dans la machine à engloutir.

Cette agression politique porte un autre nom : c’est la dérive totalitaire. Car lorsqu’un parti en arrive à de tels rituels, c’est que la liberté de pouvoir défendre la dignité a définitivement quitté le navire.

Alors vous me direz, le pouvoir et le sexe ont toujours fait bon ménage. Inutile d’énumérer les politiciens connus pour leur appétence et leur abandon de toute moralité en la matière, et ce, par delà le sexe des protagonistes. Depuis que les femmes ont pris du pouvoir, on se doute bien que certaines d’entre elles ne se gênent plus non plus pour consommer du jeune mâle sans limite d’âge. Plus le totalitarisme gagne du terrain, plus l’abus de pouvoir devient absolu et inarrêtable : plus personne n’ose arrêter les chefs dans leurs folies obsessionnelles dès lors que plus personne n’a la sécurité suffisante pour s’y opposer fermement ou les stopper sans risquer l’excommunication. Plus la démocratie perd du terrain, plus le turn-over bat son plein dans les partis : celles et ceux qui refusent de passer sur le gril n’ont d’autre choix que de quitter le navire, et de ravaler par la même leur rêve d’engagement politique de premier plan. Au revoir les naïfs et les doux-rêveurs. Ne demeurent dans le parti que les soumis aux chefs, dont on imagine bien le peu de compétences démocratiques au fil du temps.

Retrouver la puissance

Comment sortir de ce cercle vicieux ?

Je propose la piste selon laquelle le monde politique retrouvera son humanité dès lors qu’il retrouvera sa pleine puissance. Car s’il se pervertit dans son impuissance, si ses combats ne sont plus qu’à la marge, illusoires, dérisoires, cosmétiques, idéologiquement bien-pensants, ne répondant plus à la réalité de la souffrance d’un peuple français privé de ses libertés fondamentales, de sa sécurité et de sa dignité, alors le pouvoir courra à sa perte. Il ne retrouvera son honneur et sa gloire que lorsqu’il retrouvera sa vraie puissance, sa juste puissance, qu’il viendra puiser dans une véritable vie démocratique, restaurée, retrouvée, réinventée, accompagnée par des savoir-faire et être, dans des cadres qui en garantiront sa sécurité et celle de tous ses participants.

Sans cela, il y aura à jamais aux manettes tous ces impuissants de pacotille, qui, pour tenter d’oublier leur condition d’impuissants, s’accrocheront à des puissances de substitution, éphémères, égotiques, abusives, tristes et pathétiques.

Indignes d’un peuple qui attend aujourd’hui tout autre chose de ses élites.  

© Yves Lusson 

Yves Lusson, journaliste social et intervenant en Thérapie sociale TST, est l’auteur de la notion de Cellules réconviviales

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1 Comment

  1. Si tous ces collabos islamophiles pouvaient s’entretuer, la société ne s’en porterait pas plus mal.

    D’une manière générale (à de rares exceptions près), la classe politique et journalistique mériterait que le peuple descende dans la rue

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