Pass vaccinal et philosophie du droit, par Gilles Falavigna

Agnès Buzyn, Ministre de la santé, avait été désignée première responsable et coupable de la gestion de la crise covid début 2020. Conflit d’intérêts, mensonge, négligence ou légèreté, elle subissait une déferlante de haine.

René Girard est un des grands analystes du « bouc-émissaire » dans le cadre du mimétisme de la violence. Il explique qu’il s’agit d’une force qui dépasse la raison. Elle produit le coupable nécessaire à calmer le destin. La violence inhérente à la société a besoin d’une soupape de sécurité comme une cocotte-minute pour ne pas exploser.

Le principe du bouc-émissaire ne se positionne pas sur le principe de l’innocence ou de la culpabilité. Le seul intérêt au niveau de l’efficacité du sacrifice est de voir le sacrifié se sentir coupable. Ironie du sort, la Ministre de la santé avait engagé son office avec ambition : « Nous avons envie de lutter contre les inégalités de destin. » expliquait-elle en arrivant à « Ségur » qui devenait Ministère des solidarités. Janvier 2022, Agnès Buzyn est promue dans l’ordre de la légion d’honneur.

L’impulsion donnée par le Président Macron à la gestion de la crise sanitaire aura été le « quoi qu’il en coûte ! » A cent jours de l’élection présidentielle, qui va payer ?

 La vengeance, car il est question de cela, avait son temple à Rome comme divinité poliade. C’est Martis ultoris. C’est le temple créé par Octave pour valoriser la vengeance en finalité sociale. C’est la source de la spécificité judéo-chrétienne du bouc-émissaire, hors de la Bible. Mars est le dieu de la guerre et « Jupiter » l’avait annoncé : nous sommes en guerre.

Le pire est à  venir. L’Homme est le plus grand des prédateurs, croit-il. Il croit même pouvoir vaincre un virus. L’Homme se venge car il est un loup pour l’Homme. Il est également un mouton.  l’Homme est anatociste. Il prélève plus de laine au mouton que celui-ci ne peut produire.

L’Homme est un mouton de Droit. C’est un paradoxe des plus intéressants pour imaginer la suite.

Le variant Omicron au virus Covid est de moins en moins dangereux. Jour après jour, le vaccin, porte-étendard de la politique sanitaire affiche ses faiblesses. Les autorités reconnaissent que le vaccin n’empêche pas d’attraper le virus, n’empêche pas de le transmettre. Mais il est mis en place un passe vaccinal dont la finalité déclarée est d’empêcher de l’attraper et de le transmettre avec ce même vaccin. Si la fin justifie les moyens, quelle est véritablement la finalité ?

L’année 2021 a été l’année de la vaccination. L’année 2021 a été l’année de rapports haineux entre provax et antivax, dénominations caricaturales qui témoignent d’une volonté consciente ou inconsciente à cette opposition.

En Israël, fer de lance de la politique vaccinale, les débats sont également houleux. Mais il y a débat. Le Pr Cyrille Cohen, membre du conseil consultatif sur les vaccin, admet des erreurs de gestion. Qui n’en aurait pas fait ? Pour lui, le passeport vert n’a plus de pertinence.

Le gouvernement français reste arc-bouté sur le principe du « quoi qu’il en coûte ». La santé publique est de la politique. Elle devrait l’être au sens noble. Il semble qu’elle soit un outil politique pré-électoral. Pourtant, la vie politique israélienne est autrement plus chaotique en ce moment. Le prétexte de l’urgence sanitaire n’est donc pas recevable.

Officiellement, plus de 80 % des Français sont vaccinés. Si le Président Macron veut « emmerder » les non-vaccinés, ces 80 % lui donnent la légitimité de le faire. La nature humaine a un besoin vital de conformisme. Il n’y a donc aucun hasard ni aucune spontanéité au choix des mots.

La loi de transformation de pass sanitaire en vaccinal est étudiée au conseil constitutionnel pour maints recours.

De nombreux points ont été relatés par la presse. L’approche de culpabilisation des non-vaccinés a été focalisée sur le confort et l’égoïsme des « réfractaires ». C’est un peu plus complexe si on considère l’exemple, parmi d’autres, d’un père à l’agonie à l’hôpital qu’on ne peut revoir. Mais la raison d’État, par nature, ne fait pas preuve de compassion.

Un phénomène subséquent est peu relaté. Le Ministère de l’intérieur a fait état de 200.000 faux pass sanitaires identifiés. Les observateurs conviennent que 200.000 cas identifiés signifient un minimum d’1 million de faux. Il faut être déconnecté des réalités sociales pour n’y voir que l’envie d’un restaurant et d’un ciné.

La loi sur le pass vaccinal tient compte des usurpateurs. Ce sera 3 ans de prison pour les contrevenants. La loi introduit la notion de repentir pour les détenteurs de faux pass qui voudraient échapper aux sanctions. Les personnes en seront libérées si elles se vaccinent dans les 30 jours. La loi, si elle est validée par le conseil constitutionnel sera également rétroactive.

Le statut de repenti, en France, date de 2004. L’article 132-78 du code pénal dispose que la personne est exempte de peine si elle permet d’identifier ses complices. Que la délation soit mise à l’honneur peut se comprendre dans l’esprit de logique et de conformité qui fait qu’Agnès Buzyn est élevée au rang de chevalier de la Légion d’Honneur. Il reste que l’État de droit repose sur le principe de non-rétroactivité des lois. Nous pourrons désormais être condamnés pour un crime qui n’existait pas au moment des faits.

La loi est la loi. Elle doit être respectée. Nous devons nous y plier. Mais quand elle est mauvaise, elle doit être changée.

Le maître mot, durant cette crise, aura été que le coupable est le virus. Jamais la politique sanitaire menée n’est concernée. Cette loi autorise que les « réfractaires » à ce qui n’était qu’une recommandation, puisque le Président et le gouvernement affirmaient que jamais la vaccination ne sera obligatoire, soient les coupables et poursuivis à ce titre. Ils font office de bouc-émissaires. Responsable mais non-coupable, pouvait dire un premier ministre en d’autres temps. Le peuple n’a plus cette dignité car que la loi soit validée ou rejetée par le Conseil Constitutionnel, elle a été votée par les élus du peuple. Il est sacrifié.

Le principe du bouc-émissaire est donc un moyen de conjurer le sort, quand l’homme n’a pas de prise sur son destin. Il est de plus en plus évident que l’étude de la sortie du pass vaccinal est déjà examinée avant l’application de la loi. Tout ça pour ça ? C’est d’autant plus affligeant.

Gilles FALAVIGNA

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