Israël est au centre d’un nouvel ordre international de sécurité

Une alliance qui s’étend des États-Unis à l’Inde en passant par l’Europe est en train d’émerger pour lutter contre les acteurs hostiles ou Etats-Voyous du Moyen-Orient.

Par Seth J. Frantzman15 novembre 2021 18 h 47

L’USS Portland quitte Eilat, Israël, le 5 novembre.PHOTO : DEVIN KATES/US NAVY

Jérusalem

Cascade d’exercices communs avec des pays lointains

L’Iran n’aurait pas pu se réjouir de voir des forces de Bahreïn, d’Israël, des Émirats arabes unis et de la marine américaine s’entraîner ensemble pour la première fois de l’histoire. L’exercice de cinq jours, la semaine dernière, en mer Rouge visait à améliorer l’interopérabilité entre les pays, mais a également envoyé un message fort à Téhéran : il existe désormais un grand bloc organisé de pays opposés à ses ambitions d’hégémonie régionale. Le lien de ce bloc est Israël.

Les accords d’Abraham, qu’Israël, les Émirats arabes unis et Bahreïn ont signés en septembre 2020, ont ouvert la voie à l’exercice conjoint de la semaine dernière. Depuis la guerre froide, Israël fait partie de la zone de responsabilité du Commandement européen des États-Unis plutôt que de celle du Commandement central, qui s’étend de l’Égypte au Kazakhstan. Bien qu’il soit géographiquement plus logique qu’Israël soit inclus dans Centcom, cela aurait contrarié les nombreux pays de cette zone de responsabilité qui, jusqu’à récemment, ne reconnaissaient pas Israël. Si les forces du Centcom s’entraînaient avec Israël, de nombreux autres alliés régionaux auraient refusé de mener des exercices conjoints. Les accords d’Abraham ont modifié le paysage géopolitique. En janvier, les États-Unis ont annoncé qu’Israël deviendrait une partie de la zone de responsabilité de Centcom, ce qui permettrait aux États-Unis d’organiser plus facilement des exercices militaires conjoints en Israël.

Marines et commandos israéliens au coude à coude

La semaine dernière, j’ai parlé avec le major Shai Shachar, 33 ans, commandant en charge de la branche de guerre de l‘école d’élite antiterroriste d’Israël. Il faisait partie d’une autre formation conjointe récente avec environ 500 Marines américains. Après être arrivées début novembre à Eilat, une ville du sud d’Israël sur la mer Rouge, les forces américaines se sont rendues dans un endroit appelé “petit Gaza”[au sein de la base de Tze’elim] dans le désert du Néguev pour s’entraîner avec des commandos israéliens. Ils ont pratiqué des tactiques du champ de bataille urbain et même des combats souterrains, dans lesquels les Israéliens sont des experts, ayant combattu les terroristes du Hamas dans les villes et les tunnels de Gaza.

Pour les Israéliens qui y .ont participé, l’échange de connaissances avec les Marines américains a été une expérience unique. M. Shachar a déclaré que les soldats américains avaient une méthodologie de combat et une approche de résolution de problèmes remarquablement similaires à celles des commandos israéliens. Il s’attend à voir plus de formation à l’avenir.

L’expert qui entraîne les alliés

Des troupes du monde entier sont venues en Israël cette année pour s’entraîner. Le mois dernier, des unités de l’armée de l’air de France, d’Allemagne, de Grèce, d’Inde, d’Italie, du Royaume-Uni et des États-Unis ont volé lors de l’exercice biennal Pavillon bleu [Blue Flag] au-dessus d’Israël. L’exercice de cette année a inclus le plus grand nombre de pays depuis son début en 2013. En juillet, Israël a accueilli des opérateurs de drones américains, britanniques et allemands. Le mois précédent, Israël, le Royaume-Uni et les États-Unis ont fait voler ensemble des F-35 dans le cadre de l’exercice Tri-Lightning. En mars, Chypre et la France ont rejoint pour la première fois l’exercice naval Noble Dina dirigé par Israël au large de la côte ouest de Chypre.

Ces exercices ne visent pas seulement à renforcer l’expertise militaire de chaque pays, mais à construire un nouveau système d’alliance qui s’étend de l’Inde à l’Europe, avec Israël comme pivot. Israël fait face à des menaces quotidiennes de la part des terroristes, des combats à Gaza en mai à ses fréquentes frappes aériennes en Syrie contre les livraisons d’armes iraniennes au Hezbollah. Les unités militaires qui s’entraînent avec les forces israéliennes acquièrent une réelle expertise au combat et signalent que Jérusalem a des alliés de plus en plus actifs pour faire face aux menaces potentielles dans la région. Cette diplomatie militaire tisse une alliance qui relie des pays plus éloignés comme l‘Inde ou l’Allemagne à travers des partenaires régionaux comme les Émirats arabes unis et Bahreïn ou Chypre et la Grèce.

La France réintégrée autrement, malgré le couac australien

Cela permet également de combler une variété de controverses en matière de politique étrangère. Cela inclut des querelles récentes telles que la colère de la France face à son exclusion d’un nouvel accord sur les sous-marins signé par l’Australie, le Royaume-Uni et les États-Unis, ainsi que la distance diplomatique de longue date des pays du Moyen-Orient avec Israël. Il y a encore quelques années, il aurait été impensable que le chef de l’aviation des Émirats arabes unis visite Israël ou des entreprises israéliennes pour présenter de nouvelles coopérations et technologies au salon aéronautique de Dubaï. Les accords d’Abraham ont changé tout cela.

Ces nouvelles collaborations ont de nombreuses utilisations potentielles, de la lutte contre les groupes terroristes à la vérification des tentatives de l’Iran de contrôler la région. Là où les acteurs belligérants affrontaient autrefois une série de pays isolés, ils vont maintenant devoir se mêler à une alliance organisée qui a l’intention de s’opposer à eux, même sur le champ de bataille.

M. Frantzman est correspondant au Moyen-Orient pour le Jerusalem Post et auteur de « Drone Wars : Pioneers, Killing Machines, Artificial Intelligence and the Battle for the Future » (Bombardier 2021).

wsj.com

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