PTAH. Confinement ou Pause salvatrice

« Tout le malheur des hommes vient de ne savoir pas demeurer en repos, dans une chambre. » Blaise Pascal

« N’ayez pas peur de passer du temps avec vous-même » Albert Camus 

« Celui dont le désir se détourne des choses extérieures parvient au siège de l’âme » C. Jung

« On n’a jamais envie de solitude mais on en a souvent besoin » PTAH

« Si vous vous ennuyez avec vous-même, c’est que vous n’êtes pas en bonne compagnie » PTAH

J’entends et je lis çà et là que « les gens », jeunes, moins jeunes et personnes âgées, sont tous contrariés, fatigués, voire nerveusement épuisés et psychologiquement affectés par ces 14 mois d’enfermement et de paralysie totale qui ont lourdement impacté plus ou moins durement et durablement toutes les populations touchées par cette pandémie mondiale.

Certes toutes les catégories et couches sociales ne sont pas affectées de la même manière, certains souffrent plus que d’autres de leurs conditions de vie, au niveau de leurs logements et de leurs conditions de leurs hébergements, de leur emploi ou de leur non-emploi, mais surtout il y aurait un mal profond, une souffrance insidieuse, qui frapperaient plus ou moins toutes les catégories confondues.

Ils reviennent souvent ces mots autour de nous, nous entendons tous cette petite musique qui est fredonnée par les personnes que nous croisons, que nous lisons, avec qui nous échangeons mais aussi par notre propre petite musique interne qui nous murmure à l’oreille : « Je souffre de ce temps qui passe, de ce temps perdu qui me passe sur la tête, qui me traverse et n’imprime rien dans mon esprit mais laisse des traces sur mon corps, Je souffre de cette lancinante sensation d’avoir perdu plus d’une année entière de mon existence, Oui j’ai la sensation d’avoir perdu une année de ma vie, une année inutile, oui, inutile et surtout vide, vide de tout, d’amour, de sens et d’amitiés. Une année difficile à tout point de vue, une année de grandes souffrances intérieures, de ruptures avec moi-même et avec les autres, une année d’isolement forcé, une année passée seul même entouré des miens »

Pour ma part, je rajouterai que cette année qui fut une année de solitude imposée n’est en rien une année de perdue :  bien au contraire, elle fut une année de pause imposée mais de pause salutaire, une année de joies libres et égoïstes, une année de réflexion et d’introspection.

On a été obligé de se poser, de s’enfermer, de s’isoler, on a été obligé d’arrêter de courir, de voyager loin, d’aller chercher ailleurs ce que l’on ne trouvait pas à nos pieds, de se perdre en sorties futiles, en divertissements mercantiles, en magasinage inutile, de repenser en ces fins de longues soirées entourées qui nous laissent parfois un goût amer vide, ou silencieux et où il nous semblait être ailleurs, en rencontres fortuites sans avenir, en repas prévus ou imprévus et puis regrettés avec ce goût d’avoir perdu notre temps… Ce temps qui nous manque tant et dont nous disposons largement aujourd’hui, surtout par obligation.

Avec le temps, on n’oublie rien, encore moins nos amours, nos morts, le temps qui passe, notre nostalgie, nos souvenirs, nos regrets et notre propre finitude.

Pour Pascal notre malheur viendrait de ne plus savoir rester seul au repos et en inactivité. L’inactivité, la pire des situations culpabilisantes pour les autres, s’entendre reprocher, « Tu ne fais rien mais tu perds ton temps, là, bouge-toi, sors, cours, fais quelque chose »

Qu’est-ce qui expliquerait donc que nous ne savons pas ou plus rester au calme, au repos, seul avec nous-même, face à nous-même, qu’est-ce qui fait donc que cette solitude imposée nous pèse autant, qu’elle nous culpabilise, qu’elle nous angoisse tant et nous fait peur ?

Alors que ce confinement imposé est la seule solution à cette pandémie, la réponse ne serait-elle pas simplement que nous vivons plus intensément ce mal qui nous ronge tous, à savoir cette situation où seuls, nous nous retrouvons face à nous-mêmes, à nos angoisses, notre stress permanent et que nous prenons encore plus intensément conscience de notre fragilité et de nos peurs face à notre finitude inéluctable ?

Cette période de pause obligée, si fragile et inquiétante, devrait pourtant nous pousser à prendre du temps, prendre notre temps, et rejeter l’idée angoissante de le perdre à ne rien faire. Cette parenthèse nous invite à mieux réfléchir au sens même de nos existences, des actions que nous mettons en œuvre, elle nous invite à repenser nos projets, à œuvrer à rééquilibrer nos existences, à maîtriser nos angoisses, à prioriser nos désirs et nos relations aux autres, familles et amis.

Elle nous impose de faire le ménage dans nos armoires, nos tiroirs mais aussi dans nos mémoires et de nous débarrasser de tout ce qui était ostentatoire, accessoire, provisoire, contradictoire, aléatoire, illusoire et dérisoire dans nos histoires.

Cette période, elle est une invitation salutaire à nous projeter dans un futur certes de plus ne plus incertain et qui nous conduit vers notre fin, ce futur qu’il nous faut affronter et regarder en face pour enfin nous apaiser et vivre. 

Ce confinement est aussi un sevrage imposé : il est difficile pour tous, à nous de tout mettre en œuvre pour qu’il nous permette de mieux contrôler nos angoisses existentielles, de comprendre nos profondes inquiétudes, d’éviter nos passions tristes, il nous invite à nous libérer des échappées divertissantes que nous nous imposons, il doit nous permettre de faire front, d’apprendre à résister, à choisir notre route, à décider par nous-même, et à contrôler encore plus nos destins, à faire ami-ami avec notre fatum.

Nous remettons tout toujours à demain par manque de temps, ce temps que nous ne prenons pas pour nous poser, nous reconstruire, à nous apprivoiser et cimenter notre unité.

Chacun de nous devra se livrer à cet exercice complexe, qui est celui de trouver en nous le remède à cette angoisse existentielle, nous recentrer, nous rééduquer, réapprendre à vivre à notre rythme, aller vers plus de profondeur, réfléchir à demain, et pourquoi pas philosopher, lire, nous instruire, écrire, et partager nos découvertes avec nos proches, familles et amis et surtout penser à Demain, se préparer et anticiper le retour à la Vie d’Avant, à la vie normale, retour qui lui aussi sera une épreuve qu’il nous faudra tous affronter.

© PTAH

Fils d’Alexandrie, Jérusalem, Athènes, Rome et des Lumières

Avril 2021

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1 Comment

  1. Cher Ptah,
    Est-ce l’épidémie qui a engendré le confinement ou le confinement de notre pensée qui a créé l’épidémie ?
    Il y a un lien certain entre les deux, mais nous ne savons pas qui a commencé. Un lien n’est pas une cause. Nous sommes confrontés au mystère de l’origine.
    En attendant, oui ; soit y en a marre et c’est raté ; soit nous faisons quelque chose de ce temps que nous sommes obligés de nous donner. Personnellement, je navigue entre les deux positions. Pour le “y en a marre”, je n’échappe pas à ma condition humaine. J’investi le reste dans la solitude et le silence.
    Quel renversement : au lieu de savoir prendre un impossible temps, nous voilà avec les difficultés d’accepter de recevoir le temps.
    Mais qu’est-il ?

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