Nathalie Bianco. 2 minutes, pas plus, pour Philippe, chauffeur de bus battu à mort, ou Mélanie, Gendarme fauchée par un dealer

Le cercueil de Mélanie Lemet, 9 juillet, Mérignac

Quelques mots. 2 minutes au journal de 20 h. Pas plus.
Pas de genou à terre, pas de peoples mobilisés, pas de tribunes dans les journaux, pas de lettre ouverte publiée dans Libération, pas de fresques sur les murs.

A peine quelques mots pour Philippe, ce chauffeur de bus, battu à mort pour avoir demandé à des passagers de mettre leurs masques.
Quelques mots, c’est très peu…

C’est à peine plus que pour Mélanie, la jeune gendarme fauchée par un dealer multirécidiviste. La jeune fille n’aura pas droit aux envolées lyriques de Christiane Taubira, qui, dans une déclaration enflammée à Assa Traoré, voulait « capturer un bataillon de vers à soie, pour recoudre juste un petit bout de son cœur brisé ».

Mélanie, engagée pour servir son pays, championne de judo et appréciée de tous ne deviendra pas une icône, ne fera pas les couvertures des Inrocks et du Monde.
Et des mots, on n’en a pas entendu beaucoup non plus pour s’émouvoir du sort de ce jeune homme de 23 ans, poignardé la semaine dernière à Sarcelles par un délinquant qui sortait de prison grâce aux mesures de clémences suite au Covid19. Il s’appelait Thomas je crois. Il a déjà été oublié. Il n’y aura pas sur Twitter de #générationThomas

Des “incivilités”, entend-on

Pourtant, c’est important les mots. Ça fait mal parfois. Comme quand le ministre des transports se rend à Bayonne suite à cette atroce affaire du conducteur de bus et évoque simplement des « incivilités ».
C’est important les mots. Ça fait mal parfois, mais il faut bien les choisir pour « ne pas heurter la sensibilité » de ceux qu’ils désignent. Par exemple, Il ne faut pas parler de « racailles » pour désigner ces milices de petits caïds barbares ultra-violents qui font régner la terreur partout.
On pourrait dire que c’est un mot populaire, pas terrible et pas très sympathique, mais infiniment moins effrayant que la réalité qu’il désigne. Mais il parait que c’est un mot de droite, voire d’extrême-droite… Les millions de français excédés, de toutes origines et de toutes générations, qui veulent simplement vivre en paix, sortir, aller travailler, prendre le bus, le métro, marcher dans la rue, se tenir la main, se rouler des pelles, boire en terrasse, refuser une cigarette sans risquer de se faire agresser sont ravis d’apprendre qu’ils appartiennent à une prétendue « fachosphère » dont ils se foutent pourtant complètement.

Les mots confiqués aux “Blancs dominants, ces Oppresseurs des racisés”


Mais c’est ainsi. On nous somme d’adopter sans broncher des mots et des concepts importés des USA, on devient des « dominants qui doivent checker leurs white privilège, on est complices d’oppressions systémiques envers des racisés » et dans le même temps, on nous confisque les nôtres, de mots.
Et pourtant, on en aurait tellement à dire. Des mots simples, pleins de rages et de douleur. Des mots qui viennent du ventre, du cœur, des mots qui restent coincés dans la gorge, des mots qui sourdent, qui montent, qui gonflent comme une colère trop longtemps contenue.
Des mots qui hurlent notre révolte face à cet ensauvagement de notre quotidien, face à la violence qui nous ensevelit chaque jour un peu plus dans les ténèbres d’une société malade. Des mots qui réclament juste de la justice, de la sécurité, moins de complaisance, de laxisme pour nous et pour nos enfants.
On a plein de mots et de verbes pour exprimer ce qu’on vit, pour dire qu’on se fait piétiner, humilier, racketter, agresser, violenter, frapper, violer, torturer, tuer, égorger, lyncher, assassiner, massacrer.
Mais il paraît que ce ne sont pas les bons mots. Ou alors, on ne les dit pas comme il faut.
Il y a toujours des gens qui viennent nous expliquer comment on doit gérer notre peine, notre écœurement. Il y a toujours des gens qui viennent nous demander de ne pas pleurer trop fort, d’exprimer notre colère en termes choisis, d’y aller mollo sur la révolte, de filtrer, de relativiser, d’aseptiser. Ces mêmes gens qui font eux le choix délibéré du silence ou du chuchotement gêné,  alors qu’ils sont d’autres fois si prompts à se mettre en scène en train de hurler avec les loups.
Il parait que les mots précèdent les actes.
Il va bien falloir entendre aussi les nôtres alors…

Nathalie Bianco

Nathalie Bianco est auteur et essayiste

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13 Comments

  1. Les gouvernants ont choisi leur camp .La réaction doit venir du peuple occupé à préparer les vacances. Sincères condoléances aux familles des victimes ,seules à souffrir de la bêtise humaine.

  2. Une chose est sûre la famille Traoré à du applaudir et faire la fête à l’annonce de la mort de cette femme gendarme ! Pour cette famille ça ne fait que 3 blancs en moins !

  3. Analyse si juste apparament nous n aurons pas de fresque de rue
    Il est vrai que nous sommes le peuple colonial et raciste de petits blancs
    Mes parents n ont eu que 3 enfants et nous eduques dans le respect

    • Mes parents d’origine Algérienne, arrivés à la fin des années 70 ont eu 7 enfants. Nous ne comptons pas de délinquants dans notre famille et nous avons été éduqués dans le respect de notre religion, des lois de la République et des autres. Nous avons tous poursuivi des études et nous sommes tous salariés. Nous n’avons jamais eu affaire à la justice. Que quelques brebis (très) galeuses ne soient pas représentatives dans vos esprits de la majorité des enfants d’immigrés qui vivent paisiblement et qui déplorent, au même titre que les français de souche, le climat dans lequel nous vivons actuellement. Nous ne voulons que la PAIX et la justice doit s’appliquer à TOUS. Mélanie et Philippe sont morts dans l’exercice de leurs fonctions et je comprends la colère et l’injustice que ressentent une majorité de français. Le traitement médiatique et politique des ces drames ne font qu’accentuer la haine entre les différentes communautés. Quel dommage !

  4. Le gouvernement n’a pas tous le pouvoir. Il suffit de bien voté au prochaine élections, il faut que les français ce réveil il y en a marre de cette injustices.Ces bizarre on entend plus les chanteurs et comédien tous ces donneur de leçons qui ne paye pas leurs impôts en France. On les entends pas là pourquoi ? A oui les victimes sont françaises et blanche tue par des personnes qui ne s’intègrera jamais. On ne née pas raciste on nous pousse à le devenir.

  5. En effet ça commence à faire beaucoup !!!! Jusqu’à quand allons nous supporter ce climat médiatique et manipulateur,d’une presse aux ordres qui tend à minimiser cette violence criminelle venant d’une certaine population dont l’intégration est pure illusion ….

  6. Il ne faut pas tout mélanger, la mort de n’importe quel homme est toujours difficile ,malheureusement se sont ses politiciens qui mènent la danse,nous dansons avec les loups malheureusement, nous sommes tous responsables de cette haine,nous faisons rien quand ils se servent dans les pays d’Afrique, ils volent le pains des autres pour mieux nourrir les citoyens, immigrés, noirs,bougnouls des mots qui ont toujours existés et poussés à la haine, les immigrés ne sont pas tous des criminels,quand ils viennent dans les pays européens c’est tout simplement se système de pillage qui ne leurs laisse pas le choix, ,ils n’y a plus de repère , les gens sont devenu fou,ils tuent pour un oui pour un non et cela profite au politique,moi j’appelle tout ses criminels ,les sbires du pouvoir…Car les vrais criminels sont ces gens qui nous gouvernent et qui dans le monde entier font des ravages,car ils ont soifent de pouvoir et d’argent….Condolience a la famille du chauffeur ,je suis triste pour eux…et ses criminels ne survivront que dans la tourmente,honte a eux..

  7. Si t’es pas juif, arabe, noir, homo etc les médias s’en battent. Bienvenue dans le monde d’aujourd’hui qui réagit et twitt dans la minute s’il y a un mot de travers. Bon courage à nos enfants, monde aseptisé de merde.

  8. L’article de Nathalie Bianco est on ne peut plus explicite pour décrire la fracture sociale survenue en France. Espérons que le nouveau gouvernement – dont le Premier Ministre Jean Castex et le Ministre de l’Intérieur Gerald Darmanin – saura s’en inspirer pour y remédier.

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