La pendue de l'aéroport d'Istanbul, par Pascale Davidovicz

La mort mystérieuse de deux membres d’une ONG

en Irak et en Turquie en moins de six mois.

PAGE FACEBOOK DE JACKY SUTTON
PAGE FACEBOOK DE JACKY SUTTON

Une chercheuse britannique

retrouvée pendue dans les toilettes

de l’aéroport d’Istanbul.

Jacqueline Sutton, 50 ans, travaillait pour l’ONG IWPR Institut for War and Peace Reporting en Irak.
Elle a été découverte pendue avec des lacets de chaussures samedi 17 octobre dans les toilettes de l’aéroport d’Istanbul où, en provenance de Londres, elle était en transit pour Erbil dans le Kurdistan irakien.
« Les circonstances de sa mort ne sont pas claires et nous essayons d’établir les faits » a fait savoir son employeur.
Le directeur exécutif de l’institut, Anthony Borden, a demandé l’ouverture d’une enquête « ouverte et transparente ».

S’est-elle réellement suicidée ?

Jacqueline Sutton  avait travaillé comme journaliste pour le service international de la BBC entre 1998 et 2000, avant d’effectuer différentes missions pour les Nations unies, notamment en Afghanistan, en Iran, à Gaza et en Irak.
Depuis, elle était la directrice pour l’Irak de l’IWPR qui aide les journalistes dans les zones de guerre.
Elle était l’une des meilleures professionnelles en matière de développement travaillant sur l’Irak et avait consacré près de dix ans de sa vie à aider le pays et à lutter contre l’extrémisme qui menaçait le pays auquel elle était attachée, a déclaré l’ONG.
Elle faisait une thèse sur le développement international au Centre d’études arabes et islamiques de l’Australian National University.
Le directeur du centre, Amin Saukal, a déclaré au journal The Guardian être «profondément attristé et choqué par la mort tragique de l’une de nos étudiantes en thèse les plus brillantes».
Ses collègues la décrivent comme quelqu’un de nature positive, passionnée par son travail et motivée pour passer son doctorat à l’université australienne.
Selon les journaux britanniques The Guardian et The Daily Telegraph les circonstances de sa mort sont suspectes et difficiles à expliquer.
Sudipto Mukerjee, du programme des Nations unies pour le développement, a écrit sur Twitter «avoir beaucoup de mal à croire que ma collègue […] s’est suicidée».

Une version officielle absurde.

La sécurité turque indique qu’elle aurait raté son avion pour le Kurdistan irakien et qu’elle se serait suicidée parce qu’elle n’aurait pas eu assez d’argent pour acheter un nouveau billet.
Si tout le monde se suicidait quand il a raté une correspondance, il y aurait beaucoup de morts dans les aéroports !
Anthony Borden, le directeur exécutif de l’ONG, conteste la version officielle des autorités turques et déclare  que « Ce problème d’argent était inconcevable. On est régulièrement amené à payer de nouveaux billets d’avion en cas de retard »,
Il précise qu’il n’est même pas sûr que Jacqueline Sutton portait des lacets.
Comme par hasard, les caméras de sécurité de l’aéroport qui auraient pu saisir quelque chose des locaux concernés ne fonctionnaient apparemment pas lors des faits.

Son prédécesseur assassiné en Irak.

C’est le second décès d’un membre de cette même ONG en moins de six mois.

Le prédécesseur de Jacqueline Sutton, Ammar al-Shahbander, a été tué dans un attentat à la voiture piégée à Bagdad le 2 mai 2015.
Jacqueline Sutton s’était rendue à Londres pour assister à une cérémonie religieuse en sa mémoire aux côtés de sa famille.

A qui profite le crime ?

Le président du parlement irakien, Salim al-Juburi a « appelé les autorités turques à faire toute la lumière sur les circonstances de cet incident »
« Elle est morte dans des circonstances mystérieuses dans un aéroport turc alors qu’elle se rendait en Irak, où elle devait se rendre pour aider ce pays »
On connaît la position turque sur le sort des kurdes qui se battent contre Daesh et la création d’un Kurdistan indépendant.

Doute ou intimidation ?

Le journal The Guardian révèle que l’employeur et les proches de Jacqueline Sutton qui ne croyaient pas à la thèse du suicide et avaient rejeté les conclusions de l’enquête officielle sont brusquement revenus sur leurs déclarations mercredi dernier.
Elle aurait agi seule.
« Après avoir consulté un compte-rendu complet fourni par les autorités turques, la famille de Jacky Sutton et IWPR en sont venus à la conclusion qu’aucun autre parti n’avait été impliqué dans sa mort. »
Ils attendraient les résultats d’une enquête indépendante.

A qui le tour ?

Un jeune militant syrien Ibrahim Abdelkader et un de ses amis Farès Hamadi hostiles à Daesh ont été retrouvés décapités vendredi dernier dans le sud de la Turquie a annoncé le groupe « Raqqa est massacré en silence ».
Les deux jeunes seraient des journalistes.
La Turquie d’Erdogan ne fait pas que fermer les yeux sur le passage des djihadistes, elle muselle l’opposition.
Deux chaînes de télévision opposées au régime viennent d’être prises d’assaut et fermées à l’aube des élections législatives.
Mais Recep Tayyip Erdogan répète régulièrement que la presse de son pays est « la plus libre du monde ».
Les membres des ONG aussi ?
Pascale Davidovicz
Sources : europe1.fr – lemonde.fr – rtl.fr – letemps.ch – leparisien.fr – lepoint.fr
 
 
 
 
 
 

Suivez-nous et partagez

RSS
Twitter
Visit Us
Follow Me

Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*