A Gaza, les rôles s’inversent, par Maxime Pérez

Trois mois après l’opération « Bordure protectrice », les responsables israéliens viennent d’accepter un plan de reconstruction du territoire palestinien, sous supervision onusienne. Et laisse l’Égypte asphyxier le Hamas.

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© PHOTO AFP MAHMUD HAMS

Il fut un temps, pas si lointain, où Israël occupait l’axe de Philadelphie, cette étroite bande de terre séparant Gaza de l’Egypte. 13 km de long sur 20 mètres de large que Tsahal consentit à abandonner, en août 2005, ultime étape du plan de retrait d’Ariel Sharon. 750 gardes-frontière égyptiens y prirent place, emboitant le pas à la remilitarisation progressive du Sinaï. Leur mission était alors de limiter au maximum les activités de contrebande d’armes du Hamas, qui n’était alors qu’une puissante milice dans l’ombre du Fatah.
La suite est connue. En dépit des avertissements du renseignement militaire israélien (Aman), l’Egypte de Moubarak a brillé par son laxisme, ne se doutant pas que les passeurs bédouins alliés du Hamas allaient bientôt se retourner contre son pouvoir. Et le Hamas contre l’Autorité palestinienne. Des tonnes d’armes, de munitions, d’explosifs et des milliers de roquettes vont être stockés dans la péninsule du Sinaï avant de transiter par les tunnels de Rafah pour remplir les nombreuses caches des factions palestiniennes. Ces dix dernières années, cet arsenal a autant servi à harceler les forces de Tsahal que les localités du sud d’Israël, devenues des havres de guerre. Il a justifié une demi-douzaine d’opérations militaires, dont la dernière en date, « Bordure protectrice », n’a aucunement rétabli la force de dissuasion israélienne.

NOUVELLE DONNE

A l’approche de 2015, la réalité sur le terrain est peut être en train de changer radicalement. Non pas qu’Israël ait décidé de renverser les islamistes du Hamas, mais au contraire, c’est l’Egypte qui mène la vie dure au mouvement radical palestinien dont le choix de la lutte armée, même altérée par l’exercice du pouvoir à Gaza, n’a rien apporté aux revendications palestiniennes. Le Hamas qui, il y a encore quelques semaines promettait à Israël une énième escalade s’il n’obtenait pas la construction d’un port et d’un aéroport à Gaza, se voit étouffer menacé par l’esprit militaire du président-général Abdel Fattah al-Sissi. L’actuel maître de l’Égypte n’est pas Hosni Moubarak. Il assume allégrement l’accord de paix avec l’État hébreu, ou plutôt l’alliance stratégique qui se dessine depuis deux ans avec ce dernier au nom de la stabilité du Sinaï et de son rejet de l’idéologie des Frères musulmans, dont le Hamas est l’avatar gazaoui.

800 MAISONS

PALESTINIENNES RASÉES

La semaine dernière, les bulldozers égyptiens ont achevé d’aplanir une zone-tampon le long de l’axe de Philadelphie. Sur 500 mètres de profondeur, près de 800 maisons palestiniennes ont été réduites à un tas de gravats. Désormais, l’armée égyptienne s’apprête à creuser un canal de plusieurs dizaines de mètres de profondeur pour empêcher la restauration des tunnels, dont plusieurs centaines ont été récemment détruits à l’explosif. Avec le blocus maritime et aérien imposé par Israël, il sera compliqué pour le Hamas de restaurer la puissance de feu qu’il avait constitué jusqu’à la guerre de cet été.
Nul doute que l’Autorité palestinienne, humiliée à Gaza en juin 2006, observe avec satisfaction l’inexorable affaiblissement du Hamas. Son président, Mahmoud Abbas, en est même complice par son silence. De son côté, Israël ne peut que se féliciter de cette prise en main sécuritaire pour le moins inattendu de l’Egypte. Le pays des pyramides reste encore vacillant après avoir connu, coup sur coup, un « Printemps arabe » et un « hiver islamiste », mais il ambitionne de retrouver son influence diplomatique au Moyen-Orient et surtout, au sein de la Ligue arabe. A Gaza, au moment des négociations sur un cessez-le-feu, il est parvenu a écarter la Turquie et le Qatar du jeu diplomatique, privant le Hamas d’une stature internationale qui aurait bien embarrassé Israël.
Maxime Pérez
M PEREZ

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