À Salonique, une communauté en voie de disparition, par André Mamou

Thessalonique, vous la connaissez mieux sous le nom de Salonique, c’est la seconde ville de Grèce, au Nord Est,  avec un port de commerce très important et une activité commerciale soutenue.
Parfois, la ville se présente comme un fouillis de petites rues en pente et ensuite elle finit en places et en avenues imposantes. Des palais et des églises byzantines immenses, des cafés, des marchands de légumes et de fruits et partout des fleurs et des plantes pleines d’odeurs légères ou entêtantes.salonique_4
Il y avait une communauté juive de plus de cinquante mille personnes à Salonique:  bourgeois, artisans, commerçants, ils  avaient édifié des dizaines de synagogues, de dispensaires, d’hôpitaux, de belles villas et des immeubles de grande beauté et même une usine à pains azymes. Ils avaient créé l’artisanat, le commerce et la banque et fait basculer une cité balnéaire dans la modernité. Ils avaient été chassés d’Espagne et s’étaient éparpillés en Afrique du Nord, en Italie, en Bulgarie avant d’être bien accueillis par l’Empire Ottoman puis de s’établir en Grèce au fond de la Mer Egée .
En 1943, deux divisions allemandes sont arrivées pour exterminer ceux qui devaient l’être : les juifs qu’on obligea à se regrouper dans les places, à se dévêtir et à faire de la gymnastique jusqu’à l’évanouissement puis on les embarqua dans des trains  qui s’arrêtaient à Auschwitz Birkenau.

Synagogue de Salonique
Synagogue de Salonique

Il reste mille juifs à Salonique et 6 mois par an, un rabbin vient d’Israël prêter main forte à celui qui est en poste. Il nous a reçu avec beaucoup de gentillesse, expliqué sans embarras que le parti grec Aube Dorée qui a obtenu 17% des voix est anti juif mais que les gens qui ont voté pour lui ne le sont pas. Ce n’était qu’un vote de mécontentement. Il nous a dit que cela s’arrangerait et il agitait ses mains comme pour pétrir une pâte trop molle.”Et L’Aliah ?” Il a concédé que tous y pensaient, que les plus courageux et les plus jeunes partaient et que d’autres se fixaient des objectifs.

La Tribune Juive De Saloniquesalonique_1

À quelques rues de la synagogue, le Jewish Museum of Thessaloniki  est installé dans un bel immeuble du siècle précédent .Il est ouvert quelques heures par jour, quelques jours par semaine. Deux employées bienveillantes vous accueillent et vous demandent de payer le droit d’entrée : deux euros. Puis elles vous laissent déambuler dans les trois étages : photos, tableaux, gravures, objets, habits .il y avait un magazine à Salonique et nous avons lu avec beaucoup de fierté que son titre était : “La Tribune juive de Grèce”.salonique_2
Tous ces visages couleur sépia avec moustaches imposantes, ces habits noirs, les montres à gousset, Stora, Modiano, Mallah, les noms de famille des familles disparues étouffées par le gaz et calcinées par les Sonderkommandos… tout s’insinue en vous, vous crispe les mâchoires et fait cligner les paupières.
C’étaient des gens très bien, les juifs de Salonique : instruits, cultivés, intelligents, une communauté qui avait apporté à sa  ville prospérité et célébrité.
Comme les juifs d’Alexandrie, de Vilna, de Tunis, comme les juifs de partout : dispersés puis  réunis, trouvant par leur courage et leur obstination le chemin de la réussite, suscitant partout la jalousie et l’envie irrépressible, en se servant des braises de la haine, de s’emparer de leurs biens.
André Mamou

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