Entretien avec Nicolas Cadène, Rapporteur Général de l’Observatoire de la Laïcité

L’Observatoire de la Laïcité est une instance rattachée au Premier Ministre ayant pour objectif de l’assister lorsqu’il s’agit de faire respecter les principes liés à la laïcité. Le gouvernement actuel, très attachée à cette valeur considérée comme primordiale dans une société démocratique, souhaite désormais inscrire la laïcité comme un instrument de tolérance et d’union visant promouvoir le « vivre ensemble ». Asif Arif a rencontré, pour Cultures & Croyances, le Rapporteur Général de l’Observatoire, Nicolas Cadène.

Nicolas Cadène
Nicolas Cadène

La laïcité est une variable constante dans le débat politique français. Les dernières utilisations de ce concept concernaient le voile au sein des entreprises et le voile au sein des universités. Pensez-vous qu’il s’agit de vrais débats ?
Cela dépend. Ces débats doivent être abordés de façon objective et dépassionnée. Dans l’entreprise privée, le port de signes religieux peut connaître des restrictions mais uniquement si cela est justifié pour des raisons de sécurité, d’hygiène, d’aptitude à la mission ou de bonne marche de la société. Dans les universités, à ce jour, nous n’avons pas de remontés, ni des universités ni de l’administration, nous faisant part de réelles difficultés ou de conflits qui découleraient du port du foulard. La polémique de cet été suite à la publication d’un rapport qui, en réalité, n’avait rien d’officiel, montre à quel point le sujet est sensible.
On entend souvent des positions qui sont justifiées par la laïcité mais qui cache un anticléricalisme profond voire même, dans certains cas, du racisme. L’Observatoire a-t-il pour mission de porter à la connaissance du pouvoir exécutif les positions « laïques extrêmes » ?
L’observatoire a notamment pour mission de remettre aux autorités un rapport annuel faisant un point sur l’état de la laïcité en France. Un des objectifs qui nous a été assigné par le Président de la République est de rappeler à quel point la laïcité est une des conditions essentielles du vivre ensemble. La laïcité n’exclut pas, elle rassemble. De fait, elle est parfois instrumentalisée politiquement. C’est pourquoi nous devons rappeler sans cesse ce qu’est réellement la laïcité. À savoir, la liberté de croire ou de ne pas croire, et de l’exprimer dans les limites de l’ordre public et de la liberté d’autrui.
On voit aujourd’hui un mouvement qui multiplie les organes permettant d’observer un fait religieux ou encore la création de certains collectifs contre des pratiques racistes. Ne pensez-vous pas que l’Observatoire de la laïcité va connaître des difficultés pour trouver sa place ?
L’observatoire de la laïcité est le seul organisme officiel, rattaché au Premier ministre, qui au niveau national puisse rendre des avis au Président de la République et au Premier ministre sur toutes les questions qui touchent à la laïcité. Nous sommes consultés par les ministres dès que nécessaire et nous pouvons nous auto-saisir. Cela étant, nous sommes bien entendu à l’écoute des nombreux organismes travaillant sur tout sujet attenant. 
On parle assez peu du Bureau Central des Cultes qui est l’interlocuteur privilégié des cultes au sein de la République Française. Comment le rôle de l’Observatoire s’agence-t-il avec celui du Bureau Central ? En d’autres termes, y a-t-il une communication entre les organes ?
Oui. Nos missions ne sont pas les mêmes mais bien entendu, nous sommes en lien étroit. Le Président de l’Observatoire a déjà échangé à plusieurs reprises avec le ministre de l’Intérieur, dont dépend le Bureau Central des Cultes. Le chef de ce dernier participe très régulièrement aux séances de l’Observatoire. 
Enfin, comment l’Observatoire va-t-il tenter de concilier la balance des libertés individuelles avec le principe de la laïcité ?
Il n’y a aucune opposition entre laïcité et libertés individuelles. La laïcité, c’est d’abord la liberté de croire ou de ne pas croire et de pratiquer son culte. La seule limite est le respect de l’ordre public et de la liberté d’autrui. La neutralité de l’Etat, qu’induit le principe de laïcité, c’est la garantie de son impartialité vis-à-vis de tous les usagers des services publics. Dans les entreprises privées, la question du fait religieux est simplement à concilier avec ses intérêts vitaux et les règles de sécurité et d’hygiène. Il s’agit donc de rester fidèle au principe de laïcité tel qu’il a été pensé dès son origine.
*Nicolas Cadène, 32 ans, est Rapporteur général de l’Observatoire de la laïcité, nommé en avril 2013 par le Premier ministre. Auparavant il a été successivement chargé de mission au sein de la commission nationale du débat publique, conseiller parlementaire au Sénat et à l’Assemblée nationale, et conseiller ministériel. Depuis de nombreuses années, il est par ailleurs bénévole au sein de différentes ONG et est engagé dans la vie locale nîmoise.  
Cultures & Croyances remercie tout particulièrement Nicolas Cadène pour la qualité de son accueil.
Nicolas Cadène, « Entretien avec Nicolas Cadène, Rapporteur Général auprès de l’Observatoire de la Laïcité, propos recueillis par Asif Arif, in http://www.cultures-et-croyances.com/interview-entretien-avec-nicolas-cadne-rapporteur-gnral-de-lobservatoire-de-la-lacit/

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