« Les racines indispensables pour les ailes ». Par Liliane Messika

Dogma.lu – ISSN 2726-6818 | DOI.ORG/10.46805/DOGMA

« On ne peut donner que deux choses à ses enfants », dit un proverbe juif : « des racines et des ailes ».

De fait, il existe autour du tronc de chaque arbre une « zone racinaire structurelle », qui garantit la stabilité de l’arbre. Elle est égale à une fois et demie la couronne, c’est-à-dire le volume du feuillage. 

S’il arrive un accident aux racines, l’arbre n’a plus d’équilibre et risque de chuter sous le poids de la couronne. 

C’est pareil pour l’individu qui, sans l’ancre de son passé, ne sait plus où il habite. 

Les arbres se développent au prorata de leurs racines. L’Homme aussi.

Après avoir découvert le feu, la roue et le moteur, l’Homme a fait le tour de sa planète, puis il a tenté l’aventure spatiale. 

Nos contemporains n’ont pas l’ambition de leurs aînés : plutôt que de s’envoler vers l’inconnu, ils préfèrent le surplace. Certains coupent leurs racines… et celles des autres Terriens, pour faire bonne mesure. C’est ainsi qu’il faut comprendre l’ambition des citoyens de partout, qui sont aussi de nulle part, et leur mépris pour ceux qui se sentent ancrés dans un quelque part.

 Ce sont les racines de ce quelque part qui nourrissent les sens : celui de l’odorat, le plus archaïque, qui commande la fuite ou l’auto-défense, celui du goût parfumé au cassoulet, au couscous ou à la carpe farcie, la vue des pics montagneux ou du Plat Pays, la musique de la langue (l’anglais pour le business, l’allemand pour l’armée, l’Italien pour les arts et le français pour l’amour), le toucher de la terre et le sens de l’humour, qui naît dans l’inconscient collectif des peuples. 

L’humour n’est ni intemporel ni universel : Astérix le Gaulois ne fait pas rire les Anglais pour les mêmes références que les Français et les Monthy Python sont loin de faire l’unanimité dans l’Hexagone.                        

L’humour juif n’est pas de partout, même si le peuple a erré 40 ans dans le désert et 2000 ans dans l’antisémitisme. Les Juifs ont ceci de particulier que leurs parents ou leurs grands-parents se sont installé là d’où leurs enfants parlent, mais les fantômes de l’histoire, les persécutions, les exils, les ré-enracinements, les trahisons et les solidarités inespérées ont laissé des traces cosmopolites dans leur ADN.

Ce lourd, très lourd passé, n’empêche pas l’humour : il existe même un humour dit juif, entre autodérision et politesse du désespoir.

Qu’est-ce qui, dans le passé est « ce poids le plus lourd » ?

« Ne laisse pas le poids du plus léger passé t’asservir », conseille André Gide, dans les « Nouvelles nourritures » (1935). À quoi l’historien Fernand Braudel répond, trois générations plus tard : « Sans le poids du passé, l’Histoire n’est qu’une péripétie ».

Comparaison n’est pas raison, mais l’Histoire se répète, fût-ce en bégayant. Sans la connaissance du passé, les sociétés en sont réduites, comme les patients souffrant d’Alzheimer, à recommencer chaque jour l’apprentissage du moindre geste. Ils se trouvent incapables d’apprécier à leur juste douleur les dangers que leurs ancêtres avaient déjà appris à combattre.

N’en déplaise aux wokisto-nihilistes, l’humain est inscrit dans une chaîne qui vient du passé et tend vers l’avenir. Son essence est inscrite dans sa mémoire et les souvenirs les plus douloureux sont aussi ceux qu’il a le plus de mal à oublier.

« Le poids le plus lourd au monde est le cercueil d’un enfant, sur les épaules d’un père », disait Paul Valéry, peut-être en pensant à Victor Hugo : « Demain, dès l’aube…  je partirai…/ Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe / Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur ». 

En d’autres temps, quand un père ou une mère devait porter ce poids d’un enfant à l’avenir brisé, on lui faisait subir des électro-chocs, seuls à même d’affaiblir le souvenir de l’insupportable.

Comment Samuel Sandler a-t-il survécu à l’assassinat de son fils Jonathan et de ses deux petits-fils, Gabriel et Arieh, à Toulouse en 2012, sous la main d’un terroriste musulman abreuvé de propagande ? « Je tue des juifs en France, parce que ces mêmes juifs-là… tuent des innocents en Palestine[1]« , a expliqué Merah aux agents de la DCRI.

Quid des otages israéliens du Hamas, qui, en plus de leur propre supplice, ont assisté à la torture et à la mise à mort de leurs proches ? Comment survivront ceux qui auront été libérés ? 

Les humains qui n’ont pas abdiqué leur humanité souffrent avec eux. Ils ont mal aussi pour les petits Gazaouis utilisés comme boucliers humains par leurs cyniques dirigeants. 

Mais le propre de l’Homme, c’est de voir la différence entre agresseurs et agressés. Si les Hamasniks avaient rendu les otages qu’ils ont kidnappés, il n’aurait plus existé de raison de plaindre les enfants de Gaza. 

Les otages civils israéliens torturés sont un moyen au service d’une fin : la destruction de l’État juif. Les enfants gazaouis sont un moyen au service de la même fin, mais eux relèvent des dépenses de communication du Hamas.

Chaque juif français souffre deux fois, depuis le 7 octobre : devant la souffrance de ses coreligionnaires et à la crainte de voir ses propres enfants subir le même sort. 

D’autres, dont le cœur est situé au creux du nombril, font passer leur narcissisme compassionnel avant la solidarité avec leurs frères qui souffrent réellement dans leur chair et dans leur âme.

Que faire d’un passé aussi lourd ?

Les compassionnagandistes font comme si ce passé n’avait jamais existé ou comme s’il ne concernait pas ceux qui parlent depuis leur nombril. 

Les symétrologues, qui renvoient dos à dos pogromistes et progromisés, fagots d’enfants brûlés vifs devant leurs parents et victimes collatérales utilisées comme boucliers humains, indignent nombre de « Pas-en-mon-nom ». 

Les narcissistes de la compassion sont jugés opportunistes égotistes par les uns, quand d’autres voient en eux des idiots utiles de l’islamisme. C’est bien ce qu’ils sont, mais peut-être est-ce involontaire ? 

Daniel Horowitz, Belge né en Suisse pendant la guerre (Mondiale, deuxième du nom), dont la famille a survécu grâce à des Justes, leur accorde, comme circonstance atténuante, un extrémisme dans l’exigence de perfection. Cette exigence pousse « certains Juifs — y compris en Israël — à rechercher l’approbation du monde, à vouloir apparaître comme plus justes, plus humains, plus vertueux que les autres. On invite Israël à ‘tendre l’autre joue’, dans un monde qui ne cesse de lui frapper la première[2]. On exige de lui ce qu’on n’attend de personne : l’éthique surhumaine d’un peuple en guerre.[3]« 

Ami, entends-tu ces cris sourds d’un antisémitisme consensuel ? Que disent ces noirs corbeaux dans la presse ? « Aimez-nous ! Pour vous plaire, nous accusons notre peuple du crime d’imperfection, que nous n’imputons à nul autre ». 

À l’autre extrémité de l’axe inhumanité-humanité, il y a la fraternité, la transmission et la résilience. 

Un des innombrables reproches faits aux Juifs par les antisémites est leur solidarité. La liberté, l’égalité et la fraternité abstraites, c’est bien. La solidarité concrète avec ses frères, c’est mal. Pourtant la logique voudrait que la solidarité entre les membres d’un groupe persécuté augmente avec la quantité et la gravité des persécutions subies. 

C’est effectivement un des éléments qui a permis aux survivants de la Shoah de se reconstruire : « Il leur a fallu s’adapter, avoir le courage et l’énergie de continuer, reconstituer un réseau affectif, recréer une appartenance (une cellule familiale, une Amicale…) et surtout, trouver la force de ne pas s’apitoyer sur soi-même, en refusant la condition de victime », explique Françoise Ouzan[4], auteur d’un livre d’entretiens avec des rescapés, dans lequel elle analyse leurs expériences et le rôle positif qu’y ont joué, à leur arrivée en Israël, le climat démocratique, l’effet intégrateur de l’armée et le poids de l’esprit pionnier.

Le passé si lourd, comme tremplin vers une renaissance

Parmi les déportés interviewés, on trouve des écrivains, des psychanalystes, deux Prix Nobel, des médecins… 

Simone Veil, Elie Wiesel, Serge Klarsfeld, Boris Cyrulnik, Georges Perec, Samuel Pisar, Izio Rosenman et Aharon Appelfeld ont apporté au monde, avec une immense générosité, une richesse qui leur avait été déniée en même temps que leur humanité.

Leur passé commun a dévoilé une constante : « L’immense impact que l’émergence de l’État d’Israël a eu sur la reconstruction des survivants. Israël a permis de retrouver à la fois l’espoir et la dignité ». Plus d’un millier d’entre eux sont morts lors de la guerre d’Indépendance de 1948. Mais ils sont morts en combattants, pas en victimes.

Les survivants de la Shoah et de l’attaque de leur pays nouveau-né par cinq pays arabes ont compris l’importance de transmettre à leurs descendants ce qu’ils avaient reçu de leurs parents : « La transmission est une autre définition du judaïsme. Ce que l’on apprend, il faut le transmettre. Il s’agit non seulement de transmettre des valeurs de justice mais aussi d’enseigner les dangers de l’humiliation, que les rescapés avaient connue dans les camps et parfois en tant qu’enfants cachés. Le judaïsme nous met en garde contre l’humiliation et la médisance[5]« . 

Les agressés du 7 octobre 2023 ont subi le même traumatisme que leurs grands-parents pendant la Shoah: agression surprise, tortures, assassinats, éventrations, viols, dépeçages, décapitations… et déportation vers Gaza pour y servir d’otages dans des conditions proches de celles des camps de concentration, le travail en moins.

On a vu le retour de ceux qui ont été échangés contre dix fois leur poids en criminels condamnés, sortis des prisons israéliennes. On a vu leur état de délabrement physique. On a vu les indignités auxquelles les ont soumis leurs bourreaux.

Aujourd’hui on voit aussi ceux qui vont témoigner devant l’ONU, ceux qui se consacrent aux blessés et aux anciens captifs, ceux qui reconstruisent en se reconstruisant.

Le neuropsychiatre Boris Cyrulnik, exemple vivant de résilience, inscrit le processus de reconstruction dans une dynamique de lutte contre la honte et d’oubli de l’humiliation.

La 69ᵉ édition du concours Eurovision de la chanson 2025 a eu lieu les 13, 15 et 17 mai 2025 à Bâle en Suisse. Israël y était représenté par Yuval Raphael, 24 ans, qui avait échappé de justesse au pogrom du Hamas lors du festival de musique Nova pour la Paix, le 7 octobre 2023. Réfugiée dans un abri anti-bombe, elle était restée cachée pendant des heures sous les cadavres de ceux qui étaient tombés sur elle, avant d’être finalement secourue par les soldats israéliens. Sa chanson porte un titre qui résume l’esprit israélien, dont le passé est de plus en plus lourd et le futur incertain : « Un jour nouveau se lèvera ».

Lors de l’arrivée de la délégation israélienne à Bâle, une manifestation de propalestiniens l’a accueillie avec des cris de haine, un manifestant menaçant d’égorger la chanteuse. L’Israel bashing a continué pendant toute la durée du concours. Fallait-il que la chanteuse israélienne possède, en plus de son talent et de la qualité de sa chanson, une extraordinaire maîtrise de soi pour finir deuxième, malgré les provocations ! 

Les professionnels de la compassion exclusivement anti-Israël ont le cœur dans le nombril et leur sens moral est situé au verso de leur anatomie. 

Dans le même registre, on peut citer un animateur télévisuel sur lequel le poids du passé pèse à peine quelques années, celles écoulées depuis qu’il a cessé de faire la pluie et le beau temps sur une chaîne de télévision le samedi soir. La nostalgie des sunlights s’est avérée irrésistible, au point de le pousser au délire, surtout si sa divagation suscite le buzz. Le 10 mai 2025, il a réussi au-delà de toute espérance, en déclarant: « Gaza, c’est Auschwitz.[6] » 

Et Ardisson c’est Pétain ? Outrage à l’intelligence, à l’Histoire et à la morale, son slogan banalisait la Shoah et insultait la mémoire des six millions de Juifs exterminés. 

Comparer un conflit armé asymétrique à l’extermination industrielle d’une population de 15 millions d’individus, des bébés aux vieillards, poursuivis dans toute l’Europe, c’est pire qu’une imbécillité, c’est la preuve d’une faillite morale. 

Si le poids du passé avait retenu l’idionimateur, il aurait été ancré dans le réel et cela l’aurait retenu au seuil du lapsus/passage à l’acte verbal/supplique pour être enterré sous la plage de cette forfaiture.

Les valises du passé, des balises pour le présent

On dit souvent qu’il faut ajouter 5000 ans à l’âge de chaque Juif. Daniel Horowitz décrit à la perfection ce que ces 5000 ans d’Histoire et de tradition ajoutent à l’âge chronologique de l’individu : « Ce n’est pas un souvenir, c’est une empreinte. Une civilisation ashkénaze dont les couches sédimentées m’habitent. Elle n’est pas faite de blessures individuelles, mais d’une mémoire du soupçon. Ce que je porte ne m’appartient pas en propre. Il m’a été transmis, parfois sans mot, parfois sans le vouloir. Une inquiétude ancienne, un regard porté sur soi à travers le regard des autres.[7]« 

Horowitz compare le poids qu’il traîne avec l’apparente légèreté des Juifs israéliens, qui semblent avoir fait du passé (insuppor)table rase : « Cette page blanche, c’est le mythe du Tsabar[8]. Il faut y réinscrire les millions de pages de l’exil, du soupçon, de la ténacité silencieuse. Celles que l’on oublie parfois au nom d’un présent qui voudrait être absolu. L’oubli peut être un soulagement, mais il peut aussi être une construction. Un effort pour réécrire l’histoire à partir d’un présent souverain, un refus de la fragilité ancienne. Mais ce refus, à long terme, affaiblit plus qu’il ne protège ». 

Vouloir à tout prix croire en le « Plus jamais ça » fait baisser la garde et finit en 7 octobre, voire pire encore, en 8 octobre : où les victimes sont tenues pour responsables de l’agression et où les agresseurs barbares sont célébrés avec allégresse dans la Oumma, la communauté des « vrais croyants », pour qui la bonté est faiblesse et le peuple juif est à exterminer.

Peut-être ce qui ne tue pas rend-il plus fort, mais les 1200 festivaliers et kibboutznik tués au passage ne fourniront pas le pourcentage habituel de Prix Nobel. Ce n’est pas Mozart qu’on a assassiné, c’est Darius Milhaud, Kurt Weill, George Gershwin, Phil Glass, Daniel Barenboïm, Yehudi Menuhin, Gustav Mahler, Felix Mendelssohn…

Le passé fantasmé de certains est trop lourd pour leurs leurs pantalons 

Dans les rues des grandes agglomérations occidentales, des jeunes gens qui n’ont jamais entendu parler de Gershwin ou de Mahler (et qui n’ont probablement jamais écouté une œuvre de Mozart), ont inventé une nouvelle mode. Il s’agit de porter son pantalon de jogging siglé en le relevant sur un seul mollet.

Ce n’est pas qu’une mode. Contrairement au port des mêmes pantalons laissant apercevoir la raie des fesses, il s’agit aussi d’une déclaration d’intention : « Mes ancêtres portaient au pied le boulet de l’esclavage, je vais vous le faire payer ».

Ces gamins n’ont pas découvert l’esclavage à la puberté, mais ils ont trouvé des idéologues en recherche d’adeptes, qui les ont aisément convaincus que la France avait à leur égard une dette ineffaçable. 

Le Droit est du côté de la Gauche, le leur : la Loi Taubira incite ceux qui sont en retard d’une éducation à en imputer la faute aux aïeux des Blancs qui les entourent. Allah avait déjà transféré tous les échecs et les péchés des vrais croyants sur les Juifs, qu’il promettait de punir à leur place, le jour du Jugement dernier[9]. Intersectionnalité des boucs émissaires : dans la mythologie indigéniste, les Juifs sont des Blancs au carré. 

Le réel n’a pas son mot à dire dans cette présentation souffreteuse de maux venus d’en haut. Au Moyen-Âge, la France a pratiqué l’esclavage, comme toutes les civilisations de son époque, mais elle est la première à l’avoir aboli, d’abord Louis X en 1315, puis le naturel ayant été chassé par son édit, l’esclavage était revenu au galop et fut ré-aboli peu après la révolution (1794), rétabli par Napoléon en 1802 et ré-ré-aboli définitivement en 1848. 

Eussent-ils été tentés par ce commerce, les Juifs, qui n’avaient ni le droit de posséder de la terre ni celui d’exercer des métiers « nobles », se voyaient aussi interdire la possession et la traite des esclaves.

En revanche, la traite transatlantique, la seule autorisée dans les manuels scolaires français, n’aurait pu exister sans ses fournisseurs africains et ses grossistes arabes, dont le trafic avait fait beaucoup plus de victimes que celui des négriers français.

Les ancêtres des exhibitionnistes du mollet, qui défilent de la Rivière (Seine) à la Mer, ont plus de chance d’avoir été marchands d’esclave que victimes d’iceux, mais l’important n’est pas le passé, seul compte le poids qu’on lui accorde. En fonction du passé fantasmé d’ancêtres imaginaires, on peut ainsi s’enrouler avec délectation dans le cocon de la victimitude. 

Prié d’aller se faire voir chez les Grecs, le réel s’y est installé et a permis à un pays à l’économie subclaquante de commencer à remonter la pente et de réduire la distance qui le séparait de la France. Hollande et Macron ont aidé la Grèce à nous rejoindre en nous faisant parcourir la moitié du chemin vers la tiers-mondisation. 

À l’aune du passé réel, l’Homme droit dans sa mémoire pèse le poids du pardon

Le passé est ce qui a été et ne peut plus ne pas avoir été. 

Pétain a signé l’armistice le 22 juin 1940, quatre jours après l’Appel de de Gaulle inaugurant la résistance depuis Londres.

Que l’on ait été pétainiste ou gaulliste, on ne peut pas changer le passé.

Logiquement, l’avenir que l’on construit est appuyé sur un passé qui, lui, est définitivement terminé et déterminé. 

C’est pourquoi les acteurs du wokisme, occupés à changer la société en changeant la nature humaine elle-même, aimeraient modifier le passé. Si celui-ci est irrémédiable, ils espèrent que leur narratif en altèrera la perception.

Pour remonter à la source, les adeptes de la ré-information doivent donc nager à contre-courant des mythes propagés par les faussaires et devenues « idées » reçues par la majorité des naïfs.

Les intermittents du raisonnement enseignent le pardon à géométrie variable : « Obéis à ce que je dis, ne me punis jamais, quoi que je fasse, et ne pardonne qu’à moi, mais toujours ». 

Pour le commun des mortels (c’est-à-dire tout ce qui est à droite de LFI), pardonner, c’est donner un autre poids au passé, le débarrasser peut-être de ce qui empêchait l’avenir d’emprunter certaines routes, en dehors de celles qui condamnaient à la vendetta éternelle. C’est libérer l’avenir, à condition que le pécheur se repentisse de son crime. 

Dans la tradition juive, à l’extrême opposé philosophique de LFI, on ne peut condamner les enfants pour les crimes des parents. En revanche, seuls ceux qui ont souffert sont en mesure de pardonner à leurs bourreaux. 

C’est pourquoi ce qui a été commis contre les Juifs exterminés, dont les cadavres sont partis en fumée, est un crime impardonnable : les enfants ne peuvent pas plus pardonner à la place des parents décédés qu’ils ne doivent endosser leurs éventuels méfaits.

L’antonyme de « poids » n’est pas « légèreté » et son synonyme n’est pas « lourdeur ».

Le poids du passé se mesure en densité et celui de la légèreté en insouciance. La survie dépend de la capacité à avancer en conservant son équilibre, sans se laisser piéger par la mélasse des mauvaises intentions, qu’elles proviennent d’idiots utiles ou de crétins inutiles.

Selon Stanislaw Lec, juif polonais rescapé de la Shoah et célèbre pour ses aphorismes, « la bêtise ne dépasse jamais les bornes : où qu’elle pose le pied, là est son territoire.[10]« 

Mais, mais… c’est justement la définition du waqf, le territoire consacré par l’islam à l’islam : « Là où le pied d’un musulman s’est posé, le territoire est acquis à l’islam jusqu’au Jugement dernier ». 

Attention : pas d’amalgame !

© Liliane Messika

Dernier ouvrage paru, illustré par Antoine Chereau: « Des idéologies bonnes à manger du foin ».22 juin 2025 



Notes

[1] www.liberation.fr/societe/2012/07/16/exclusif-le-dialogue-entre-mohamed-merah-et-la-dcri-le-flic-et-le-terroriste_833708/

[2] Matthieu 5:39, en rupture avec la logique biblique de justice.

[3] https://danielhorowitz.com/blog/index.php/2025/05/07/tikoun-olam-une-derive-universaliste/

[4] www.amazon.fr/R%C3%A9ussir-pour-revivre-Jeunes-rescap%C3%A9s/dp/2350308081/

[5] https://fr.timesofisrael.com/la-reconstruction-juive-apres-la-shoah-nouveau-regard-sur-les-survivants/

[6] www.sudouest.fr/international/gaza-c-est-auschwitz-voila-c-est-tout-ce-qu-il-y-a-a-dire-ardisson-presente-ses-excuses-apres-des-propos-polemiques-24383740.php

[7] https://danielhorowitz.com/blog/index.php/2025/05/18/israel-et-lexil-en-heritage/

[8] « Tsabar »,  littéralement « cactus », décrit le juif né en Israël, doux à l’intérieur, mais piquant à l’extérieur.

[9] « Le Prophète (que la prière d’Allah et Son salut soient sur lui) a dit : “Le jour du jugement des gens parmi les musulmans vont venir avec des péchés comme des montagnes, Allah va leur pardonner et va mettre leurs péchés sur les juifs et les chrétiens. » » (Rapporté par Mouslim dans son Sahih n°2767) www.hadithdujour.com/hadiths/hadith-sur-Le-jour-du-jugement_502.asp

[10] www.amazon.fr/Nouvelles-pens%C3%A9es-%C3%A9chevel%C3%A9es-Stanislaw-Jerzy/dp/2882500505/


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1 Comment

  1. L’individu qui refuse son passé ou en fait abstraction ne saura pas qui il est. Ce sera à ses descendants de faire ce travail de mémoire. C’est d’autant plus primordial pour nous les Juifs qui avons des racines multiples venant des pays ou nos ancêtres vécurent. Elles sont là ces racines c’est à nous de les supporter d’en être fiers et de les transmettre à nos enfants. Nos souffrances doivent être dites, écrites dans des livres ou des cahiers rangés dans nos tiroirs. Israel nous a donné des ailes. Liliane Messika a ouvert les yeux de ceux qui ne regardent pas et je la remercie.

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