Les Juifs de France auront connu nombre de Présidents dont les propos et/ou les actes furent assimilés à juste titre à de l’antisémitisme à peine voilé : on se souvient évidemment du discours assassin – retransmis à la télé – du général de Gaulle qui le 28 novembre 1967 – dans la foulée de la Guerre des six jours – déclara : “Certains même redoutaient que les Juifs, jusqu’alors dispersés, mais qui étaient restés ce qu’ils avaient été de tout temps, c’est à dire un peuple d’élite, sûr de lui-même et dominateur, n’en viennent, une fois rassemblés dans le site de leur ancienne grandeur, à changer en ambition ardente et conquérante les souhaits très émouvants qu’ils formaient depuis 19 siècles : l’an prochain à Jérusalem”.
Ces propos, en particulier ceux dépeignant le Peuple Juif comme “sûr de lui et dominateur”, mais aussi “conquérant”, (je rappelle que ce discours fut tenu seulement 22 ans après la fin de la Shoah) firent couler beaucoup d’encre à l’époque et devinrent une plaie béante pour nombre de Juifs y compris des Juifs gaullistes avérés parmi lesquels le grand philosophe et sociologue Raymond Aron. Ce dernier, non sans un immense courage, accusa fort justement de Gaulle d’avoir “sciemment, volontairement, ouvert une nouvelle période de l’histoire juive et peut-être de l’antisémitisme” (1). Aron parla même “d’antisémitisme d’État” (2), tant les adjectifs décrivant les Juifs étaient injurieux et le fond du discours de mauvaise foi.
Les temps changent et les problèmes demeurent ; je vais donc m’efforcer ici de dresser un parallèle afin d’expliquer en quoi le Président Macron est allé même plus loin que de Gaulle dans l’amorce “d’une nouvelle période de l’histoire juive et peut-être de l’antisémitisme”.
Commençons par le contexte : de Gaulle s’en prit aux Juifs à la suite du casus belli déclenché pourtant contre Israël par l’Égypte qui avait imposé un blocus maritime à l’État hébreu en fermant le détroit de Tiran tout en menaçant – avec les autres pays arabes – de “jeter tous les Juifs à la mer”. De son côté Macron décida de s’attaquer à l’État juif, lui aussi, lors d’une intervention télévisée (sur la BBC), à peine quelques semaines après le plus grand massacre de Juifs commis depuis la fin de la Shoah.
Rappelons qu’à l’échelle de la France, le 7 octobre et ses plus de 1200 morts (sans parler des bébés, femmes et hommes kidnappés) équivaudrait à l’assassinat par des terroristes de 8000 Français en un jour ! Comment aurait réagi le Président Macron, les députés, tous bords confondus et surtout le peuple français face à un tel cataclysme ?!
Or, lors de cette interview datée du 11 novembre 2023, le Président Macron osa prétendre – toute honte bue – qu’Israël devait “cesser de tuer les bébés et les femmes de Gaza”, comme si l’Etat juif ciblait sciemment ces derniers et non les milliers de terroristes du Hamas et du Djihad Islamique. Macron reprenait ainsi à son compte la propagande grossière du Hamas pour qui les bombardements israéliens frappaient comme par miracle, à chaque fois, une majorité de femmes et d’enfants, alors qu’Israël n’a de cesse d’avertir les civils gazaouis de s’éloigner des zones de frappes de l’aviation et de l’artillerie de Tsahal (ce qu’aucune autre armée dans le monde ne fait).
Ces allégations présidentielles estomaquèrent un grand nombre de Juifs qui sentirent soudain une nouvelle cible se dessiner dans leur dos. Soutenir Israël revenait donc pour les Juifs de France à être identifiés à des “complices” de prétendus “tueurs de femmes et d’enfant”. Cela, Macron ne pouvait pas l’ignorer en énonçant ces paroles ! Pour reprendre les termes d’Aron, je dirais que cette interview (tout comme le discours de 1967 de de Gaulle) “autorisait solennellement un nouvel antisémitisme”.
S’ajouta ensuite à ce grave malaise l’étrange refus du Président français de participer à la grande marche contre l’antisémitisme qui se déroula le lendemain de l’interview donnée à la BBC. Le RN de Marine le Pen y participa, tout comme les autres partis, dont celui du Président : deux figures politiques manquaient donc à l’appel, le Président Macron et Jean-Luc Mélenchon, le chef de file du parti antisémite La France Insoumise (et ses sbires bien sûr).
Le plus étonnant fut la raison invoquée par le Président français pour ne pas participer à cette grande et digne marche organisée à l’appel de deux personnalités plus qu’éminentes de la République, les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat (Madame Braun-Pivet et M. Larcher). En effet, comme un retour du refoulé, Emmanuel Macron expliqua qu’il ne serait pas présent car il devait “préserver l’unité du pays”, ce qui revenait à dire que les antisémites (la partie du pays qui ne soutenait pas cette marche) devait être prise en compte et que, d’une certaine façon, il devait les représenter (c’est beau l’inclusivité).
Cet entêtement à ne pas participer à cette manifestation ne fit donc qu’amplifier le sentiment d’incompréhension (ou de “soupçon” pour reprendre le célèbre mot d’Aron) d’une partie de la communauté juive vis-à-vis du Président.
Soudain, l’effroi ! Après les agressions de personnes juives dans les rues de France, après l’incendie d’une synagogue, après les insultes et les menaces de mort, après l’éviction d’étudiants juifs des amphithéâtres d’universités, après les slogans antisémites tagués un peu partout dans l’hexagone, nous apprîmes avec horreur qu’une fillette juive de 12 ans s’était fait violée et battue à Courbevoie par trois jeunes de son âge – tous musulmans de naissance ou convertis à l’islam – au nom de la “Palestine” et aux cris de “sale juive”. La France, oui la France de Macron venait d’atteindre un point de non-retour dans la haine antisémite, attisée par les députés de la France Insoumise, les relais de propagande des Frères musulmans, certains médias et les islamo-gauchistes chassant en meute le Juif sur les réseaux sociaux.
La réaction du Président Macron face à cette abjection sans nom fut en dessous de tout. Ajoutant le mépris à l’horreur de cet acte barbare, le Président demanda simplement à la ministre de l’éducation d’organiser “un temps d’échange sur le racisme et l’antisémitisme” dans les établissements scolaires… Quelle indignité !
Ce Président qui n’hésita pas à descendre sur la pelouse d’un stade de football pour consoler le milliardaire du ballon rond Mbappé après une défaite sportive, n’eut pas un mot, pas un geste pour cette petite fille, ses parents et la communauté juive, préconisant seulement et de façon pathétiquement dérisoire “un temps d’échange” qui d’ailleurs incluait une discussion sur le “racisme” (comme si, une fois de plus – et malgré le fait que l’antisémitisme racial existe évidemment – Macron cherchait à détourner l’attention en parlant d’un autre sujet sans rapport avec ce viol motivé uniquement par l’antisémitisme, comme si Macron cherchait à diluer le gravissime problème).
Un autre casus belli fut déclenché par Emmanuel Macron lorsqu’il décida d’imposer un boycott contre l’État juif en interdisant à ses entreprises de la Défense de participer au très important salon de l’armement Eurosatory qui se déroule au Bourget. Le Président français a – en toute tranquillité – violé la loi dont il est pourtant le garant suprême en ordonnant un acte illégal visant Israël. Après plusieurs mésaventures judiciaires concernant ce dossier, le tribunal de commerce invalida – avec courage – la décision prise car elle violait en effet de façon évidente la loi de la République.
Puis, vinrent les élections législatives et le coup de tonnerre de l’entre-deux-tours qui vit – après l’arrivée en tête du Rassemblement national – un Emmanuel Macron décidé à tout faire pour emêcher le RN d’accéder au pouvoir en privilégiant le désistement des macronistes au profit du parti antisémite LFI et consorts. De façon concomitante, le chef de LFI, Jean-Luc Mélenchon, donnait comme mot d’ordre aux femmes et aux hommes de son camp de se désister au profit du parti du Président.
Une alliance objective “mélenchono-macronienne” eut donc lieu en prenant le risque insensé de faire gagner les élections au seul parti politique ouvertement antisémite de France.
Emmanuel Macron a donc démontré par ses propos, ses actes mais aussi ses silences que l’antisémitisme n’est non seulement pas un problème pour lui mais qu’il savait même en “jouer” à l’instar de Mélenchon ; mais de manière plus subtile et plus voilée…
Toujours aucune réaction de la part du Président Macron quand, à la suite des résultats électoraux, un grand nombre de Juifs français décidèrent d’ouvrir des dossiers à l’Agence juive afin de quitter le pays pour émigrer vers Israël. Que la France se “vide” de ses Juifs n’empêche donc pas de dormir Emmanuel Macron.
En fait, à part quelques phrases creuses transmises aux thuriféraires macroniens du CRIF, leur indiquant qu’il sera “intraitable” face à l’antisémitisme , nous pouvons inférer des silences de Macron le fond de sa pensée concernant les Juifs et Israël.
Si le Président français prenait vraiment à cœur la lutte contre l’antisémitisme, il n’aurait pas repris à son compte la rhétorique du Hamas concernant l’armée israélienne, il aurait dissous LFI (comme plusieurs personnalités politiques, y compris de son propre bord, le demandèrent), il aurait aussi tenu un discours solennel pour rappeler la légitimité historique et morale du Peuple juif sur la Terre d’Israël et il aurait condamné l’utilisation par la gauche du terme diffamatoire de “génocid” concernant la guerre qui se déroule à Gaza.
Il aurait enfin rappelé le rôle essentiel de l’influence juive sur la grande histoire de France, depuis au moins la cérémonie du sacre de Charlemagne qui fut tellement empreint de références issues de la Bible hébraïque que l’historien byzantin du XIIe siècle Constantin Manassès décrivit cette célébration comme étant “juive et incompréhensible” (3).
Le temps est venu aussi de rappeler la genèse juive de la pensée Occidentale et donc de celle de la France.
(1) Raymond Aron. “De Gaulle, Israël et les juifs”
(2) Idem
(3) Denise Bonan. “Genèse de la pensée en Occident”
© Frédéric Sroussi
Frédéric Sroussi est journaliste et essayiste
Le nazisme n’est pas à proprement parler un régime politique. C’est avant tout une idéologie qui peut revêtir différentes formes _ y compris celle de pseudo démocraties. Je me suis longtemps interrogé sur les propos de de Gaulle. De toute évidence, son fond antisémite refaisait surface : sa politique pro arabe semble le prouver. Mais c’est surtout avec Mitterrand que la France est passée (et même très rapidement) d’une démocratie assez exemplaire en un néo Vichysme. Le racisme (et l’antisémitisme) déguisé en antiracisme est le poison mortel qui a engendré cette plongée fatale et irréversible du monde occidental. La propagande pro palo et antisémite est devenue systémique dans les Années 80 : cela allait de pair avec la montée du racisme anti-blancs, de l’islamisme et la multiplication des zones de non-droit. Dès lors, les dés étaient jetés.
L'”alliance objective mélanchono macronienne” dont parle à juste titre Frédéric Sroussi avait commencé dès le coup d’état du printemps 2017.
@Kinski
“coup d’État du printemps 2017” ! !
Pourquoi “coup d’État” ? Je ne me souviens vraiment pas que l’armée était intervenue en France lors des élections de 2017.
Je n’ai pas du tout en mémoire que des électeurs.trices ont été empêché de voter aux présidentielles en 2017.
@Gilda Évidemment. “Coup d’Etat” entre guillemets. Mais prise de pouvoir par la manipulation et le mensonge, avec le soutien du deep state et l’UE à la suite d’une campagne de bourrage de crânes digne des pires dictatures. Et 2022 encore pire que 2017. Il n’est pas utile d’utiliser la force au sens strict dans des régimes islamonazis et totalitaires déguisés en démocraties.La lobotomisation et le conditionnement mental des électeurs s’effectuent en amont, dès l’enfance et 24 heures sur 24. Les opposants à la dictature et au Fascisme islamiste ne sont pas passés au peloton d’exécution mais subissent une mort sociale totale d’autant les calomnies déversées sur eux persisteront après leur mort.
“La dictature parfaite serait une dictature ayant les apparences de la démocratie” (Aldous Huxley)
Concernant Mitterrand vous vous trompez. L’insinuation de ” néo vichysme ” ou d’antisémitisme est injustifiée . Le politicien n’était peut-être pas parfait, mais demandez a Laurent Fabius, Jacques Attali ce qu’ils en pense. Georges Dayan son meilleur ami décédé un peu après 1981 ne peut plus témoigner. Et surtout Roger Hanin qui n’était pas simplement l’acteur de la série Navarro mais avait créé le festival de Pau en jouant du Shakespeare avait dit ” mon beau frère n’est absolument pas antisémite “
@Di Pietrontonio Savoir ce qui se passait dans la tête de Mitterrand ne m’intéresse pas : le fait est qu’il était entouré d’individus devenus des Islamonazis (ils l’étaient déjà au fond d’eux) et que la fin de la République, de la démocratie et de l’État de droit en France a commencé en 1981. Mitterrand et son parti de pourritures ne se sont d’ailleurs pas contentés d’entraîner la France dans la pente fatale de l’islamisme, du racisme inversé et de l’antisémitisme : ils ont également trahi toutes les aspirations sociales et économiques de la gauche historique en faisant de la France un simple valet de l’UE très droitière et ultra libérale et des intérêts économiques allemands. Et ce n’est pas tout. En politique étrangère, Mitterrand ce fut : 1) le soutien affiché aux “Palestiniens” et l’opposition à Israël 2) la participation à la 1ere guerre contre l’Irak (déjà a l’époque, la manipulation médiatique fonctionnait a plein régime) 3) le désastre génocidaire du Rwanda… liste non exhaustive
“Comment aurait réagi le Président Macron, les députés, tous bords confondus et surtout le peuple français face à un tel cataclysme ?!”
Hé bien je me le demande, justement, car le peuple français et son gouvernement ne sont hélas ni sûrs d’eux ni dominateurs, plutôt du genre à laisser écrabouiller le peuple, torturer et violer femmes, enfants sans moufter, voire en niant les faits.
Heureusement pour les Israéliens, Benjamin Netanyahu n’est pas, lui, du bois dont on fait les lâches.
Une très bonne analyse de Mr Sroussi. Hélàs on peut dire que la France et ses présidents n’ont jamais soutenu Israël. Les dirigeants français ont toujours été pro-arabe. On a accueilli Arafat, Khomeini, George Abbas etc. Quant à Macron c’est inadmissible qu’il ne soit pas allé à la marche contre l’antisémitisme. C’est une honte de ne pas soutenir les victimes que ce soit les parents de cette fillette et toutes les victimes antérieurs. Cette classe politique me dégoute, surtout les LFI les Macronistes, la gauche, tous d’accord. Je ne suis pas fière de ce pays, aucune humanité, on préfère soutenir les bourreaux que les victimes.
“Une vision sans action est un rêve.
Une action sans vision est un cauchemar.”
(proverbe japonais)
Étant totalement dépourvus de vision, les dirigeants européens et français ont transformé l’Europe et la France en cauchemars dystopiques.
Je m’étonne que l’expression « peuple d’élite » dans la bouche du général de Gaulle puisse être considérée comme une injure. On sait par son aide de camp que, peu après sa conférence de presse, de Gaulle déclara : « peuple d’élite, sûr de lui-même… Ah, si je pouvais en dire autant des Français !»
aujourd’hui , Mr MACRON , ainsi que MR HOLLANDE et tous les autres politiciens de gauche préfèrent sérer la main des députés de LFI qui mettent une cible sur le dos des juifs mais demain la cible sera sur tous les chrétiens .
Ils ne voient pas plus loin que le bout de leur nez , Les frères musulmans ont tout leur temps .Chaque fois que les juifs sont partis en urgence d’un pays , le pays s’est écroulé économiquement et politiquement .
ce qui semble étonnant c’est la lenteur de prise de conscience par nombre de juifs de l’hostilité, à peine voilée à leur égard, de leur environnement.
“Heureux comme Dieu en France”.. : la poussée religieuse n’a-t’elle pas fait perdre de vue la réalité, voir l’hostilité, d’un environnement qui n’a cessé de se dégrader depuis le discours de de Gaule ?
Peut-être, aussi, que nombre de juifs ont cru que la victoire sur le nazisme signifiait la fin de l’antisémitisme :
En réalité, l’antisémitisme s’est terré durant des dizaines d’années, il resurgit aujourd’hui
Merci pour cet article qui fait du bien.