La Haye du déshonneur. Par Me Johann Habib

Johann Sfar

Article impossible

J’aurais pu écrire un article juridique qui démonterait point par point l’assignation totalement injustifiée de l’Afrique du Sud contre Israël pour le  “génocide des Palestiniens de Gaza” (sic)depuis le 7 octobre 2023. J’aurais sans doute décrit la page d’accueil de la Cour Internationale de Justice avec son illustration pastorale du Palais de la Paix et de son clocher, accueillant le tribunal de La Haye, comprenant un encart discret en bas à droite de l’écran sur les “dernières nouvelles du tribunal”:

Le 29 décembre 2023, la République d’Afrique du Sud a introduit une instance contre l’État d’Israël devant la Cour au sujet de supposés manquements par cet État aux obligations qui lui incombent au titre de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide en ce qui concerne les Palestiniens dans la bande de Gaza et a prié la Cour d’indiquer des mesures conservatoires.”

Cynisme obscène

Une procédure que plusieurs pays, dont la Colombie ou la Malaisie, ont rejointe, formant un curieux attelage plus proche d’une histoire absurde qui serait drôle si elle n’était pas fondée sur le massacre du 7 octobre. Des pays  dans le top 5 de la corruption, où prospèrent le crime organisé et champions des inégalités sociales. Un collège de juges formé de 15 éminences qui ont semé la terreur pendant mes travaux dirigés lors de mes années de fac. J’aurais pu vous parler d’un juge israélien caché dans un sac de pommes de terre pendant la Shoah, ancien président de la Cour suprême et figure emblématique de la lutte, 8 mois durant, contre la réforme judiciaire à l’origine de la jurisprudence portant son nom. On aurait pu évoquer un juge français juif d’origine égyptienne hostile à Israël et sa politique, un juge musulman, qui a passé plusieurs séjours en Israël, et adoptera une position plus qu’équilibrée dans cette procédure. Et d’autres magistrats sur le départ qui pensaient sérieusement terminer leur mandat dans des conditions où honorifique rime avec soporifique.

On pourrait rentrer dans l’intimité matinale d’un membre du gouvernement sud-africain qui s’est réveillé en se disant : comment va-t-on embêter les Juifs qui se défendent en Israël ? Tiens, poursuivons-les pour génocide au Tribunal International ! Plus c’est gros, plus ça passe. On sera sans doute bien vus par le Qatar. L’Afrique du Sud, qui ne brille pas au sein des BRICS par ses succès économiques, se doit d’exister autrement. Alors taper sur les Juifs, c’est pratique : c’est plutôt fédérateur, assez consensuel auprès des dictatures et on ne risque pas de se prendre un attentat terroriste : on n’a jamais vu un djihadiste juif se mettre tripes à l’air en hurlant “Hashem est grand”. J’aurais pu aussi montrer l’absence totale de base légitime dans cette action contre un pays qui lutte pour sa survie face à une coalition d’ombres lâches.

Nous existerons que vous le vouliez ou non

Mais je ne le ferai pas. Je me soigne. Cela dit, j’en ai assez de devoir justifier mon existence à longueur de lignes dans des journaux. De devoir expliquer au monde dans Le Monde ou ailleurs que ceux qui ont vraiment subi un génocide ce sont les victimes du 7 octobre qui n’avaient rien demandé d’autre que de vivre, cultiver leur terre, danser et vivre encore. J’en ai assez d’être effaré que cette assignation n’évoque pas les viols collectifs, mutilations, massacres et prises d’otage du 7 octobre et que cela ne semble pas choquer outre mesure l’opinion internationale ni les ONG, l’ONU et leurs satellites, dont le silence montre leur hostilité envers les juifs. Je suis écœuré que, depuis cent jours, 138 otages dont des bébés et des vieillards sont en train de s’éteindre dans des conditions épouvantables, certaines sont violées et sans doute enceintes de leurs geôliers, tout cela sans que vous, « communauté internationale” ne stigmatisiez les coupables mais pointiez les victimes.

Oui, les Juifs sont fatigués de devoir sacrifier chaque jour des soldats, qui sont nos enfants, pour une guerre servant à prouver au monde qu’ils ont le droit à la liberté, et de ne pas vivre en permanence sous la menace d’Amal’ek ou de Pharaon. “Let my people go“, dit Moïse au roi d’Égypte dans le chapitre de la Torah qu’on lit cette semaine. Après 3300 ans, il serait temps que cela se réalise.

M.AJ du 14 janvier 2024: le hamas joue avec les émotions du public israélien et publie des films de trois otages que les médias ont décidé de ne pas diffuser d’autant qu’on ne sait pas quand ils ont été filmés. Apparemment la terreur psychologique n est pas dans le code pénal international.

© Johann Habib

Johann Habib est Avocat franco-israélien

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