Olivier Ypsilantis. S’engager !

A l’heure où toute l’armée israélienne est mobilisée, avec le rappel des réservistes, il est important de l’aider. Cette aide peut être apportée, et très efficacement, par un engagement au Sar-El, une organisation fondée par le général Aharon Davidi (1927-2012). 

Petit rappel historique. Le général Aharon Davidi crée le Volontariat civil au sein de Tsahal (Sar-El) dans les années 1980, au cours de la première guerre du Liban (Opération « Paix en Galilée », 1982), alors que tous les Israéliens sont appelés à rejoindre Tsahal. En conséquence, l’arrière est vidé de ses forces. Le général Aharon Davidi (alors commandant en chef de la Brigade parachutiste) propose une solution pour travailler des terres laissées à l’abandon sur le plateau du Golan. Il part pour les États-Unis et revient peu après avec des centaines de volontaires de New York. Aharon Davidi soumet son expérience et son idée à l’état-major de Tsahal qui les valide. Le Sar-El est né. 

Aujourd’hui, la situation est aussi urgente. Les pans entiers de l’économie du pays sont au ralenti, en particulier dans l’agriculture. Mais pour l’heure, je ne vais évoquer que ce que je connais un peu pour y avoir travaillé deux fois, le Sar-El. Mon engagement n’a rien d’héroïque, il a simplement été un peu utile à Tsahal (tout au moins je l’espère), comme l’a été et le reste celui des Volontaires du Sar-El. 

J’ai travaillé deux fois trois semaines au Sar-El, en août 2013, sur la Tze’elim Base, un camp immense à une vingtaine de kilomètres au sud de Beer-Sheva, dans le nord du Néguev, puis l’année suivante, en juillet 2014, sur Batzap Nord, à la frontière libanaise, en Galilée. 

J’ai rendu compte de ces deux expériences dans deux suites d’articles écrits sous la forme d’un journal. Considérant leur longueur, je vais résumer. 

En août 2013, une chaleur torride et un travail considérable sur l’immense Tze’elim Base avec des hangars à perte de vue. Notre travail, remettre de l’ordre et en tous sens. Quelques tâches parmi d’autres. Vérifier les paquetages des soldats et les ranger sur des étagères (dans ces paquetages, des trousses de secours). Détruire avec l’aide de Beta Israel équipés d’une déchiqueteuse des masses de documents confidentiels entreposés dans un hangar envahi par de la poussière et des pigeons avec de la fiente un peu partout. Je me souviens en particulier de très grandes cartes détaillées de la bande de Gaza. Le nettoyage du camp sous la direction d’un vétéran autoritaire et chaleureux (je me souviens qu’il ne manquait jamais de nous offrir de délicieux petits gâteaux riches en miel), un nettoyage qui a aussi pour but de récupérer tout ce qui est métallique pour le revendre au poids. Bref, un vaste travail de rangement et de ménage (on dirait de « logistique arrière ») dont l’un des objectif (le plus important) : donner en cas d’alerte la possibilité aux soldats de Tsahal de saisir leur équipement vérifié sans perdre une minute. Ces modestes travaux constituent donc un maillon d’une chaîne vitale et nous savons qu’entre les unités combattantes en opération et nous-mêmes le lien est discret mais essentiel. Autres travaux plus ponctuels, le nettoyage des armes, un chargement d’obus dans un obusier automoteur M109, des travaux de peinture sur des semi-remorques porte-chars. Bref, tout ce travail est effectué par un groupe d’une bonne douzaine de Volontaires, femmes et hommes, grosso modo entre quatre-vingts ans et vingt ans, des Juifs et des chrétiens. Peu m’importait la chaleur estivale du Néguev, la sueur et la poussière, je me sentais comme chez moi. Et il y avait le plaisir de la douche, en fin de journée, des douches rudimentaires mais avec de l’eau bien fraîche. Quant à la nourriture, elle était sobre et saine, avec beaucoup de produits laitiers dont un délicieux fromage blanc qui m’apparaissait comme un miracle dans ces espaces arides où la poussière s’infiltrait partout. 

« It is important to volunteer »

L’été suivant sur la base de Batzap Nord, à la frontière avec le Liban. Juillet-août 2014, guerre de Gaza. L’aéroport international de Tel Aviv – David Ben Gourion presque vide. La jeune femme qui vérifie mon passeport me demande ce que je viens faire. Je lui explique que je suis Volontaire pour le Sar-El et que j’ai rendez-vous dans l’aéroport même avec un responsable de cette organisation, plus précisément devant la bijouterie Swarovski. Elle me regarde et me répond en me tendant mon passeport : « It is important to volunteer ».

Le travail dans cette base de Galilée est bien plus tranquille que dans celle du Néguev, et déjà parce que nous travaillons dans des locaux techniques avec air conditionné. Mon travail se partage entre le nettoyage d’éléments de chars Merkava. N’ayant aucune compétence technique particulière, je nettoie avec des brosses en fer et du papier de verre des pièces métalliques, en particulier des socles pour radios. De fait, un peu partout, derrière des vitres, des ingénieurs et techniciens s’affairent autour d’un matériel plutôt complexe. Dans une pièce à côté de celle où je travaille, des Russes d’un certain âge, probablement retraités, des volontaires eux aussi, mais pas du Sar-El. Ils ont émigré assez récemment et sont simplement heureux d’aider Tsahal mais aussi de se retrouver entre eux. Dans un premier temps, ils se montrent plutôt froids, voire désagréables. Mais au fil des jours, une relation de sympathie s’établit et ils n’hésitent plus à nous aider en cas de besoin. Mon autre tâche, à côté de ces locaux techniques mais dehors – dans la chaleur –, la remise en état de casques de tankistes. Je seconde un soldat de Tsahal, un jeune juif originaire du Caucase, peu bavard mais souriant. Je dois poncer les casques (il y en a des caisses et des caisses) afin d’en ôter les vieilles couches de peinture, des couches épaisses, les nettoyer à l’aide de ponceuses et leurs feuilles abrasives ou au papier de verre et à la main car notre ponceuse est capricieuse. L’opération terminée je passe une épaisse couche de peinture verdâtre sur l’extérieur des casques. De fait, je ne puis voir un tankiste de Tsahal sans penser à ces journées dans cette base de Galilée où les Volontaires du Sar-El étaient presque tous de jeunes juives et juifs parisiens, souriants, vifs, d’une grande politesse et désireux de communiquer. 

A propos de tankistes et de leurs casques, je propose en lien un reportage extraordinaire de i24 qui montre des jeunes femmes, des héroïnes de Tsahal qui le 7 octobre 2023, aux abords de Gaza, ont sauvé bien des vies israéliennes et liquidé une bonne cinquantaine de terroristes du Hamas. Il me semble qu’avec elles la polémique sur l’incorporation des femmes dans les blindés est révolue.

https://www.youtube.com/watch?v=J9SCtM3iKcQ

Ci-joint, une vidéo (en français) rend compte avec exactitude de l’importance et la diversité du travail accompli par les Volontaires du Sar-El :  

En conclusion

Aider Israël à un moment si difficile de son existence est nécessaire pour le pays à l’heure de la mobilisation totale. Mais il y a plus : aider Israël est pour le sioniste (juif mais aussi non-juif) une manière efficace entre toutes de s’extraire de l’accablement et de cette terrible sensation de solitude qui prend à un moment ou à un autre tous les amis d’Israël. Ainsi que je l’ai souvent écrit, être sioniste c’est se condamner à une relative solitude étant donné que les médias de masse et l’information mainstream sont très majoritairement hostiles au sionisme et à Israël.

Le Sar-El est un moyen (il y en a d’autres, certes) d’aider Israël tout en s’aidant soi-même, d’éviter de tomber dans un découragement stérile qui ne peut que servir les ennemis d’Israël, d’œuvrer avec des femmes et de hommes aussi divers que l’est le peuple d’Israël.  

© Olivier Ypsilantis

https://zakhor-online.com/author/olivier/


Né à Paris, Olivier Ypsilantis a suivi des études supérieures d’histoire de l’art et d’arts graphiques. Passionné depuis l’enfance par l’histoire et la culture juive, il a ouvert un blog en 2011, en partie dédié à celles-ci. Ayant vécu dans plusieurs pays, dont vingt ans en Espagne, il s’est récemment installé à Lisbonne.

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