Ofer Bronchtein : “Nous nous sommes battus, ensemble, pour la paix au Proche-Orient. Aujourd’hui, c’est un gouffre qui nous sépare”

Ofer Bronchtein. © LP/Philippe Martinat

Le président du Forum international pour la paix et la réconciliation au Moyen-Orient, Ofer Bronchtein, déplore, dans une tribune au “Monde” écrite sous la forme d’une lettre adressée à un ami palestinien, l’absence de compassion de certains militants pacifistes à l’égard des victimes israéliennes du Hamas.

“Lorsque j’ai lu tes mots il y a quelques jours, mon cœur s’est serré.

La colère que tu évoques face à la situation de ton peuple est légitime. Mais ton silence devant la douleur du mien m’est insupportable.

J’ai cherché entre les lignes un écho de compassion, une reconnaissance de la souffrance des Israéliens au lendemain de l’attaque inhumaine du 7 octobre. Je suis resté sidéré. Pas un mot sur le massacre d’enfants, de familles, de jeunes, dont beaucoup se battaient pour la paix. Pas un mot sur la barbarie des actes commis par le Hamas, et sur les centaines d’innocents qui ont été touchés par cette tragédie.

Les bombardements israéliens sont dévastateurs et doivent cesser au plus vite. La réponse au massacre de 1 400 innocents et à une prise en otage de civils à l’ampleur inédite doit être aussi ferme que juste. Les Israéliens sont traumatisés, tu dois le comprendre. L’onde de choc qui traverse la société est brutale et inattendue. La violence des actes commis évoque les heures les plus sombres de notre histoire et le contrat moral qui unissait le peuple et l’Etat d’Israël depuis la Shoah s’est brisé sous nos yeux. Il est désormais vital pour l’armée d’aller récupérer ces deux cents innocents et, tu le sais autant que moi, ils ne reculeront devant rien.

Ton silence résonne douloureusement dans mon cœur. Ne condamnais-tu pas, il y a quelques semaines encore, les fanatiques du djihad et leurs pratiques contraires à toute forme de liberté ? Je comprends combien il est difficile de prendre parti dans cette crise, mais ce n’est pas ce que je te demande. Depuis des années, j’apprends à mes enfants à respecter chaque être humain, à reconnaître l’injustice où qu’elle se trouve. J’ai toujours plaidé pour la liberté, la dignité et la prospérité des Palestiniens. J’ai reçu de leurs mains un passeport qui m’a causé bien des torts, mais que j’ai brandi avec une fierté sans limites. J’ai dénoncé sans relâche la politique colonialiste meurtrière des extrémistes du gouvernement, en m’attirant souvent les foudres de mes compatriotes. Je me suis battu pour faire reconnaître les actes barbares du régime d’oppression et de domination mis en place sur les Palestiniens. Cela ne m’empêche pas, aujourd’hui, d’afficher toute ma solidarité et mon soutien au peuple israélien face à ce carnage. Il ne s’agit pas là d’une contradiction.

Une exigence morale

Nous nous sommes battus, ensemble, pour la paix au Proche-Orient. Et pourtant, aujourd’hui, c’est un gouffre qui nous sépare. Je t’en supplie, mon ami, réfléchis profondément à ce que cela signifie pour notre amitié. Elle mérite une sincérité et une empathie mutuelles. Elle mérite que nous partagions une vision de paix où chaque douleur est reconnue, où chaque injustice est condamnée. Avec espoir et détermination.

J’ai toujours cru en notre amitié et dans sa capacité à transcender nos différences, à éclairer nos moments sombres. L’ombre jetée sur ce lien, je ne peux pas l’ignorer. Ton silence m’est douloureusement parvenu comme un cri. Comment peux-tu ne pas mentionner les innocents perdus ? Mon cœur est lourd en pensant à Eyal Waldman, qui, au-delà d’offrir un emploi à des dizaines de Gazaouis, leur proposait également une rémunération égale à celle des Israéliens. Sa fille et son gendre ont été massacrés et, face à la tragédie, il a fait le choix de la compassion en déclarant vouloir doubler le nombre de ses employés palestiniens. Où te situes-tu dans ce paysage de souffrance et d’espoir ? Notre amitié est-elle menacée par cette divergence d’émotions et de valeurs ? J’ai appris à mes enfants à reconnaître l’injustice faite aux Palestiniens. Mon attachement à leur liberté est viscéral. Je continuerai à me battre pour leur dignité, leur indépendance et leur prospérité, car ton peuple mérite un futur lumineux. Mais, aujourd’hui, ta réticence à voir la douleur de l’autre côté m’inquiète profondément.

Il est essentiel pour moi que nous partagions cette vision commune de la paix, où l’humanité l’emporte sur la barbarie, où ce qui nous lie est plus puissant que ce qui nous sépare. Il s’agit là d’une exigence morale. Je m’accroche à l’espoir d’une générosité et d’une solidarité renouvelées et je rêve du jour où, grâce à l’humilité et à la compréhension mutuelle, nous pourrons nous pardonner. Mais, pour cela, il faut que tu reconnaisses aussi mes douleurs et mes craintes. Mon ami, je te l’implore, réfléchis à la profondeur de mes sentiments et à l’importance de notre amitié. Elle vaut la peine d’être sauvée. Elle a besoin de ton empathie, de ton courage.

Avec espoir”,

© Ofer


Ofer Bronchtein est président du Forum international pour la paix et la réconciliation au Moyen-Orient, chargé de mission auprès d’Emmanuel Macron pour le rapprochement des sociétés israélienne et palestinienne. Il est un ancien collaborateur d’Yitzhak Rabin, premier ministre de l’Etat d’Israël de 1974 à 1977, puis de 1992 à son assassinat, en 1995.

Ofer Bronchtein(Président du Forum international pour la paix et la réconciliation au Moyen-Orient)


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3 Comments

  1. Il y a trente ans nous étions tous pleins d’espoir au moment des accords d’Oslo. On y a sincèrement cru. Puis on a vu les attentats, le double jeu des “Palestiniens” pour qui les accords d’Oslo furent un cheval de Troie.
    On sait maintenant très exactement ce qu’apporte la “Palestine” : RIEN, excepté boycotts, terrorisme, morts, bombes, attentats, missiles, antisémitisme, carnage, massacres : les dividendes des accords d’Oslo !!,…contrairement à ce qu’affirme Jack Lang et le révisionnisme d’Etat à l’Institut du Monde Arabe.

    Ofer Bronstein mériterait le prix de l’ingénuité : les pacifistes auxquels il s’adresse ne lui répondront jamais !. Monsieur Bronstein devrait savoir que le pacifisme signifie TOUT plutôt que la guerre (en France, ce fut la Collaboration et le régime de Vichy à la botte de l’Allemagne nazie) et devrait surtout savoir – l’Histoire l’a prouvé – que les pacifistes ont toujours été les plus grands va-t-en-guerre qu’ils ont fait faire aux autres pendant qu’ils se planquaient…

  2. Mr Bronchtein n a jamais rien compris a rien , pas plus hier qu aujourdhui .
    Il ne s est pas battu avec ses potes arabes pour la paix , il s est juste intoxiqué avec sa propre betise qui reste stratospherique .

  3. Nul un jour, nul toujours.
    Il serait bien plus simple et humble de reconnaître vos erreurs et de faire amende honorable, sans essayer de vous justifier.
    Vous êtes l’archétype du post-sioniste laïcard dont les orientations idéologiques ont en partie menées à la catastrophe du 7 octobre.
    “Moi, à votre place j’essaierai la gaz”, comme disait Coluche !!

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