“Nommer la brèche”

Georges-Elia Sarfati

Je parlais récemment avec mon amie, la philosophe Ariane Kalfa, de la portée du pogrom perpétré par le Hamas, dans plusieurs localités du sud d’Israël, le jour de Simha Torah, un demi-siècle, presque jour pour jour, après la Guerre de Kippur. Nous convenions ensemble qu’une fois de plus le monde occidental manquait de dire la vérité et d’en tirer les conséquences. Décidément, l’Europe, notamment, se caractérise par son penchant pour la demi mesure, sa réticence à briser les tabous biens installés, et la propension à relativiser même ce qui n’a pas de nom.

Nous nous disions aussi que les hommes politiques, autant que les journalistes, ainsi que la plupart des intellectuels comme des experts invités à débattre de l’évènement sur les plateaux de télévision avaient aussi manqué de penser à nouveaux frais ce qu’il vient de se produire : tout à la fois, un massacre marqué par la perversité, un séisme politique, une catastrophe morale, une mise en crise indéniable des habitudes de pensée. Cela veut d’abord dire que toutes ces voix que l’on dit autorisées n’ont pas eu la lucidité élémentaire de considérer que ce que le fanatisme vient de nous faire, et de nous montrer relève du crime contre l’humanité, avec circonstances aggravantes.

Même la terminologie juridique, dont dispose aujourd’hui l’arsenal conceptuel dont s’est doté le droit international depuis les procès de Nuremberg et de Tokyo, nous paraît inadaptée : génocide, crime de guerre, cela, bien qu’évoqué, n’a pas duré plus longtemps qu’un éphémère unanimisme compassionnel pour les victimes israéliennes. Nous n’avons pas non plus entendu prononcer l’expression de “crime contre l’humanité” : Etait-ce trop demander, dès lors que le massacre visait des citoyens de l’État d’Israël (ou comme beaucoup le pensent : des membres de “l’entité sioniste”) ? Peut-être faut-il alors, devant cette insuffisance, déplacer la question de savoir comment nommer cette chose sur le terrain de la philosophie morale, ou peut être de la psychanalyse ?

Avant de laisser les juristes élaborer et perlaborer sur le juste ton à adopter en la matière, avançons pour notre part deux suggestions, que juges et praticiens pourront, s’ils en ont l’idée, mener à leur juste terme: Les expressions meurtrières du djihad mondial doivent être combattues de la manière la plus systématique et la plus implacable qui soit. Il faut non seulement signifier aux instigateurs et aux auteurs de ces crimes que leurs plans comme leurs actes les condamnent à mort, mais encore donner à cette condamnation radicale une dimension publique, en y ajoutant un élément de démoralisation corrosif.

La manière de mener la guerre contre l’islamo-sadisme devrait impliquer de prévoir la manière de juger définitivement ce fléau après la guerre, en posant une nouvelle ligne de démarcation entre le nouvel ancien monde qui vient de s’achever et la nouvelle ère de conflit planétarisé qui nous est signifiée. Le droit pénal international devra trouver dans cette déroute de la civilisation matière à réaffirmer ses rigueurs pour les plus grands crimes : le rétablissement de la peine de mort pour les djihadistes qui sont passés à l’acte, à l’issue d’un procès public, internationalement retransmis.

La tenue de véritables Assises sera la première leçon dont devront s’inspirer aussitôt les programmes d’enseignements de l’histoire, désespérément vides ou mis entre les mains d’enseignants apeurés sinon défaillants.

Quant à l’exécution publique des criminels, par pendaison, médiatisée à l’ égal de leurs crimes, elle aura pour finalité de signifier aux shahids potentiels leur humiliation, et la mise en échec de leur théologie mortifère, parce qu’un fanatique de cette sorte qui n’est pas mort au combat perd le salut que lui promet sa doctrine.

Ce n’est qu’à ce degré de rigueur – la cruauté en moins- que doivent être sanctionnées, pour le présent, pour la mémoire et pour l’histoire des exactions comme celles qui viennent d’être commises.

De surcroît, cela ôtera aux stratèges du djihad l’envie maligne d’envisager la libération de leurs agents -condamnés jusqu’alors à la seule prison-  en échange d’un “croisé” ou d’un “sioniste”, c’est-à-dire d’un citoyen de n’importe quelle nation, ou bien d’un soldat ou d’un civil de l’État nation du peuple juif .

© Georges-Elia Sarfati*

*Georges-Elia Sarfati est philosophe, linguiste, psychanalyste, directeur de l’École française d’analyse et de thérapie existentielles, fondateur de l’Université Populaire de Jérusalem.

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