Liliane Messika. Les murs de la honte sont contagieux

L’expression “entre quatre murs” est synonyme de sécurité : en témoignent aussi bien les trois petits cochons que l’abbé Pierre[1]. Mais un mur a deux côtés. Il peut empêcher de sortir ou défendre d’entrer. Comme le remarquait Mark Twain : “On pourrait citer de nombreux exemples de dépenses inutiles : par exemple les murs des cimetières. Ceux qui sont dedans ne peuvent pas en sortir et ceux qui sont à l’extérieur ne veulent pas y entrer”. 

Mais on parle là de murs en minuscule, pas du Mur majuscule. N’oublions pas sa dimension symbolique : dans Game of Thrones, de protection contre le Roi de la nuit, dans les médias, d’oppression. Quand celui de Berlin est tombé, on a vérifié la justesse de l’aphorisme Twainien : ceux qui ne pouvaient pas sortir du versant Est se sont précipités dehors et ceux qui étaient à l’extérieur n’ont pas voulu y entrer. 

En 1989, les progressistes, ennemis de tous les murs, étaient du côté de la Stasi, pas de l’American way of life. Aujourd’hui c’est pareil, mais leur opium s’appelle islamo-gauchisme antisioniste.

Le Mur de Berlin est mort…

Un nouveau Mur fut appelé à régner, mais ni libellule, ni papillon : il reçut son nom de baptême, Mur-de-la-Honte, quand fut posée sa première pierre, qui avait vocation à protéger les Israéliens des pierres et des attentats de l’Intifada.

À symbole, symbole et demi, celui de la haine d’Israël, Le Monde Diplomatique, n’a pas boudé son plaisir, pour en parler. Il a rappelé Berlin et a emmuré l’expression “mur de sécurité” entre des guillemets : “En édifiant une clôture trois fois plus haute et deux fois plus large que le mur de Berlin — que l’Allemagne de l’Est appelait ‘mur de la paix’ et l’Allemagne de l’Ouest ‘mur de la honte’ —, Israël va annexer unilatéralement une partie substantielle de la Cisjordanie et resserrer les barrages militaires autour des villes palestiniennes, en y enfermant ainsi efficacement les habitants’.[2] 

Quel lecteur, en lisant cette condamnation sans appel, aurait pu imaginer la réalité, c’est-à-dire une “clôture électronique de plus de 500 kilomètres de long, qui prend dans certains secteurs la forme d’un mur de béton”, qui avait “rendu les infiltrations de Cisjordanie en Israël plus difficiles”[3]. Quant à la sécurité d’Israël, que le Diplo ne peut se résoudre à écrire sans la corseter de signes typographiques, c’était une vraie passoire : des attentats terroristes avaient déjà tué 916 victimes civiles et en avaient blessé et mutilé 5000 autres en un peu plus de trois ans[4].

Un mur israélien, par définition, ne peut être qu’un symbole d’apartheid et de génocide des Palestiniens

En réalité, la définition d’un mur est simple : c’est une atteinte aux droits de l’homme, sauf quand il protège les chouchous du Monde et de ses co-militants antisionistes. Israël est tout le contraire : la religion Mondiale demande tous les 25 décembre au Père Ayatollah de le faire disparaître de la surface du globe. Un mur israélien, par définition, ne peut donc être qu’un symbole d’apartheid et de génocide des Palestiniens.

Pour les compagnons de route, difficile de s’affranchir du bilan globalement positif

Les réflexes ont la vie plus dure que la réflexion. Cela explique la réaction au mur dont la Finlande vient de commencer la construction pour se protéger de la Russie. Il est d’autant plus difficile à avaler que les Finlandais l’élèvent “par peur des migrants”.

Construire un mur, c’est moche, mais quand, en plus, il doit empêcher les migrants d’être accueillis avec des bouquets de fleurs, ça relève du crime contre l’humanité.

Sauf que là, Le Monde[5] a repris la dépêche AFP, comme ses confrères, sans y ajouter le moindre grain d’amertume, ou la plus petite grappe d’indignation. Adieu les envolées lyriques de l’israélophobie en uniforme de palestinolâtre à keffieh! 

L’Ukraine est la nouvelle Palestine, mais la Russie n’est pas la réincarnation de l’État juif : les compagnons de route de l’URSS ont encore trop de tendresse pour elle.

Les médias sont binaires, même quand ils sont pro-LGBT

Les médias français ne sont “non binaires” que quand il faut gay-prider avec les LGBT. 

Pour le reste, ils obéissent militairement à un manichéisme basique : jusqu’à ce qu’elle soit attaquée par la Russie, l’Ukraine n’avait pas particulièrement bonne presse. Les journalistes se fichaient comme de l’an 40 du culte que vouent encore les Ukrainiens à leurs compatriotes nazis. Certes, ils furent, en 1941, des complices enthousiastes de la Shoah par balles[6], 33 771 hommes, femmes et enfants juifs, tués en deux jours, dans le ravin de Babi Yar à côté de Kiev. 

Mais aujourd’hui, l’Ukraine outragée, l’Ukraine brisée, l’Ukraine martyrisée[7]… est béatifiée et les Ukrainiens sont le nouveau peuple élu, puisque la Russie les a envahis et que nous la soutenons.

 

Les murs se suivent et se ressemblent…

Mais ils ne sont pas tous égaux devant la haine. C’est au pied du mur qu’on juge le maçon, et à sa nationalité que les médias jugent de sa culpabilité ou de son innocence.

Exemples :

– La muraille de Chine, merveille du monde, hors concours. 

– Pourtant, c’est un ouvrage militaire ! 

– Oui, mais cépapareil.

– Le mur de Trump ? 

– Coupable ! 

– Mais… ce projet datait d’avant lui : plus de 1000 km (sur les 3 144 que mesure la frontière) en avaient été construits par Obama, Bush et Clinton ! Et Biden a repris les travaux. Alors, BTP ou barbelés ? 

– Yaka continuer à le haïr sous le nom de Mur de Trump. Oubliez les autres !

– Le mur du facho Victor Orban, dictateur de Hongrie : infrastructure ou apartheid ? 

Réponse par “Radio France”, qui est au groupe Le Monde ce que le Braille est aux aveugles :

 – “En 2015, alors que les réfugiés fuyant la guerre en Syrie affluaient en Europe, l’initiative de Viktor Orbán était perçue comme un nouveau ‘mur de la honte’. Mais les temps ont changé… Sept ans plus tard, … le dispositif ‘anti-migrants’ du président nationaliste hongrois, s’est perfectionné… et a servi de modèle à de nombreux autres pays. En quelques années, 1 200 kilomètres de clôture ont été érigés aux portes de l’Europe”[8]

Diable… Si Le Monde et Radio France échangent leur élitisme antisioniste contre une prise en compte du réel, comment choisira-t-on le criminel sur qui décharger nos toxines, tout en conservant une conscience immaculée ? On va être obligés de penser ?

© Liliane Messika


Notes

[1] “Hiver 54, Abbé Pierre”, film hagiographique de Denis Amar, 1989.

[2] https://www.monde-diplomatique.fr/2002/11/BRUBACHER/9625

[3] https://www.lefigaro.fr/international/2008/01/03/01003-20080103ARTFIG00020-israel-a-l-abri-des-attaques-kamikazes-.php

[4] https://www.icj-cij.org/public/files/case-related/131/1578.pdf

[5] https://www.lemonde.fr/international/article/2022/11/18/un-mur-entre-la-finlande-et-la-russie-sera-construit-a-partir-de-mars-2023-annonce-helsinki_6150595_3210.html

[6] Expression du Père Patrick Desbois : https://livre.fnac.com/a13504381/Patrick-Desbois-La-Shoah-par-balles

[7] Pour ceux qui ont raté les épisodes précédents, référence au discours de de Gaulle à la libération de Paris, le 25 août 1944 – https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/25-aout-1944-paris-outrage-paris-brise-mais-paris-libere

[8] https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/migrants/video-apres-avoir-fait-scandale-le-mur-anti-migrants-de-la-hongrie-est-desormais-un-modele_5131660.html


Écrivain, Essayiste, conférencière, traductrice, Liliane Messika est auteur de plus de 30 ouvrages, dont plusieurs sur les conflits du Moyen-Orient. Liliane Messika est membre du comité de rédaction de Menora.info.

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