Ypsilantis. Dix tableaux juifs – 2/10

Les Nouveaux historiens

Les Nouveaux historiens n’ont vraiment pas ma sympathie, mais qu’importe ! Je vais m’efforcer d’être objectif et de faire part de mes humeurs aussi peu que possible.

Suite aux accords d’Oslo (1993) et des pourparlers qui leur font suite, des historiens israéliens répondent à la sollicitation de médias ainsi que de milieux universitaires et politiques de divers pays qui veulent déconstruire – le grand mot ! – sur la base de certaines recherches les « mythes » fondateurs du sionisme. On ne tarde pas à désigner comme « Nouveaux historiens » ceux qui s’attèlent à cette déconstruction. « Nouveaux historiens », soit une sorte de « Nouveau Testament » de l’histoire. La dénomination « Nouveaux historiens » prend modèle sur une autre dénomination, « Nouveau Testament », le « Nouveau Testament » étant supposé dépasser l’« Ancien Testament » pour le parfaire.  Les « Nouveaux historiens » se présentent en quelque sorte comme le Verus Israel par rapport aux « Anciens historiens » (?), soit ceux qu’ils accusent d’avoir élaboré les « mythes » fondateurs du sionisme. Les « Nouveaux historiens » reprennent le schéma de la théologie de la substitution.

Benny Morris (né en 1948)

Benny Morris est considéré comme le chef de file des « Nouveaux historiens ». En 1987, il publie « The Birth of the Palestinian Refugee Problem », un écrit dans lequel il s’efforce de démontrer que la guerre d’Indépendance de 1948-1949 ne s’est pas déroulée dans la « pureté des armes », soit une injonction morale inscrite dans un code de conduite donné à l’armée israélienne. Le non-respect de cette injonction se serait surtout traduit par des déplacements massifs et forcés de populations arabes voire par des exactions.

Ilan Pappé publie en 1992 un ouvrage intitulé « The Making of the Arab-Israeli Conflict » dans lequel il soutient qu’Israël aurait cherché la guerre non seulement en 1948-1949 mais également par la suite. D’autres « Nouveaux historiens » comme Sinha Flapan, Tom Segev et Baruch Kimmerling patrouillent dans l’histoire d’Israël à la recherche de ses fautes. Mais le sionisme ne serait-il pas tout bonnement pour eux le « péché originel » ?

Les « Nouveaux historiens » qui trop souvent semblent vouloir faire cadrer l’histoire avec des idées préétablies ne se sont jamais vraiment imposés malgré leurs « révélations ». Et ils sont aujourd’hui quelque peu oubliés, ce qui semble paradoxal quand on sait qu’un Juif antisioniste est un met de choix pour un non-Juif antisioniste qui, ainsi, peut diffuser sa propagande sans craindre d’être traité d’antisémite. Ces « Nouveaux historiens » ont eu leur petit succès à leurs débuts, soit dans les années 1990, mais ils ne parviennent pas à s’imposer dans les sphères politiques et universitaires, ce qu’explique en partie le fait que leurs travaux paraissent alors qu’Israël n’a pas trop mauvaise presse – le pays est engagé dans le processus d’Oslo. En Israël même, le socle sioniste se révèle solide et leurs publications ne sont guère lues. A partir de novembre 2001, les antisionistes constatent la mort dans l’âme que le chef de file des « Nouveaux historiens », Benny Morris, non seulement n’a jamais renoncé au sionisme mais qu’il considère les Palestiniens comme responsables de l’échec de tous les efforts de paix depuis les années 1930.

Il y a plus. La réputation scientifique d’Ilan Pappé prend un sacré coup. En 1999, à l’université de Haïfa, un certain Teddy Katz qui prépare un mémoire de maîtrise consacré à des « massacres » perpétrés par une brigade israélienne dans un village arabe en 1948 est attaqué en diffamation par des vétérans de cette brigade. Teddy Katz dont les recherches sont supervisées par Ilan Pappé finit par avouer qu’il a falsifié des enregistrements présentés en soutien à son mémoire, mémoire qui sera annulé par le conseil scientifique de ladite université. En 2002, il confessera avoir reçu des fonds d’une organisation palestinienne afin de poursuivre ses travaux.

En résumé, les travaux des « Nouveaux historiens » n’ont pas remis en question les fondements moraux et politiques du sionisme et de l’identité nationale israélienne. Par ailleurs, leur contribution sérieuse à l’histoire est minime – pas nulle mais minime.

(à suivre)

© Olivier Ypsilantis

Né à Paris, Olivier Ypsilantis a suivi des études supérieures d’histoire de l’art et d’arts graphiques. Passionné depuis l’enfance par l’histoire et la culture juive, il a ouvert un blog en 2011, en partie dédié à celles-ci. Ayant vécu dans plusieurs pays, dont vingt ans en Espagne, il s’est récemment installé à Lisbonne.

https://zakhor-online.com/

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